Le président national du CNPA engage un bras-de-fer législatif contre des dispositions de la loi de Finances 2021 très pénalisantes pour la filière comme pour l’automobiliste.
Le président national du CNPA (Conseil national des professions de l’Automobile), le Marnais Francis Bartholomé, ne mâche pas ses mots à propos de l’instabilité fiscale et des projets de taxes en tous genres qui pèsent sur l’automobile dans un contexte rendu encore plus anxiogène par la crise sanitaire. Morceaux choisis.
UN PLAN DE RELANCE EN PANNE ?
« Dans le cadre de la préparation du plan de Relance, nous avions expliqué à Emmanuel Macron qu’il fallait d’abord liquider les stocks de voitures neuves pour pouvoir relancer la machine. Les mesures du plan de soutien automobile du 26 mai dernier ont été de bons choix, en particulier en permettant un rebond à court terme après un effondrement historique des ventes au printemps, et en favorisant l’emploi et l’embauche d’apprentis. Or, nous ne pouvons que constater que le projet de loi de Finances apparaît actuellement en contradiction avec la volonté de pérenniser la filière. La guerre aujourd’hui se fait entre le bon sens que nous entendons représenter et une certaine idéologie présente au sein de la convention citoyenne. Indiscutablement, nous ne sommes pas sur la même planète car la convention citoyenne veut des villes avec uniquement des piétons et des vélos. La filière automobile fait les frais d’enjeux politiques car le Président Macron veut donner des gages à la convention citoyenne qui fait du “car bashing”. Mais la guerre n’est pas perdue, et nous nous battons au niveau du CNPA, de jour comme de nuit, à l’Assemblée où les discussions sur le projet de loi de Finances 2021 ont commencé. Le CNPA porte d’ailleurs une série d’amendements à ce projet de loi de finances visant à rétablir une fiscalité plus juste et équilibrée. Par exemple, le malus au poids des véhicules proposé initialement par la convention citoyenne est une absurdité totale. C’est aussi une question de principe : une fois que le malus au poids est voté, rien n’empêche ensuite d’abaisser le seuil chaque année. Nous ne sommes pas seuls dans ce combat. Nous venons de signer une tribune collective réclamant la fin des changements incessants de fiscalité et dénonçant la très forte augmentation du malus CO2, la création d’une nouvelle taxe sur les véhicules et d’autres mesures récentes contraires à l’esprit du plan de Relance. Cette tribune a été co-signée, entre autres par le Comité des Constructeurs Français d’Automobiles et la Plateforme Automobile présidée par Luc Chatel. Au passage, je rappelle qu’un Français sur dix vit de l’automobile et que les enjeux sociaux et économiques sont énormes. »
L’AUTOMOBILE, VACHE À LAIT FISCALE ?
« À vouloir trop en faire, par exemple en allant bien au-delà des exigences de la trajectoire européenne pour le CO2 et en surtaxant toujours davantage l’automobile et l’automobiliste, la France s’éloigne toujours plus de l’esprit initial qui voulait que les bonus et malus s’équilibrent. C’était vrai au départ mais nous allons toujours plus loin dans le déséquilibre avec désormais un milliard d’euros de recettes de malus prévus dans la loi de Finances 2021 contre 500 millions d’euros de dépenses de bonus sous forme d’aides à l’achat de véhicules propres et de primes de conversion. Rappelons aussi que le renforcement du barème du malus automobile, tel qu’il est prévu, aurait un impact direct : 40 % des modèles produits et vendus en France seraient touchés par un malus CO2 de plus de 1 000 euros contre 5 % actuellement. Le projet de loi de finances promeut des modèles de véhicules citadins et une vision urbaine de la mobilité, opposée aux modèles familiaux ou utilisés pour des longues distances dans les territoires. »
MOBILISER TOUTES LES ÉNERGIES
« Nous avons besoin des différentes technologies que nous connaissons, et nous prônons par ailleurs la neutralité énergétique au sein du CNPA. Chaque technologie a ses avantages et ses points faibles, l’électrique est très bien pour la proximité mais pour les longs trajets il faut d’autres énergies. Ce qui est certain, c’est qu’on ne pourra pas décarboner un parc français de 36 millions de véhicules avec une seule technologie. Dernier élément dont il faut aussi tenir compte, c’est le prix des carburants et des autres énergies. On se souvient que c’était leur augmentation qui avait suscité le mouvement des gilets jaunes. L’hydrogène peut devenir une alternative intéressante, d’autant que dans le cadre du plan de Relance, l’Etat met enfin les moyens en termes de moyens financiers pour parvenir à produire de l’hydrogène propre en France. »
LE DIESEL N’EST PAS ENCORE CONDAMNÉ
« Bruno Le Maire avait laissé entendre que les moteurs diesel récents Euro 6 pourraient obtenir la vignette Crit’Air 1. Le gouvernement a commandé une étude en 2019 pour évaluer la possibilité d’attribuer une vignette Crit’Air 1 aux véhicules diesels récents, aujourd’hui réservée aux moteurs essence. L’étude doit permettre de comparer les émissions de Nox et de particules fines entre moteurs diesels et essence récents.
Or, il semble bien que les diesels modernes font mieux que les moteurs essence pour certaines émissions polluantes. Nous demandons officiellement aux pouvoirs publics de publier cette étude, ce qui n’est toujours pas fait. On ne peut s’empêcher de penser que les résultats doivent être favorables au diesel, notamment en ce qui concerne les Nox, ceci expliquant cela. »
Les propositions du CNPA
Une trajectoire d’abaissement de la grille du malus plus soutenable pour les automobilistes et les entreprises, avec un abaissement du seuil de 5 grammes par an d’ici 2023
Plafonnement du malus à 30 % du prix d’acquisition d’un véhicule
Suppression d’un malus fondé sur le poids du véhicule
Maintien du bonus pour les personnes morales à 5 000 euros
Maintien du bonus pour les véhicules hybrides et rechargeables à 2 000 euros
Création d’un chèque mobilité responsable de 200 euros pour inciter les ménages à faibles revenus à faire entretenir leur véhicule
Lancement d’un fonds d’aide à la modernisation et à la diversification des stations-services
Augmentation du forfait mobilité durable à 800 euros par an et par salarié
Porter le taux de TVA des services de mobilité partagée à 10 % à l’identique du taux en vigueur actuellement pour le transport collectif