Le 1er janvier 1999, onze pays européens adoptaient une monnaie unique commune. Bilan.
L’euro était l’aboutissement à la fois des guerres atroces qui avaient ensanglanté le continent au début du XXe siècle et des difficultés économiques après le « choc pétrolier » et la fin des Trente Glorieuses.
La croissance moyenne annuelle des Douze avait été réduite de 5,3 % entre 1960 et 1973 à 2,2% de 1973 à 1985. Ce ralentissement s’expliquait par un épuisement des échanges commerciaux, bloqués par des barrières non tarifaires, et par des tensions monétaires provoquant des dévaluations en chaîne. La réponse des Européens a été rationnelle, ils ont décidé d’adopter un marché unique, puis l’euro.
Le grand marché et l’euro ne sont pas des décisions « technocratiques », mais des choix logiques approuvés par l’intelligence des peuples. Ces choix rationnels ont été couronnés de succès. Le marché unique offre des avantages admis par tous, y compris par le gouvernement britannique de Theresa May, qui se débat pour les conserver. L’euro est, lui, accepté et incontesté.
L’euro est largement accepté, 74 % des Européens ont une opinion « favorable » de la monnaie unique, 70 % en France. Preuve qu’elle s’est imposée partout, y compris de l’autre côté du Rhin. Pour l’Allemagne, fière de son Deutsche Mark, les avis favorables n’étaient que de 57 % en 1999, ils sont de 83 % aujourd’hui. La monnaie de l’Europe a survécu à la plus grande crise depuis les années 1930 et à l’ébranlement de la Grèce et des pays endettés. Sa solidité n’est plus remise en cause.
PERTE DE SOUVERAINETÉ ?
Les partis politiques extrémistes ont tous renoncé à revenir aux monnaies nationales. D’abord parce que c’est trop compliqué, mais surtout parce que les peuples ne le veulent pas. Nommé en juin cette année par une coalition d’extrême droite et d’extrême gauche élue pour refuser les diktats de Bruxelles, le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, est allé dans la capitale européenne pour rassurer : l’Italie ne quittera pas l’euro.
Quel a été le prix à payer pour installer l’euro ? Celui de la perte de sa souveraineté, disent les populistes. Or, dans le régime précédent, c’est la Deutsche Bundesbank qui décidait pour tout le monde. Et qu’ensuite, comme le soulignait Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, l’indépendance de conserver sa propre monnaie est une illusion.
STABILITÉ MONÉTAIRE
Les Européens ont gagné une stabilité du taux de change dans la zone euro, des taux d’intérêt exceptionnellement bas pour tous les pays membres (le gap des taux d’intérêt des autres membres avec les taux allemands était de 5,9 % de 1979 à 1999, il est descendu à 1,8 % depuis 1999) et des facilités d’échanges et de voyages. La rationalité du choix fait par les peuples européens dans les décennies précédentes a payé.
Les dévaluations désormais impossibles ont forcé les gouvernements à adopter une stratégie de compétitivité, voire d’austérité pour certains, et les promesses de prospérité ne se sont parfois pas matérialisées ; mais, la rationalité de « faire ensemble » a payé. L’Union européenne, le grand marché et l’euro ont été des réponses historiques auxquelles les peuples européens sont très attachés.