Philippe SidreUne vie de saltimbanque

Philippe SIDRE

Après une vie nomade, Philippe Sidre devient en 2018, le directeur de l'institut International de la Marionnette.

Directeur de l’Institut international de la marionnette et de l’Ecole Nationale Supérieure depuis septembre 2018, Philippe Sidre, Vosgien de 57 ans, a fait toute sa carrière professionnelle dans le Grand Est.

Après une prime jeunesse passée en montage des Hautes-Vosges, dans la Vallée de la Moselotte, où il passa beaucoup de temps à lire et profiter de la nature environnante à travers l’apiculture et l’élevage mais aussi en y pratiquant l’athlétisme jusqu’à 23 ans – « j’ai été champion de Lorraine du 1 500 mètres après avoir touché à plusieurs disciplines »- , Philippe Sidre découvre la pratique du théâtre à 9 ans au collège et au sein d’un « patro » de Thiéfosse, son village natal de 800 âmes.

« C’est la femme du directeur de l’usine textile, le Tissage Perrin, qui nous a initié à la scène dans son grenier. C’était extraordinaire ensuite de fouler les planches et de jouer différents rôles. »

Une fois doté de son Bac D, Philippe Sidre décide de travailler trois ans dans la Marne, la Normandie et en Moselle comme éducateur spécialisé. « Mais je n’avais pas suffisamment de recul pour continuer dans ce métier. »

En mai 1984, dans le cadre d’une objection de conscience, il entre dans la vie professionnelle comme responsable et animateur du foyer rural de Bouxières-aux-Dames au cœur du bassin métallurgique de Pompey. Parallèlement, il entame une formation d’animateur dans différentes régions françaises. Cela lui permet de se familiariser avec les questions de management, d’organisation, de comptabilité, d’administration, de pédagogie, psycho-sociologie et méthodologie. « Un cursus vraiment complet qui, par la suite, me permit de mettre en place des projets dans des MJC ou autres structures. À son terme, j’avais rédigé un mémoire sur la diffusion culturelle en milieu associatif. »

Lors de cette période à la tête du foyer rural de Bouxières-aux-Dame qui compta jusqu’à 1 600 adhérents, Philippe nouera ses premiers contacts avec des artistes et metteurs en scène professionnels.

« Il a fallu que je structure cet endroit jusqu’alors géré par des bénévoles. En mettant en place un secrétariat et en embauchant des coordinateurs pour les activités sportives. Ce fut pour moi une bonne entrée en matière professionnelle et une initiation permanente aux arts de la scène. À l’époque, on parvenait à dégager assez vite des crédits publics sur des projets culturels. Il y avait de la réactivité. Ça m’a appris à manager des équipes, à appréhender la mixité des publics, à construire des projets éducatifs, associatifs et culturels et prévoir des objectifs à plus ou moins long terme. Une mission absolument passionnante. C’est comme cela que je me suis construit, via ces moments de partage. »

UNE PASSIONNANTE EXISTENCE NOMADE ENTRE 1998 ET 2005

Par la suite, de 1998 à 2005, Philippe conciliera éducation populaire et diffusion culturelle en prenant des fonctions de coordinateur artistique du réseau culturel « Spectacles en campagne » qui commença en Meurthe-et-Moselle avant de s’étoffer pour devenir « Scènes et Territoires en Lorraine ». Une structure unique en France, créée par dix-neuf fédérations d’éducation populaire. « Ce fut la première scène conventionnée sans avoir de domicile fixe. On travaillait alors dans tous les lieux possibles. Une existence nomade au cours de laquelle on a monté 200 représentations par an avec les habitants de tous types de villages pour lesquels l’art prenait tout son sens à travers des spectacles de culture contemporaine. C’est là que j’ai commencé à nouer des relations avec le milieu de la marionnette que j’avais auparavant découvert au Lavoir-Théâtre d’Epinal, à travers les productions de la compagnie Houdart-Heuclin, puis au festival d’Avignon. J’ai été captivé par le côté inerte de la marionnette qui devient vite vivante et au-delà de cela, d’un art qui peut tout raconter. »

Eprouvant ensuite l’envie de se poser un peu, Philippe Sidre décide en 2006 de prendre la direction du Théâtre Gérard-Philipe à Frouard. Une mission qu’il assumera durant treize ans. « J’en ai fait un lieu consacré à 80 % à la marionnette, en créant notamment le festival international Géo Condé dans la ville natale de celui qui fut artiste, sculpteur, musicien, peintre et même aviateur. Son petit-fils avait d’ailleurs formé Jacques Félix à la marionnette. J’ai retrouvé sa trace et je me souviens de l’émotion qu’il ressentit en sortant des malles de tournées, les 80 marionnettes de la collection de son grand-père. Cette séquence s’était en plus passée à Cornimont dans… le village où je suis né. »

« C’EST BEAU DE METTRE TOUT CELA EN MUSIQUE »

À Frouard, qui devint la première scène conventionnée de la marionnette, Philippe accompagna de nombreux jeunes artistes « car il est beau de voir comment une idée artistique va éclore dans le temps en lui donnant les outils nécessaires pour la produire en public ».

Après avoir porté sur ses épaules ce beau projet « et par amour de la marionnette », Philippe Sidre postule en septembre 2018 avec succès à la direction de l’Institut international de la marionnette.

« Je savais où je mettais les pieds même si lors du dernier festival mondial, en recevant nombre de délégations étrangères qui voulaient obtenir un rendez-vous, je me suis réellement rendu compte que le monde entier vient à Charleville-Mézières durant ces dix jours. C’est absolument énorme. On a, ici, le plus grand centre de documentation de l’univers et la seule école française à former des artistes marionnettistes de très haut niveau. Et c‘est beau de mettre tout cela en musique, de travailler avec des gens bourrés de talent et d’affirmer cette discipline comme un art à part entière.»

Dans le chef-lieu des Ardennes, il gère une vingtaine de salariés. À moyen terme, Philipe Sidre a l’intention de développer la formation professionnelle continue auprès des artistes professionnels mais aussi d’autres publics, d’ouvrir l’école le plus possible sur la ville. D’où la récente création de portes ouvertes. Et favoriser des créations dans la ville ce qui sera le cas en mars 2020 dans des lieux comme la Place Ducale, le marché couvert et la rue du Moulin.

Il va aussi s’efforcer de conforter le projet de Cité des Arts de la Marionnette visant à regrouper l’ensemble des instances de marionnettes dans l’ancien bâtiment Lebon qui, d’ici 2025, sera entièrement rénové et abritera un musée de la Marionnette.

Passionné par ailleurs par l’observation des étoiles, Philippe Sidre fait partie de l’association d’astronomie Omega basée à Guignicourt-sur-Vence. « J’ai un télescope et quand j’ai besoin de me laver la tête et que le temps est dégagé, je monte sur les hauteurs pour aller observer les planètes et les étoiles. »

Parcours

1962 Naissance le 29 mai 1962 à Cornimont (Vosges) dans la Montagne, à côté de La Bresse.
1984 Intègre le foyer rural de Bouxières-aux-Dames.
Mai 1998 Prend ses fonctions de coordinateur artistique du réseau culturel « Spectacle en campagne ».
2005 Devient directeur du théâtre Gérard-Philipe à Frouard (54).
2018 Prend la tête de l'Institut international de marionnettes de Charleville-Mézières.