Emmanuel de Rohan ChabotUn patron différent des autres

Emmanuel de Rohan Chabot, PDG de la Sefac devant le siège de l’entreprise à Monthermé.

L’ex-Préfet des Ardennes, Pascal Joly, a remis le 8 novembre 2019, les insignes de Chevalier de l’Ordre national du Mérite à Emmanuel de Rohan Chabot, PDG de la Sefac à Monthermé depuis 2001.

Après avoir passé sa jeunesse en vivant pleinement ses passions pour les sports mécanique, le ski hors piste et le rugby, Emmanuel de Rohan Chabot dont les parents étaient architecte- décorateur et écrivain – sa mère a reçu le Prix de l’Académie Française pour une biographie sur Louis de Vogüé, président du Canal de Suez- a réussi un bac scientifique à l’école Saint-Louis de Gonzague à Paris en 1972. Le natif de Neuilly-sur-Seine intègre alors la section électronique de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich en 1974.

« J’étais à la fois tenté par l’étranger et l’excellente réputation d’une des meilleures universités au monde qui dispensait alors des matières sans équivalent en France ».

DIX ANS CHEZ SCHLUMBERGER

Cela va lui permettre d’entamer sa carrière professionnelle par la grande porte au sein du groupe Schlumberger où il restera de 1980 à 1990 pour y occuper différents postes d’encadrement. « Après avoir débuté comme ingénieur R & D en développant un laboratoire de simulation des réseaux HT et THT à la division Protection et Contrôle des Réseaux, je suis devenu chef de produits de 1983 à 1985 avec pour mission de lancer une nouvelle gamme de produits de contrôle-commande. Ce qui a permis de générer un chiffre d’affaires de 6 millions d’euros dont 50 % à l’export. Ensuite, j’ai été directeur de marketing et des ventes export au sein de la filiale Balteau à Mexico puis directeur général, de 1986 à 1988, de la branche contrôle de conteneur à Montrouge, une start-up créée pour développer un système révolutionnaire de contrôle d’objets volumineux par rayon gamma et détecteurs basés sur le principe des chambres à fil de Charpak ».

Par la suite, Emmanuel de Rohan Chabot occupera d’autres postes de directeur général. À la division Machines d’étiquetage d’Avery Dennisson à Chilly-Mazarin (45 salariés) où il réalisera la fusion de deux divisions concurrentes après le rachat de la société Pilot par le groupe américain. « Durant ces quatre ans, on a réalisé un chiffre d’affaires de 6 millions d’euros et accru l’activité cumulée de 40 % ».

Et, à Londres, à la tête de la société Newtec UK Ltd (35 salariés), filiale du groupe Bongrain spécialisée dans les machines d’emballages. Ses résultats – un chiffre d’affaires porté de 5 à 9 millions d’euros entre 1992 et 1997 conjugué à une augmentation du résultat opérationnel – permettront à celui qui parle couramment cinq langues d’être parallèlement nommé directeur général de la filiale allemande de Newtec tout en restant responsable de l’unité anglaise.

De 1998 à 2000, nouvelle promotion : il devient PDG du groupe Continentale d’Equipements Electrique, société de 210 employés, possédant sept filiales européennes et cotée au second marché.« Il me fallait remettre à plat les pratiques managériales, restructurer trois filiales fortement déficitaires et réorienter la R & D pour modifier des produits installés non-conformes et pouvant entraîner des dommages considérables. Bref, anticiper le « bug » de l’an 2000 ».

PATRON DE LA SEFAC DEPUIS 2001

La maison mère ayant été placée en redressement judiciaire en janvier 2000 et revendue à ICE, Emmanuel de Rohan Chabot après avoir accompagné la CEE jusqu’à la fin du plan de cession arrive dans les Ardennes en mars 2001. Il pose ses valises à Monthermé.

Il a été recruté par le groupe britannique Triapt pour prendre les commandes et redresser les comptes de la Sefac, une PME bien connue dans la Vallée de la Meuse pour avoir été dirigée par Bernard Despas. Spécialisée dans les systèmes de levage pour les véhicules de transport sur route et sur rail, elle avait été rachetée sous forme d’une LBO à AFE (Aciéries et Fonderies de l’Est).

« À l’époque, l’entreprise avait perdu en moyenne 1 million d’euros par an durant sept exercices. Des pertes régulièrement comblées par AFE. Au cours des trois premières années, mon action a consisté à rétablir la confiance du personnel mis à mal par huit années de tergiversations stratégiques et la noria de six Pdg en huit ans, adopter une communication simple et transparente, réorganiser l’entreprise en créant un service marketing produit et une direction commerciale pour le marché français tout en rétablissant le service après-vente curieusement abandonné en 1998 ». Et enfin changer en profondeur la stratégie commerciale en France et en Espagne et réduire la gamme de produits pour se concentrer sur le pole levage. D’où l’abandon de produits connexes compliqués et peu rentables.

Mais malgré le paiement régulier de l’échéance de ses dettes précédentes, la Sefac va être menacée de disparition suite au rachat d’un actionnaire de Triapt, la banque Natwest, par la Royal Bank of Scotland qui, en octobre 2004, change totalement d’optique en décidant purement et simplement de jeter l’éponge, entraînant ainsi la liquidation judiciaire de Triapt.

LE SAUVETAGE ET LE RENOUVEAU DE LA SEFAC

« Ces aléas ont déclenché notre hostilité et la naissance d’un projet capitalistique pour assurer la sauvegarde de la Sefac car la Royal Bank of Scotland avait mandaté KPMG pour vendre l’entreprise par petits bouts. Ce qui m’a amené à faire nommer un mandataire ad hoc par le tribunal de commerce pour empêcher par tout moyen le démantèlement de l’entreprise et favoriser sa reprise par ses dirigeants. Et en avril 2005, avec six cadres et au terme d’un bras de fer musclé de six mois, nous avons racheté la totalité des parts de l’entreprise à Royal Bank of Scotland et démarrer une nouvelle phase de développement avec des objectifs plus entrepreneuriaux que financiers ».

Emmanuel de Rohan Chabot et ses associés vont alors orienter la Sefac vers quelques axes forts : réintégration de la valeur ajoutée dans le cycle de production en rapatriant des commandes jusqu’alors sous-traitées, développement de la R & D pour assurer une montée en gamme des colonnes de levage et une amélioration de la rentabilité, redéploiement de marchés exports et injection de 1,5 million d’euros dans la rénovation de l’outil de production.

Des efforts qui porteront leur fruits car la Sefac (80 salariés) va augmenter de 50 % son chiffre d’affaires, principalement à l’international, entre avril 2005 et mars 2016, créé deux filiales en Angleterre et aux Etats-Unis et déposé six brevets dont un important concernant la synchronisation des colonnes de levage par voie hertzienne, ce qui, permit une ouverture vers le marché américain.

Aussi administrateur de réseau Entreprendre Champagne Ardennes, Emmanuel de Rohan Chabot, 66 ans, père de quatre enfants et collectionneur de voitures anciennes durant ses temps de loisirs revendique clairement, en évoquant sa carrière, « avoir souvent agi contre l’avis de ma direction ou de l’actionnaire en privilégiant l’individu face à des décisions arbitraires. Mais en prouvant aussi que mes choix étaient meilleurs parce que je savais développer la motivation des personnes concernées en les réorientant vers des missions en accord avec leurs véritables compétences ».

Parcours

1953 Naissance le 17 juillet à Neuilly-sur-Seine
1979 Devient diplômé de l’Ecole Polytechnique fédérale de Zürich (Suisse)
1986 Premier poste de directeur général à Paris
2001 Intègre la Sefac à Monthermé
2005 Rachat de l’entreprise Sefac avec six autres cadres de l’entreprise