Un monde d’après aussi vert que citoyen pour le CESER Grand Est

« Il faut instaurer une taxe transit quelle que soit sa forme », soutient Patrick Tassin, président du CESER Grand Est.

« Pour une refondation économique, sociale et environnementale », la contribution du CESER au Business Act du Grand Est va plus loin que l’urgence de l’après Covid. Avec deux exigences : promouvoir une économie environnementale et tenir compte de la parole citoyenne.

La Refondation économique, sociale et environnementale, proposée par le CESER, est un exercice en deux temps : une synthèse contributive à l’élaboration du futur Business Act du Grand Est qui sera présenté par le Conseil Régional à la mi-Juillet, et une vision citoyenne du « Monde d’après » qui sera dévoilée à l’automne prochain par l’Assemblée consultative régionale.

Les sujets abordés par le Conseil Economique, Social et Environnemental sont nombreux. Pour les principaux, ils abordent l’investissement “vert” des entreprises, la formation des jeunes, la réforme de la fiscalité locale, les transports … Avec des angles qui ramènent à certaines grandes attentes du CESER ou qui innovent, notamment en matière de fiscalité.

PGE, REMBOURSEMENT OU SUBVENTION ?

Si certains observateurs économiques estiment qu’un tiers des entreprises bénéficiaires du Prêt Garanti par l’Etat ne pourra pas rembourser, le CESER Grand Est imagine que l’on puisse transformer ces prêts en subvention. Son Président, Patrick Tassin, explique cette idée : « Il faut inciter les entre- prises à investir dans le cadre du respect de l’environnement. Les PGE ne devraient pas tous être forcément remboursés. Que l’Etat transforme une partie de ces PGE en véritables subventions, sous réserve que les entreprises concernées investissent en ce sens, en modifiant leur process de fabrication, voilà notre proposition ».

Les enjeux financiers ne sont pas anodins, les PGE dans le Grand Est totalisent à ce jour 5,7 milliards d’euros permettant à 32 750 entreprises régionales de résister à la crise. En rappelant que ce chiffre régional est provisoire puisque le PGE est accessible jusqu’au 31 décembre prochain et qu’il est remboursable sur cinq ans. Si l’idée du CESER fait son chemin, l’Etat subventionnerait ainsi et indirectement la production vertueuse des entreprises débitrices.

L’URGENCE DU VERDISSEMENT DU BTP

Un horizon de pertes d’emplois, de chômage, de désorientation des jeunes sur fond d’urgence climatique, le paysage prospectif du CESER s’impose en contrepartie. Patrick Tassin rappelle les trop fameuses passoires thermiques de l’habitat : « Il faut donner de la plus-value aux logements, privés ou publics, par l’isolation thermique et donc favoriser en ce sens les emprunts à long terme ». Et pour servir cette finalité, le Président du CESER vise les aides comme la nécessité de former les jeunes aux métiers du BTP, avec en ligne de mire, la remise aux normes, sur un sujet connexe : les 20% de perte des réseaux d’eau dans le Grand Est.

Faisant allusion à cette urgence climatique mâtinée de relocalisation des activités, Patrick Tassin évoque le secteur automobile : « Nous serons bientôt capables, en France, de construire nos propres moteurs électriques pour les voiture et notamment avec des batteries au graphène ». Ici comme ailleurs, le Président du CESER estime que les jeunes doivent être formés en urgence.

L’EMPRUNT DANS UNE FISCALITÉ RÉFORMÉE

L’actuel budget du Conseil Régional va être amputé de 75 M€ et le CESER évoque une baisse aux alentours de 250 M€ pour le budget 2021 hors emprunt : « Nous ne sommes pas loin, précise Patrick Tassin, d’une amputation de 10% des recettes de la Région ». Quand le Conseil Régional travaille à la préparation de la Décision Modificative concernant le Budget 2020 et à l’élaboration d’un véritable budget bis, la refondation du CESER s’intéresse à une certaine réforme de la fiscalité locale.

Premier objectif : la fiscalité sur les transports et en deux temps. Le CESER propose tout d’abord l’instauration d’une TVA à 5,5% dans les transports publics, comme pour le TER par exemple, au lieu de 10% actuellement, en précisant que cette dépense pèse un tiers du budget de la Région.

Le CESER constate ensuite que le Grand Est est la région de France la plus traversée par les transports routiers, en évoquant notamment la fréquentation de l’A31 ou de l’A35. En conséquence, « Il faut instaurer une taxe transit, rappelle Patrick Tassin, quelle que soit sa forme. Une taxe qui doit bénéficier à la Région. Cette idée doit d’ailleurs figurer dans le projet de Loi 3 D. Nous sommes dans le cadre de l’expérimentation accordée aux Régions ».

Moins de crédits européens ? L’emprunt n’est pas un gros mot. La Région Grand Est, qui possède des finances saines, a la possibilité de recourir un peu plus à l’emprunt. C’est un moyen, certes ponctuel, de pallier les difficultés à venir dans les deux ou trois ans à venir, mais puisque l’Union Européenne l’admet, les Régions doivent en faire autant. Voilà donc la philosophie réitérée du CESER sur les finances régionales.

INSTAURER ENFIN UNE TAXE POIDS LOURDS

Pour mémoire, et sans revenir à l’épisode des bonnets rouges, cette taxe, sous diverses formes, écotaxes ou eurovignettes, existe majoritairement dans les pays européens : Suisse, Autriche, Allemagne, Belgique, Danemark, Pays-Bas, Suède, Slovaquie, Pologne, République Tchèque, Grande-Bretagne … Un manque à gagner pour l’ensemble du territoire français estimé à 4 milliards d’euros par an et qui aurait pu permettre la mise à niveau de certaines voies ferroviaires ou routes secondaires.

Commentaires de Patrick Tassin :

« Avec une exonération pour les transporteurs français. L’idée vise certaines importations transitant par notre région et rappelle que le fret a sa place dans le ferroviaire et le fluvial ».

UNE SOLUTION AU TÉLÉTRAVAIL BASHING ?

Quand dans certains milieux le télétravail bashing bat son plein, Patrick Tassin évoque l’un des volets de la Refondation du CESER Grand Est : « Nous proposons au Conseil Régional une réflexion sur la base des tiers-lieux, des lieux mis à disposition des salariés par des prestataires de services, des collectivités territoriales ou des associations, gratuitement ou pas. Une façon de travailler plus conviviale que l’isolement jugé dépressif par certains télétravailleurs. Plus pour des questions psychologiques (lien social reconstruit) que techniques. Des lieux, proches des domiciles des télétravailleurs ».

Quelle place pour cette refondation du CESER dans le projet Business Act ? « Une contribution parmi beaucoup d’autres, précise Patrick Tassin. Nous sommes allés plus loin que l’urgence de l’agenda régional. Délai oblige, nous avons livré à la Région une synthèse. Après viendront la mise en œuvre du Business Act et l’élaboration du Budget 2021. Nous allons travailler sur un terme plus long, avec une vision qui dépasse le simple post-Covid et qui aborde largement l’urgence climatique. Notre document final sera prêt à l’automne prochain. Je précise qu’en cette période de crise, le Président Rottner n’était pas obligé de saisir le CESER. Il l’a fait et nous l’en remercions ».

Et le Président du CESER Grand Est conclut : « La crise que nous traversons doit être l’occasion d’une remise en cause en profondeur des mentalités. Notamment en tenant compte de la parole citoyenne, telle que nous la recueillons aujourd’hui au CESER à travers les Conseils de Développement ».