Gratien LeroyUn jeune chef au top

Gratien Leroy

La victoire d’Objectif Top Chef a été pour Gratien, le déclic pour changer de métier.

Comptable depuis neuf ans chez KPMG, l’Ardennais Gratien Leroy, 29 ans, grand gagnant de l’émission culinaire « Objectif Top chef », a choisi de se réorienter professionnellement vers la restauration.

Il n’avait jamais pris de cours de cuisine et faisait donc exception au palmarès de l’épreuve. En remportant en candidat amateur la 5e édition d’ « Objectif Top Chef », émission diffusée sur M6 et suivie en moyenne par 1,7 million de téléspectateurs, l’autodidacte nouzonnais Gratien Leroy a causé sensation et épaté les chefs, le 3 janvier dernier, en devançant les apprentis cuisiniers.

Une performance qui a transformé la vie de cet Ardennais de 29 ans; au point de le pousser à abandonner son job de comptable pour se consacrer pleinement aux fourneaux.

Après avoir conquis le jury d’« Objectif Top Chef » par sa créativité au service d’une technique irréprochable, il s’est qualifié pour le deuxième volet de l’émission, « Top Chef », en intégrant la brigade de Philippe Etchebest. Ce qui l’a amené à faire une croix sur ses vacances d’été et prendre des jours de disponibilité pour tourner, à l’automne 2019 à Paris, cette onzième saison qui sera diffusée dès le 19 février, à 21 heures.

LA CUISINE, UNE VOCATION

Fidèle à la clause de confidentialité signée avec la chaîne, Gratien Leroy ne nous a rien dévoilé. En revanche, il s’est confié sur son incroyable aventure télévisuelle au cours de laquelle il s’est prouvé que la cuisine était bien sa vocation.

« Depuis une décennie, j’ai suivi toutes les saisons de cette émission dont je suis un fan. J’ai donc éprouvé une grande fierté d’être sélectionné et de pouvoir me mesurer à l’élite des cuisiniers. Tout s’est passé très vite. Des amis m’ont poussé à m’inscrire. Je me suis dit : « Pourquoi pas ? » d’autant que la production acceptait pour la première fois des amateurs. J’ai donc rédigé un dossier. Mon profil les a intéressés, ce qui m’a permis d’avoir un entretien et de passer le casting via Skype. J’ai été retenu ensuite à un testing en studio et sélectionné pour passer les différents tournages. À partir de là, j’ai amené mes produits et ma glacière dans un château du Médoc avant d’enchaîner les étapes jusqu’à “la Battle”. »

Ses parents, Yvan et Dalila, l’ayant appris à être autonome, Gratien a depuis longtemps fait sa « propre popote » et préparé les repas. « C’était mon atmosphère. Curieux de nature, j’ai creusé le sujet en achetant du matériel, en lisant des livres et en faisant des recherches. De la cuisine domestique, je suis vite passé à la confection de plats léchés. Quand j’allais au restaurant, j’échangeais aussi beaucoup avec les chefs de cuisines comme Sylvain Hallet et Fabien Neveu. »

Au « resto », il ne choisit pas forcément ce qu’il aime mais plutôt les plats qu’il ne connait pas. « Car manger est toujours un moment de découverte. »

« JE SUIS SORTI GRANDI DE CETTE EXPÉRIENCE »

Surnommé « le sanglier des Ardennes » par Philippe Etchebest, ce fils de buralistes a fait forte impression durant ses passages en confectionnant de l’aïoli, un ris de veau, un accord osé avec un boudin noir et une Saint-Jacques, la fleur de courgette qui lui valut le coup de cœur, une tarte aux pommes, un dessert de légumes , une tartiflette, une ballotine de dinde avec la note maximale de cinq étoiles, une burrata ou une selle d’agneau et raviolles de brebis.

Il est très prolixe sur cette expérience qu’il n’oubliera jamais. « Partager tous ces moments, c’était une opportunité unique. Je ne voulais pas gâcher cette chance. J’espérais aller le plus loin possible mais finir l’expérience en remportant « Objectif Top Chef », c’est tout simplement énorme. Je sors grandi d’avoir marqué les esprits et avec un statut d’amateur confirmé. »

Pour lui qui n’était pas du métier, vivre la pression d’un concours, d’approcher des grands chefs et de présenter sa cuisine a été une expérience incroyable. Au fil des tournages, il a su occulter la concurrence en se concentrant sur ses plats, conçus avec passion et spontanéité « façon freestyle ». « Cette victoire a été très importante pour moi car c’est aussi la clé d’un changement de métier. »

DÉTERMINÉ À CHANGER DE VIE

Depuis son succès, Gratien a prolongé le plaisir en affrontant dans « TopChef », « plus en mode survivant que conquérant » (sic), des concurrents autrement plus redoutables avec l’espoir de convaincre les chefs jurés et étoilés Paul Pairet, Hélène Darroze, Michel Sarran et son mentor, Philippe Etchebest.

« Les semaines précédant ce rendez- vous, pour porter dignement les manchettes bleues de ma brigade et élever mon niveau, j’ai énormément bossé et pris des conseils auprès de grands chefs de ma région », livre-t-il. Un véritable entraînement de sportif de haut niveau pour l’ex-footballeur de Nouzonville, Joigny-sur-Meuse et Aiglemont/Neufmanil …

Conscient que cette passion le dévore, Gratien a donc aussi franchi un pas. Après neuf ans au cabinet KPMG de Charleville-Mézières où il s’occupait de la gestion des entreprises en s’acquittant des tâches courantes de comptabilité, il négocie actuellement son départ pour s’orienter à 100 % vers la cuisine. « J’avais besoin d’un petit coup de pouce pour avancer et assouvir ma passion. « Objectif Top Chef » m’a aidé à ouvrir les yeux et me persuader que j’étais fait pour le métier de cuisinier. C’est ce qui m’anime, maintenant. J’aime cette activité car c’est un moyen de faire plaisir aux gens. J’ai donc pris les choses en mains pour m’épanouir professionnellement. Ma trentième année sera donc celle de la transition. Je mets la comptabilité en suspens mais cette matière me sera utile par la suite. »

L’APPRENTISSAGE DU MÉTIER

Rêvant d’ouvrir un jour son propre restaurant, Gratien éprouve le besoin de se former, d’apprendre le métier de A à Z afin de mûrir son projet sans brûler les étapes.

« M’étant inscrit hors délai pour passer un CAP de cuisine en candidat libre – je me suis fait refouler à deux jours près par l’Académie – il va falloir que je me forme tout seul. Avoir été lauréat d’Objectif Top Chef est déjà une belle ligne sur mon CV pour trouver du travail. J’ai donc l’intention de passer par le bas de l’échelle pour apprendre toutes les ficelles du métier sous forme de stages ou de contrats chez des grands chefs. Je veux aussi manger dans de bons établissements, échanger avec des gens de la profession, goûter à différentes cuisines pour parfaire mes connaissances. Voir l’envers du décor en apprenant la gestion du personnel et des stocks et combler mes lacunes en pâtisserie pour ne pas retrouver Philippe Etchebest à « Cauchemar en cuisine » (rires). Bref, poser mes idées sur le papier avant d’exercer mes compétences et ouvrir quelque chose dans les Ardennes. Avec la rage que j’ai, je sais que ça va le faire. Je serai cuisinier demain. »

S’il s’installe dans les Ardennes, la suite s’annonce en tout cas prometteuse pour Gratien Leroy, presque déjà assuré du succès de sa table. « Mon parcours a déclenché un vrai engouement sur les réseaux sociaux et dans le département. J’ai gagné 1 700 followers. Les gens m’arrêtent souvent dans la rue pour m’encourager, m’adresser des félicitations et faire des selfies. J’ai l’impression d’avoir rendu des Ardennais heureux en valorisant le département. Ce qui me fait plaisir car je suis très attaché à mon terroir. »

L‘ancien élève du collège Rouget-de-Lisle et du Lycée Bazin qui dit « avoir toujours faim » et aimer « manger et faire à manger » deviendra sans nul doute un jour un chef innovant faisant la part belle aux produits locaux.

Parcours

1990 Naissance le 22 juin à Charleville-Mézières.
2008 Obtention d’un bac scientifique après avoir été formé au lycée Bazin en « sciences de l’ingénieur ».
2009 Entrée à l’IUT de Reims pour passer un DUT «Gestion, entreprise et administration ».
2011 Embauché en octobre, en alternance, chez KPMG où il exercera neuf ans.
2019 Début du concours « Objectif Top chef » au mois de juin.