Magali ChaillanUn coup de pinceau comme fil rouge

Magali Chaillan

Cette ancienne restauratrice de tableaux a décidé de délaisser les œuvres d’art pour bannir les produits toxiques de son atelier à Montauban. Elle lance « Maddam », une entreprise de création de papier peint haut de gamme et écolabellisé.

Dans un mois, Magali Chaillan va officiellement lancer la petite société qu’elle a montée de A à Z. C’est à la rentrée que le site internet de « Maddam », une entreprise de création de papier peint de grande qualité, va être mis en ligne afin de proposer ses œuvres à la vente. Les préparatifs vont bon train : les motifs sont dessinés, les couleurs et la matière choisies, les contacts avec les fournisseurs et ses premiers clients établis, et les démarches administratives se terminent. À quelques semaines de cette nouvelle page de sa vie professionnelle, l’ancienne restauratrice de tableaux balaie les craintes. « Ça va se faire ! Ce n’est qu’une marche à franchir, qu’un passage. » Si elle est tranquille, c’est parce que c’est dans son tempérament, qu’elle y a « pas mal réfléchi » et que des challenges professionnels, elle en a vu d’autres. Cette jeune maman d’un petit garçon est née et a grandi dans le Sud- Est, à Digne-les-Bains. Pendant ses jeunes années, elle consacre son temps libre à deux passions : les arts picturaux – « J’ai toujours dessiné et peint » – et le ski, à un bon niveau, puisqu’elle deviendra monitrice fédérale.Aprèsle Bac, Magali Chaillan suit des études de communication à Nice et obtient une licence en 1996.

Elle trouve rapidement du boulot dans un domaine qui n’a rien à voir avec sa formation, l’éducation. « Entre 1996 et 2000 j’ai travaillé dans un collège comme documentaliste. Cela m’a plu, j’ai toujours eu de bonnes relations avec les enfants. Mais c’était psychologiquement éprouvant et ce n’était pas mon cœur de métier. Je n’étais pas à ma place. »

À l’aube du deuxième millénaire, elle quitte son emploi et trouve un job dans une agence de communication à Avignon. Elle y œuvre à la diffusion de magazines professionnels. Mais au bout de deux ans, Magali Chaillan ressent l’envie de voir ailleurs. « L’ambiance ne me plaisait pas trop. En 2002, j’ai tout plaqué. » Mais que faire ? « Je me suis posé la question. Quel métier me permettrait d’exercer ma passion pour l’art et d’en vivre? J’ai trouvé une idée, je suis allée voir des restaurateurs de tableaux, ça m’a plu, et j’ai commencé une formation. »

La future créatrice de papier peint met les petits plats dans les grands et s’engage dans un apprentissage de quatre années, qu’elle finance grâce à une aide de Pôle Emploi puis des fonds personnels. En 2006, avant même d’être diplômée, elle apprend qu’une consœur veut fermer son atelier de restauration à Montauban. Diplôme en poche, elle part pour le Tarn-et-Garonne avec une collègue de Toulon. « Il fallait que l’on termine des œuvres qui se trouvaient dans l’atelier. De là, on a eu un bon relationnel avec les clients et aussi le conservateur des antiquités et des objets d’arts, qui est le représentant de l’État chargé de la protection du mobilier pour les monuments historiques. »

Les deux amies reprennent l’atelier, « Œuvre et maître ». C’est une sortie de formation en fanfare, avec un beau projet et du boulot trouvé avant même la fin de l’apprentissage. C’est aussi le début d’une belle aventure. Magali Chaillan s’occupe de toiles de particuliers, parfois de petites merveilles dont elle ne peut pas parler, en raison d’une obligation de confidentialité. Elle prend également en charge des peintures de monuments historiques. « Je peux me retourner sur mon parcours avec fierté, j’ai eu des tableaux magnifiques. Une des œuvres clés a été le Pressoir Mystique de l’église Notre-Dame-du-Moutet à Saint-Nicolas-de-la-Grave. Cela a été une aventure humaine, la restauration s’est faite en plusieurs tranches. J’ai découvert un tableau du XVIIe caché sous une œuvre du XIXe, et la qualité artistique était de bonne facture. »

En 2010, son associée décide de partir. « Ça a été un grand coup d’angoisse mais j’ai décidé de continuer. » La passion est le moteur de Magali Chaillan, qui prend du plaisir au-delà de l’aspect artistique. « Ce que j’aimais avec ce métier, c’est la relation avec les gens. Ils m’amenaient des œuvres qui avaient vu des baptêmes, des mariages, qui les avaient accompagnés pendant leur vie. »

Après plus de 10 ans de pratique, la flamme diminue, et la restauratrice choisit de fermer son atelier en 2017. La baisse de motivation n’est pas la seule raison de sa décision. « Mon papa est décédé d’un cancer très agressif, ça a été un électrochoc. J’utilise des matériaux très toxiques dans mon atelier, et j’ai un enfant de six ans. Je ne voulais plus employer de produits chimiques. J’ai essayé de faire autre chose, de travailler dans le commerce, mais je n’arrive pas à rentrer dans le moule de la société. »

Magali Chaillan se creuse les méninges et se repose la question qui lui a fait prendre un grand virage il y a 15 ans: « Comment continuer dans la création personnelle et gagner sa vie ? » Voici la solution : adapter ses photos, dessins et peintures personnels sur du papier peint haut de gamme, dont la matière première provient de forêts gérées de manière écologique, avec des encres sans produits chimiques ni émanations, et une grande qualité d’impression.

La créatrice de « Maddam » mûrit son projet pendant deux ans, et bosse dur. « J’ai pris la porte en pleine face. Avant, j’étais prestataire dans une niche. Là, c’est de la vente, avec de nouvelles technologies. Il a fallu que je m’adapte. J’ai trouvé des personnes-ressources pour m’aider par exemple en graphisme et en réseaux sociaux. » Avant même le lancement de la société, elle a pu tester avec succès ses motifs sur son compte Instagram. « Je considère que ce ne sont pas des œuvres, ce n’est pas de l’art, c’est un message personnel. » Dont le contenu pourrait être l’un de ses leitmotivs : « Quand on n’est pas à sa place, il faut se bouger ! »

Parcours

1973 Naissance à Digne-les-Bains dans les Alpes-de-Haute-Provence
1996 Obtient une licence en communication à la faculté de lettres de Nice
1996 Premier emploi comme documentaliste dans un collège à Saint-André-les-Alpes
2000 Décide d'exercer un métier en rapport avec sa formation, est embauchée dans une agence de communication à Avignon
2002 Lassée par l'ambiance de travail, elle plaque tout et commence une formation comme restauratrice d'œuvres picturales près d’Avignon
2006 A l’issue de sa formation, arrive à Montauban avec une amie pour reprendre un atelier de restauration
2017 Après 10 ans, la passion pour son travail se fait moins vive, et surtout elle souhaite arrêter d'utiliser des produits toxiques. Commence à plancher sur un projet d'entreprise pour créer et vendre du papier peint haut de gamme
2019 En septembre, lancement de sa marque « Maddam »