Angelo FerrignoUn chef en plein rêve

Celui qui était encore commis il y a sept ans est aujourd’hui à la tête de son propre établissement, après avoir été étoilé pendant deux années. Le 11 juin, Le Cibo Restaurant ouvrira ses portes au 24 de la rue Jeannin et proposera une cuisine gastronomique fidèle aux valeurs d’Angelo Ferrigno.

Passionné depuis l’enfance, l’ancien plus jeune chef étoilé de France, trois ans seulement après son arrivée en tant que commis à la Maison des Cariatides, passe un nouveau cap cette semaine avec l’ouverture de son propre établissement, Cibo Restaurant.

C’est un chef heureux, en plein rêve et comblé d’émotions que nous avons rencontré à quelques jours de l’ouverture de son premier établissement. Au milieu des dernières finitions, le restaurant gastronomique de la rue Jeannin prend déjà forme. Angelo Ferrigno présentera le Cibo Restaurant Jeudi 11 juin. « C’est un rêve d’enfant qui se réalise, donc on n’a pas le droit de se louper », confie-t-il, non sans une certaine fébrilité.

Angelo Ferrigno a grandi aux côtés d’une mère portugaise et d’une grand-mère espagnole. « Je passais beaucoup de temps avec elles en cuisine, pendant qu’elles préparaient à manger. J’étais là pour les assister, sans trop les aider mais pour échanger avec. Je fais aussi partie de l’époque de Bon appétit bien sûr (célèbre show culinaire télévisé de Joël Robuchon. Ndlr)… Tout cela m’a donné envie de découvrir le métier », se souvient-il. Dès le collège, les premiers stages de découvertes ont été l’occasion de confirmer ses envies. Face à ce constat et conscient que l’école n’était pas faite pour lui, Angelo Ferrigno décide, brevet des collèges en poche ou pas, d’intégrer l’École des métiers – alors CFA La Noue – pour apprendre le métier en apprentissage. « J’ai passé mes quatre années dans un restaurant à Semur-en-Auxois, explique-t-il. Je pense avoir rencontré les bonnes personnes dès le départ. J’ai été bien pris en main. Ils m’ont fait aimer le métier, j’ai découvert les concours… Une véritable satisfaction qui m’a permis de m’accrocher à ce métier, presque à une passion ! ».

DES DÉBUTS COMPLIQUÉS MAIS VITE SURMONTÉS

Après sa formation, un BEP et un brevet professionnel en poche, il était temps de se lancer dans le monde du travail. « J’ai eu un gros accident qui m’a stoppé pendant un an… J’ai eu du mal à remarcher et je l’ai vraiment très mal vécu. À un moment, je me suis même dit qu’il allait penser à autre chose, mais je n’avais pas envie d’abandonner mon rêve d’enfant. Ça a été dur, mais au bout d’un an d’arrêt, j’ai trouvé la force pour retourner en restauration. » Il intègre alors la brigade de l’Hostellerie du Levernois, du côté de Beaune, en tant que commis de cuisine… Une expérience qui n’a finalement pas fonctionné. « Du jour au lendemain, refaire dix heures de travail par jour, je rentrais, je dormais, je me levais juste pour aller bosser… Je connaissais pourtant ce rythme puisque je l’avais vécu pendant quatre ans. Mais je ne me suis pas senti capable de poursuivre. Au bout d’un mois, j’ai dit stop. »

De retour à Dijon, Angelo Ferrigno envoie des CV dans tous les établissements de restauration et se retrouve très rapidement recruté par Thomas Collomb pour intégrer la brigade de la Maison des Cariatides. « Dès lors, autre ambiance et plus petite brigade. Thomas est un vrai passionné ! Il a réussi à me redonner cette envie. J’ai retrouvé la niaque, on a avancé ensemble et j’ai gravi les échelons. »

DE COMMIS À CHEF ÉTOILÉ

Arrivé commis de cuisine, Angelo Ferrigno devient rapidement chef de partie, avant que Thomas Collomb lui propose la place de second deux ans plus tard. « Il était déjà en train de préparer la Rôtisserie du Chambertin. Nous avons donc avancé en duo pendant un an avant qu’il ne m’annonce qu’il était temps pour lui de quitter les Cariatides pour rejoindre la Rôtisserie. À ce moment-là, soit il me laissait second et recrutait un nouveau chef, soit il me passait chef… Il a préféré me faire confiance, je le connaissais et il s’est dit que j’étais le plus à même de retransmettre la cuisine que nous avions faite jusqu’à maintenant », évoque le jeune chef.

Un an plus tard, alors que la vie aux Cariatides suivait son cours, Angelo Ferrigno devient le plus jeune chef étoilé de France, à seulement 23 ans. « Pour l’anecdote, nous étions au mariage de notre patron. Nous avions fermé les Cariatides pour l’occasion et fait un transfert d’appel sur le mobile de la réceptionniste. On était tous à fond en cuisine pour préparer le repas de mariage, et la réceptionniste arrive en cuisine, m’interpelle et me dit qu’elle a le guide Michelin au téléphone, se souvient-il avec beaucoup d’émotions. Sur le coup, je ne réagis pas. Elle répète, mon second me tape l’épaule. On savait que le guide allait sortir. Je suis un grand amateur, je les collectionne… Donc j’ai été répondre dans le bureau et la personne m’a annoncé que la Maison des Cariatides avait été visitée et que nous aurons une étoile sur le prochain guide 2016. Ils m’ont ensuite demandé de monter sur Paris deux jours plus tard et de rester discret entre temps. L’année qui a suivi a été un rêve ».

UN “CIBO” PROJET

Deux ans après, Angelo Ferrigno décide de quitter la Maison des Cariatides. « Tout s’est passé vraiment trop vite. Nous avons vécu de très bons moment. L’équipe était jeune. Je n’étais pas seulement le plus jeune chef étoilé de France, nous étions surtout très certainement la plus jeune brigade de France, avec une moyenne d’âge proche de 23 ans. Cette expérience et cette étoile m’a ouvert des portes, mais il était temps que je parte des Cariatides parce que mon nom prenait le dessus sur la maison de Thomas. On avait décidé de trouver un accord et on s’est dit qu’il était peut-être temps que j’ouvre mon propre restaurant. » Après deux années de préparation, de montage et de travaux, « deux années difficiles avec des bas et des hauts », Angelo Ferrigno est sur le point d’ouvrir son propre restaurant gastronomique au numéro 24 de la rue Jeannin. « Mon projet est de mettre en avant les producteurs et toutes les personnes qui ont œuvré et aidé dans la création de l’entreprise, explique-t-il. J’aime le travail bien fait, j’aime les beaux produits et j’aime ma région ». Son challenge ? Faire un restaurant en se fournissant dans un rayon de 200 kilomètres autour de Dijon, quitte à faire des sacrifices. « Nous avons décidé de supprimer les épices et le chocolat. Seul écart, le café. On ne se voyait pas ne pas pouvoir proposer de café en fin de repas. Mais, là encore, nous avons trouvé un meilleur ouvrier de France dans la région qui torréfie sur place. » Cette nouvelle équipe de cinq personnes pourra recevoir les clients dans un établissement composé d’une première salle pouvant accueillir un groupe de huit à dix personnes et une seconde salle de 24 couverts, entièrement ouverte sur la cuisine. À la carte, un menu unique, en trois à quatre plats le midi et en sept plats le soir, qui sera totalement dépendant de l’approvisionnement. En clin d’œil à ses origines, Angelo Ferrigno a choisi un mot à la fois simple et complexe. « Cibo signifie la nourriture, l’aliment principal, en italien. Il représente plutôt bien l’établissement, détaille-t-il. Nous mettrons en avant le produit du producteur, que nous travaillerons et que nous cuisinerons différemment selon les époques et la périodes. Nous serons dans une cuisine moderne où trois saveurs se mélangeront pour en faire un plat ». Une cuisine dictée par les producteurs, qui évoluera avec les envies, le temps et les années.

Parcours

1992 Naissance, le 20 novembre, à Semur-en-Auxois.
2011 Après quatre années d’études, Angelo Ferrigno sort de l’École des métiers (alors CFA La Noue) diplômé d’un BEP et d’un brevet professionnel en cuisine.
2013 Il intègre la Maison des Cariatides à Dijon après un bref passage à l’Hostellerie du Levernois.
2015 Suite au départ de Thomas Collomb, Angelo Ferrigno devient chef.
2016 Il obtient sa première étoile et devient le plus jeune chef étoilé de France.
2018 Angelo Ferrigno quitte la Maison des Cariatides pour monter son propre projet d’entreprise.
2020 Il ouvre son établissement, le Cibo Restaurant, le 11 juin.