UIMM : comment anticiper sans visibilité ?

De gauche à droite : Lionel Vuibert, directeur général de l’UIMM Champagne-Ardenne, Christian Brethon, président, Arnaud Bernier, administrateur.

Confronté à un manque certain de visibilité dans ses activités, l’industrie métallurgique de Champagne-Ardenne doit cependant anticiper l’avenir et former des jeunes. Pas simple.

À l’automne revenu, le moral des acteurs des industries et métiers de la métallurgie en Champagne-Ardenne épouse la teinte saisonnière et vire au maussade. Si l’année 2019 avait bien démarré, dans la foulée de 2018, l’activité de la branche s’est sensiblement tassée au 2e trimestre et enregistre même un sérieux coup de frein depuis l’été, comme le constatent Christian Brethon, président de l’UIMM Champagne-Ardenne, Arnaud Bernier, administrateur, et Lionel Vuibert, directeur général.

Il est vrai que le contexte européen n’est pas au beau fixe, tant du côté de l’Allemagne et de l’Italie qui connaissent des difficultés économiques, que du Royaume-Uni qui n’en finit pas avec le Brexit.

Il n’empêche qu’en dépit de cette diminution d’activité, les dépenses d’investissement des entreprises industrielles ont progressé de 5 % au 1er semestre 2019, témoignant tout de même d’un relatif optimisme.

DOUBLE PARADOXE

Mais ce n’est pas cette décélération de la conjoncture qui soucie le plus les chefs d’entreprise, davantage préoccupés par le manque de visibilité à long terme de leurs activités.

Or, cette visibilité serait pourtant essentielle à l’heure où tout le secteur doit s’engager dans l’adaptation aux nouveaux métiers du numérique. Les entreprises ont besoin d’embaucher. « Dans la métallurgie, 38 % des effectifs champardennais (33 % au niveau national) ont plus de 50 ans », indique Lionel Vuibert. « En France, l’industrie a besoin de recruter 250 000 salariés par an – dont 100 000 pour la seule métallurgie. La métallurgie de Champagne-Ardenne pèse environ 2 % des emplois. Ce sont quelque 2 000 postes qu’il faut pourvoir chaque année ». Le double paradoxe de la situation, c’est qu’il faut embaucher sans savoir ce que réserve l’avenir, d’une part, mais également que les entreprises n’arrivent pas à trouver les salariés dont elles ont besoin.

« Ce qui manque, explique Christian Brethon, c’est le vivier qui n’a pas été renouvelé ou recréé dans les années précédentes. Il y a certes aujourd’hui un peu plus de jeunes en apprentissage, mais cela signifie 3, 4 ou 5 ans de formation pour des emplois qualifiés. Or les entreprises ont besoin de compétences immédiates, car elles doivent faire face à des marchés contraints sur des périodes courtes. »

BIEN FORMÉS ET MOINS CHERS

D’où le recours à des travailleurs détachés (parfois jus- qu’à 70 % pour certains marchés ), avec un niveau de qualification satisfaisant et… moins chers que les Français. « Il faut que l’on puisse recruter et former des jeunes. Ceux qui passent par les centres de formation trouvent tout de suite du travail, avec des salaires en moyenne supérieur de 15 % à l’ensemble des branches industrielles. »

Au 21e siècle, l’industrie métallurgique fait peau neuve. C’est ce qu’elle doit clairement faire savoir.