Le bras-de-fer est engagé à la suite de décisions remettant en cause la limitation des indemnités en cas de licenciement abusif.
Le message de l’ancien président, Patrice Huart, du collège salariés et comme celui de son successeur pour 2019, Alain Colbois, a été très clair à l’occasion de l’audience solennelle de la juridiction prud’homale auboise. L’objet de la discorde, ce sont les cinq décisions rendues le 13 décembre dernier à Troyes, remettant en cause la conventionnalité de la barémisation des indemnités dues au salariés en cas de licenciement abusif. Depuis, deux autres conseils prud’homaux, Lyon et Amiens, ont suivi l’exemple troyen. « Ces jugements ne méritent ni indignité, ni glorification et sont tout simplement l’expression du droit dans une démocratie en ouvrant la voie d’un débat juridique devant les cours d’appel et la Cour de cassation », indique Patrice Huart.
En substance, la juridiction troyenne a estimé que le plafonnement des dommages et intérêts dus au salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, prévue dans la réforme du droit du travail mise en place par Emmanuel Macron en septembre 2017, allait à l’en-contre de la convention internationale no158 de l’Organisation internationale du travail et de la Charte européenne des droits sociaux.
La déclaration, dans Le Monde, d’un haut fonctionnaire du ministère du Travail, estimant que cette décision posait la question de « la formation juridique des conseillers prud’homaux », n’a fait que jeter de l’huile sur le feu. « Ce jugement a été rendu normalement, avec toute la compétence de conseillers prud’homaux expérimentés », a réagi Alain Colbois, issu du collège employeurs, jugeant inacceptable une telle remise en cause.
MIEUX QUE LA MOYENNE NATIONALE
En attendant, à l’heure du bilan de l’année écoulée, le conseil de prud’hommes de Troyes se montre plutôt bon élève avec un taux d’appel de 25,1 % sur ses décisions, en baisse de 5,7 % par rapport à 2017. Un taux d’appel dans l’Aube qui reste également très inférieur à la moyenne nationale qui se situe à 66,7 %. Autre point positif : un taux de conciliations de 9,8 %, plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale.
Enfin, l’activité est restée intense avec 330 affaires nouvelles sur le fond traitées par le conseil, soit autant que l’année précédente. La même stabilité a été observée en matière de référés. En matière d’organisation, une inquiétude subsiste. Un amendement relatif à la réforme de la justice vise à la suppression de la quasi-totalité des greffes des Conseils des prud’hommes pour faire appel à ceux du tribunal judiciaire. « Nous ne pouvons que déplorer, sur la forme, que les députés n’aient pas interrogées les instances concernées ».