Transparence, Solidarité, Conscience et Bon sens

Jérôme GILLE, co-gérant du cabinet rémois des Ressources et des Hommes.

Qu’on le veuille ou non, cette crise sanitaire s’est invitée chez chacun de nous. Si nous décidons de ne pas la subir et de ne pas regretter ce qui advient, mais de préférer comprendre et en faire quelque chose d’utile, sans doute est-il temps de se poser pour choisir le chemin que nous allons prendre tous ensemble.

Un peu longues à écrire sur les frontons des mairies, ces valeurs s’ajoutent pourtant aux trois fondatrices de notre démocratie moderne.

QUE NOUS ENSEIGNE CETTE CRISE ?

Tous, autant que nous soyons, nous nous sommes retrouvés interdits, en difficulté. Difficulté à envisager une manière sereine de se représenter l’avenir.

Difficulté à maintenir un lien de confiance avec ceux qui ont la charge de prendre des décisions pour assurer le bien commun. Même si le besoin de réglementation reste d’actualité pour assurer notre sécurité, les excès de règlements, le zèle, l’inadaptation et l’arbitraire ont croisé le chemin de chacun. Jusqu’à l’insupportable parfois. Pourtant, la crise sanitaire est minime à côté de la crise écologique qui depuis de trop nombreuses années nous envoie des signes. La catastrophe humanitaire se présente à nous. Et nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas ou que nous n’avions pas vu venir. Nous savions et nous avons vu venir !

Les richesses ne sont pas là où nous avons toujours pensé qu’elles étaient. La santé, par exemple a longtemps été raisonnée comme un coût, elle est pourtant notre plus grand bien.

CE QUE LE MONDE NE PEUT PLUS ET NE DOIT PLUS ÊTRE !

Nous nous sommes rendu compte que les références ou points de repère d’hier ne sont plus. Les métiers les plus dénigrés se sont montrés indispensables pour assurer notre survie. Alors que certains métiers prestigieux se sont montrés particulièrement inutiles. Les hiérarchies communément admises et jamais réévaluées tombent, là, sous nos yeux.

Les égoïsmes se sont révélés au grand jour et nous sont apparus insupportables. Ici, le détournement d’une expédition de masques sur le tarmac d’un aéroport chinois, là un défaut de solidarité avec une nation qui rencontre la pandémie dix jours avant tout le monde.

Mais si cet ordre n’est plus, vers quoi allons-nous ? Quelle nouvelle organisation pourrait être meilleure ?

CE QU’IL FAUDRAIT QUE LE MONDE SOIT ?

Dans la future organisation du monde, pour qu’elle soit pérenne, il faudra que la conscience individuelle devienne collective. Il ne sera bientôt plus possible de décider sans prendre en considération les paramètres de notre responsabilité sociale. Ce que la RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) a cherché à faire rentrer dans le processus de décision des entreprises ne peut plus échapper à la plus petite des entreprises. Cette responsabilité est écologique, sociale, technologique, solidaire. C’est tout notre système de valeurs qui est à repenser. Remettre l’église au milieu du village, comme dirait le bon sens commun.

Nous avons vu que sans solidarité, nous étions perdus. Il nous faut donc de la solidarité.

Nous avons vu que les décisions au plus près du terrain étaient les plus efficaces parce que réactives et adaptées. Il nous faut donc du bon sens produit par ceux qui savent, par ceux qui font.

Nous avons aussi observé que la conscience dans chacun de nos choix nous permettait d’éviter des conséquences désastreuses. Ou plutôt, nous avons découvert le caractère désastreux des conséquences de choix non éclairés par de la conscience. Il nous faut donc de la conscience dans chaque décision. Cela ne peut se faire qu’en acceptant une chose : une seule paire d’yeux ne peut pas tout voir. Donc celle de l’autre peut m’apporter, surtout si ce dernier n’est pas d’accord avec moi. Les différences permettent de voir, de comprendre et de décider plus juste.

Nous avons aussi vu que la communication, lorsqu’elle manque de sincérité ou lorsqu’elle est systématiquement élaborée à partir d’éléments de langage et de stratégies, conduit inévitablement à la défiance et au décrochage. Nous avons donc un besoin impérieux de sincérité et de transparence.

Voilà donc ce qui devrait définir notre ligne directrice pour demain : Sincérité, Transparence, Solidarité, Conscience et Bon sens. Ça serait un peu long à écrire au fronton des mairies, après Liberté, Egalité et Fraternité. Pourtant, ce serait une jolie devise, pour la révolution à mener.

QU’EST-CE QUI POURRAIT NOUS EMPÊCHER D’ALLER VERS LE MEILLEUR ?

Ce n’est rien de le dire, mais le monde d’hier ne coche pas toutes les cases et n’a pas fait sienne cette devise. Nous entendons déjà les sirènes de l’Ancien Monde nous dire qu’il faut au plus vite remettre en place les conditions de la prospérité et de la croissance.

Mais quelle croissance ? Cette croissance, ô combien cynique, qui intègre la valeur de la consommation des antidépresseurs dans le calcul du PIB ? (La France est championne du monde).

Ce qui peut nous empêcher d’aller vers le meilleur, c’est la peur de perdre ce que nous croyons posséder. La peur de perdre cette construction que nous croyons, que nous nous efforçons de croire éternelle, mais qui nous a déjà montré qu’elle est construite sur du sable.

C’est donc la peur de perdre ce que nous avons et surtout l’absence de vision sur ce que nous pourrions gagner à fonctionner autrement.

En psychologie, cela s’appelle la dissonance cognitive. Nous savons que nous sommes dans l’erreur, mais tant que c’est encore possible de nous accrocher à cette version qui ne fonctionne plus, nous nous y accrochons…

Jusqu’à ce que ça craque !

« C’est quand qu’on va où ? ». C’est le titre d’une jolie chanson mélancolique de Renaud, qui résonne avec la situation actuelle. Dans la même tonalité, on pourrait ajouter : « Et jusqu’où on va aller trop loin ? »

DES SOLUTIONS EXISTENT DÉJÀ

Ce qui se passe aujourd’hui est déjà modélisé par des chercheurs depuis les années 70. C’est donc que c’était bien prévisible. Les paramètres du monde de demain sont connus. Mais le pas à franchir pour y aller nécessite de traverser la peur de perdre.

Depuis maintenant plusieurs années, l’équipe « des Ressources et des Hommes* » accompagne des dirigeant.e.s pour les aider à sortir des sentiers battus. Pour s’ouvrir à d’autres manières de travailler ensemble, d’autres manières de partager la richesse. La richesse n’étant pas exclusivement financière, elle est humaine. Elle est dans la réalisation, dans l’aventure partagée.

La traversée de la peur de perdre, si elle est accompagnée, peut se faire avec bonheur. De toujours, le dirigeant a une responsabilité, c’est de montrer le chemin. Nous avons une responsabilité à notre tour, c’est de montrer au chef d’entreprise que ce chemin existe et de lui donner de vivre l’expérience de cette traversée.

Une fois cette expérience réalisée, le travail n’est pas fini, il commence vraiment ! Il s’agit d’emmener l’ensemble de son équipage dans cette aventure. Et c’est tout l’effectif de l’entreprise qui va s’engager dans cette traversée. Apprendre à prendre ses responsabilités, à développer de la conscience collective, à faire confiance, à montrer autant ce que l’on réussit que ce que l’on n’arrive pas encore à réussir. Il s’agit là d’une véritable révolution. Elle se fait à l’intérieur de chacun de nous, sans fusil, sans autre violence que celle qui nous donne l’énergie de dépasser nos peurs.

UNE CONVICTION, COMME UNE LUEUR DANS LA NUIT

Nous sommes convaincus que la transformation sociétale ne se fera pas par décision d’une classe politique. Ni par l’apport d’intellectuels censés être plus éclairés que nous. « N’attaque pas le système. Démode-le », écrit Bernard Werber.

La nouvelle mode, c’est nous qui la faisons. Femmes et Hommes de l’entreprise. Acteurs de la société civile, et de l’organisation de son quotidien. La construction du nouveau système se fera par le terrain et sur le terrain. Dans des salles de réunions, entre collègues, dans les CA… Par chacun de nous, qui avons l’envie et le courage de rêver d’un monde meilleur.

* « des Ressources et des Hommes » est un Cabinet de Conseil et de Formation installé à Reims qui accompagne depuis plus de 20 ans les femmes et les hommes de l’entreprise sur le chemin de l’excellence relationnelle.