Tourisme en BFC : « un été qui pourrait être en trompe l’œil »

Cet été en région la campagne, la montagne et ses grands espaces aérés, ainsi que les héberments atypiques ont tiré leur épingle du jeu, avec parfois même des records d’affluence (ici les cabanes Coucoo Grands Lacs en Haute-Saône).

Jeudi 3 septembre Bourgogne Franche-Comté Tourisme présentait le bilan de cet été atypique, marqué par la crise sanitaire et économique liée à la Covid 19, ainsi que les actions que le Comité régional du tourisme (CRT) entend déployer dans les mois à venir pour soutenir ce secteur d’activité très durement touché.

L’apparition en janvier, en France du Sars-CoV-2 a totalement changé le paysage touristique international. Alors que fin 2019, l’Organisation mondiale du tourisme prévoyait une croissance des voyageurs internationaux de 5 % pour 2020, c’est au contraire à un effondrement du trafic que nous avons assisté. Le printemps a été complétement paralysé. Une situation qui faisait peser d’immenses inquiétudes quant à la période estivale. En juin, la situation s’est débloquée avec la phase 2 du déconfinement annoncée le 28 mai par le gouvernement. « L’été s’est relativement mieux déroulé que ce que l’on pouvait craindre. C’est particulièrement vrai en montagne et à la campagne : le Jura, la Saône-et-Loire, le Morvan ou encore le Plateau des Mille étangs en Haute-Saône ont ainsi tiré leur épingle du jeu de manière significative avec parfois des records d’affluence pour certains sites, développe Marie-Guite Dufay, présidente du Conseil régional de Bourgogne Franche-Comté. Notre région représente 4 % des séjours des Français. C’est moins que les intentions de départ mesurés au printemps en pleine crise sanitaire (7 %), mais c’est supérieur à la part de marché habituelle de la région qui se situait à 3,6 % en juillet 2019 et à 3 % en août 2019. BFC se positionne cet été devant la Corse, l’Île-de-France et Hauts-de- France et juste derrière Centre Val de Loire et Grand Est ». Les Franciliens, les Rhône-Alpins et les habitants du Grand Est ont été très présents. Côté étrangers : si les Américains et les Chinois étaient absents, la région a pu compter sur un afflux de touristes européens de proximité (Belges, Hollandais, Allemands et Suisses) pour compenser. « Pendant le confinement, la région a rapidement mis en place des actions d’informations, de communication et d’accompagnement auprès des professionnels du tourisme », affirme Patrick Ayache, vice-président du Conseil régional. « Nous avons créé une cellule de crise au comité régional du tourisme (CRT), lancé la campagne “Sortez chez vous” qui a fait plus de 250.000 vues sur les réseaux sociaux et initié le pass tourisme régional qui a recueilli 11.000 participants », complète Loïc Niepceron, président de Bourgogne Franche-Comté Tourisme. Des outils conçus pour « redonner de la confiance dans l’esprit de nos concitoyens », selon Loïc Niepceron et qui semblent avoir touché leur cible.

UN ÉTÉ RELATIVEMENT SAUVÉ, MAIS DE SOMBRES PERSPECTIVES

La région a ainsi bénéficié d’un afflux supplémentaire de visiteurs ayant au départ envisagé des séjours vers d’autres destinations. « Au regard des aspirations des touristes, la région possède de nombreux atouts : la diversité du patrimoine historique et culturel, l’environnement naturel, la possibilité de découverte à pied et à vélo… ont été des facteurs de forte attraction au vu des circonstances sanitaires, notamment quant au sentiment de sécurité véhiculé par les grands espaces de nature », explique Marie-Guite Dufay. Pour Loïc Niepceron : « Avec les résultats de l’été globalement meilleurs que 2019, nous avons pu endiguer la casse du printemps ». « Un été, passé au côté des professionnels, rappel Patrick Ayache. Ce sont ainsi 1.306 entreprises du secteurs qui ont bénéficié de l’aide d’urgence, votée en mai et en juin, par la région, d’un montant total de dix millions d’euros. Cela nous a permis d’éviter la catastrophe. Toutefois, cet été relativement positif pourrait ne l’être qu’en trompe l’œil. Les bons résultats de juillet et août n’ont pas toujours permis de rattraper le manque à gagner du début de saison. Cet afflux de touristes estivaux ne concerne que certains types d’hébergement (chambres d’hôtes, cabane dans les arbres et autres sites atypiques… jugés par la clientèle plus Covid compatibles que les hôtels classiques de centre-ville), certains lieux, surtout en zones rurales… Je citerai trois professions qui sont aujourd’hui en grande difficulté : les agences de voyage dont l’essentiel de leur chiffre est basé sur une clientèle étrangère (notamment les marchés lointains : Chine, États-Unis) très nettement en recul et qui ne devraient pas revenir prochainement, le tourisme fluvial et les guides conférenciés qui ont souffert de la très forte baisse des visites guidées (-80,5 % en juillet et -37 % en août) et de l’absence de groupe, notamment scolaires ». Autres enseignements de cette saison hors-norme : les vacanciers sont restés plus longtemps en Bourgogne Franche-Comté mais le panier moyen a baissé, selon 31,2 % des prestataires de tourisme régionaux. Il s’est établi à 46 euros par jour et par personne. « Nous avons capté une clientèle de passage, dite “auto-routière” qui d’habitude descend dans le Sud. Ce sont autant de nouveaux touristes que nous devons péréniser à l’avenir, notamment en réalisant des investissements en matière d’hébergement », précise Loïc Niepceron. Maintenant tous les regards sont portés sur l’arrière saison déjà pronostiquée comme très difficile, notamment en ce qui concerne le tourisme d’affaires : « Sur l’été nous avons perdu 50 % de notre clientèle hôtelière et septembre s’annonce catastrophique avec, pour le moment, aucune réservation en portefeuille », témoigne Dominik Frachot, propriétaire de l’hôtel du Nord à Dijon. Avec le rebond de l’épidémie en France, et des pays comme l’Allemagne qui ne cessent d’allonger leur liste de régions françaises classées à risque, les annulations de réservations s’enchaînent en cascades et les perspectives sont des plus sombres. « On sert les rangs et on organise la résistance pour les mois à venir », assure la présidente de région, tout en annonçant une aide de 40 à 50 millions d’euros consacrée au tourisme. Inclue dans le plan de relance régional de 400 millions d’euros, celle-ci devrait être votée en octobre. Axé sur l’investissement, ce « coup de pouce » se déclinerait sur quatre champs : développement durable, tourisme social, hébergement et activités d’itinérance (plus particulièrement le tourisme fluvial).