Tisseyre + Associés renforce sa stratégie face à la crise

Alain Tisseyre, président fondateur de Tisseyre + Associés.

Pour contrer l’arrêt de nombreux projets, la PME, parmi les leaders européens de l’ingénierie acoustique, table sur d’autres axes de développement.

Le carnet de commandes pourtant plein, Tisseyre + Associés, qui figure parmi les leaders européens de l’ingénierie acoustique, accusera une année presque blanche. Installée à Toulouse depuis 1980 et présente également à Paris, l’entreprise, qui emploie une vingtaine de collaborateurs, planche à la fois sur l’acoustique environnementale (maîtrise de la pollution sonore dans l’environnement) et architecturale (maîtrise de la pollution sonore à l’intérieur d’un bâtiment et optimisation de l’aménagement). Depuis les années 90, elle a fortement développé sa présence en Chine et a trouvé un bel écho au Maroc depuis une décennie. Impactée par le coronavirus, elle doit cependant renforcer sa R & D afin d’assurer sa continuité. La PME, qui a généré un CA de 700 K€ en 2019, dont 60 % à l’export, consacre de fait chaque année 10 à 20 % de son chiffre d’affaires à la R&D.

« Nous avons repris notre activité à Pékin fin mars, mais c’est un début d’année particulièrement compliqué du fait du confinement. Nous opérons beaucoup à l’international depuis la Chine et de nombreux projets vont prendre du retard. Ainsi, nous concentrons nos efforts sur d’autres axes de développement. Sachant que la Chine connaît une forte expansion de son trafic aérien, nous travaillons par exemple sur une étude relative au problème du bruit généré par les aéroports, qui inclut un aspect technique, méthodologique et réglementaire », explique Alain Tisseyre, président fondateur de Tisseyre + Associés, avant de poursuivre : « en parallèle, nous planchons sur de grands projets d’urbanisme et de transports en Europe tel que le Grand Paris. Nous développons également une approche de BIM acoustique environnemental, qui englobe la géométrie de la construction, les relations spatiales, les quantités et propriétés des éléments de constructions, etc. afin de gérer tous les aspects environnementaux et la configuration urbaine d’un bâtiment, d’un quartier, d’une ville. Nous développons nos propres outils basés sur la modélisation acoustique en 3D, ce qui permet de simuler l’impact des solutions sonores sur les enveloppes intérieures et extérieures d’un bâtiment et d’en maîtriser les performances acoustiques optimales. Nous sommes les premiers sur ce marché ».

GRANDS CHANTIERS

C’est en 1980, qu’Alain Tisseyre crée avec un associé, Gamba Tisseyre, un cabinet de R & D axé d’abord sur le développement de logiciels. L’entreprise s’engouffre ensuite dans l’aventure de la modélisation numérique des phénomènes acoustiques dédiée à l’industrie. Pendant 10 ans, la société équipe l’ensemble des industriels de différentes filières. « Nous avons changé la donne de la caractérisation des matériaux. On proposait un support numérique à nos clients qui leur permettaient d’être certains de la performance qu’ils allaient mesurer au sein d’un laboratoire et de ne plus tâtonner. Pour eux, c’était un gain de temps, d’argent et plus de flexibilité ».

En parallèle, la structure séduit de grands groupes comme Bouygues, Eiffage, Campenon Bernard, Vinci, etc.

En 1993, la société change de braquet pour devenir une SAS, Tisseyre + Associés. « Je me suis séparé de mon associé pour me concentrer sur l’activité d’ingénierie acoustique ». Le jumelage de Toulouse avec la ville de Chongqing amène l’entreprise sur le terrain chinois pour une opération pilote de grande envergure. « J’ai participé aux travaux menés à Toulouse comme ville pilote pour la lutte contre le bruit. J’ai donc vendu cette expérience. L’opération a duré trois ans. Nous avons aussi collaboré avec des industriels français pour apporter des solutions aux nuisances concernant les chantiers, les salles de spectacles, etc. Cela nous a propulsés en Chine, qui a aujourd’hui, pour référence, la réglementation acoustique française ».

L’entreprise planche 24 mois sur l’opéra de Shanghai et signe une joint-venture avec l’Institut chinois IPPR (intégré à Sinomach) pour concevoir et livrer l’opéra de Pékin. S’en suivent plusieurs opérations et collaborations avec des agences d’architecture françaises sur le marché chinois. En parallèle, la société tisse sa toile dans l’Hexagone, principalement pour l’aménagement de lieux culturels et de bâtiments tertiaires (écoles, équipements d’enseignements, laboratoires de recherches). L’entreprise, qui participe à l’élaboration de la nouvelle réglementation acoustique éditée en 2000, mène différentes opérations en Ukraine et en Arabie Saoudite et s’implante au Maroc en 2009.

« Notre entreprise prend part à la construction de nombreux équipements publics et réalise 90 % des opérations de Bouygues. Actuellement, l’opération du nouveau CHU de Rabat, plus gros équipement en Afrique, semble préservée, mais les autres chantiers sont arrêtés ». Tout comme La maison de la formation de Jacqueline Auriol à Toulouse ou la Tour Trinity à Paris.

La PME, qui réalise une vingtaine de projets significatifs par an, couplés à une quarantaine de missions ponctuelles, ne compte pas pour l’heure s’implanter ailleurs. « Nous avons beaucoup à faire avec la Chine et le Maroc qui développe à grand pas ses équipements », affirme le dirigeant.