Responsabilité de l’employeur et pandémie

L’obligation de sécurité et de santé des salariés qui incombe aux employeurs peut être sanctionnée par la mise en cause de sa responsabilité civile pour faute. Elle peut aussi entraîner des sanctions pénales.

L’obligation  de sécurité et de santé des salariés est définie par le code du travail (articles L 4121-1 et suivants). Il ne s’agit pas d’une obligation de résultat qui imposerait à l’employeur de garantir l’absence de tout risque de contamination des salariés mais d’une obligation de moyen lui prescrivant de prendre les « mesures nécessaires » pour éviter le risque. Le code du travail précise que ces « mesures nécessaires » passent par la prévention, l’information et la formation, la mise en place d’une organisation du travail et de moyens adaptés. Ces mesures doivent être régulièrement adaptées pour tenir compte des changements de circonstances et doivent tendre à l’amélioration.

Dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, le ministère du Travail indique que ces « mesures nécessaires » sont celles préconisées par les pouvoirs publics, en particulier le respect des gestes barrières et des règles de distanciation.

RESPONSABILITÉ CIVILE

En cas de dommage causé à un salarié, l’employeur est susceptible d’engager sa responsabilité civile pour faute (code civil, article 1240).

La faute de l’employeur doit être démontrée, et, à l’inverse, c’est à l’employeur d’établir qu’il a respecté son obligation de sécurité.

La responsabilité de l’employeur est appréciée en tenant compte des mesures qu’il a prises en matière d’organisation du travail, d’information et de formation, mais aussi en fonction de la nature des activités du salarié, de ses compétences, de son expérience et de son niveau d’exposition aux risques.

Une faute inexcusable peut être reprochée à l’employeur s’il est établi qu’il avait conscience du danger auquel était exposé le salarié et n’a pas pris les mesures pour l’en préserver. La faute inexcusable permet la réparation intégrale du préjudice lorsque le salarié est pris en charge au titre d’une maladie professionnelle.

RESPONSABILITÉ PÉNALE

L’article 121-3 du code pénal définit le délit de « mise en danger délibérée de la personne d’autrui » et l’étend aux fautes d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de sécurité lorsque l’auteur n’a pas accompli les « diligences normales ».

Le même article prévoit que la responsabilité pénale des personnes physiques (à l’exclusion des personnes morales) peut être engagée bien qu’elles n’aient pas directement causé le dommage dès lors qu’elles ont commis une faute particulièrement grave. Il en est ainsi de la violation « manifestement délibérée » d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité et lorsque l’auteur n’a pas pris les mesures pour éviter le dommage ou a permis de créer la situation cause du dommage. De son côté, l’article 223-1 du code pénal précise, notamment, que la responsabilité pénale peut être engagée en cas de « violation manifestement délibérée » d’une obligation de sécurité ayant exposé « directement » une personne à un « risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ». Le ministère du Travail indique qu’un employeur ne devrait pas encourir de sanction pénale s’il se conforme aux mesures de prévention recommandées : mettre à la disposition des salariés des moyens de protection (savon, gel hydroalcoolique…), les informer régulièrement et de façon actualisée sur la prévention des risques de contamination (gestes barrières, distanciation), et adapter leur

formation à la situation. La responsabilité pénale s’apprécie au cas par cas en considération de l’appréciation concrète des faits. La faute doit être appréciée compte tenu de la nature des missions ou des fonctions de la personne, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont elle disposait.

DOCUMENT D’ÉVALUATION

DES RISQUES PROFESSIONNELS

Tous les employeurs doivent tenir le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER) sous peine de sanctions pénales (code du travail, article R4121-1). Ce document permet d’évaluer et de recenser les risques dans chaque unité de travail.

Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19, ce document doit être mis à jour régulièrement. L’assurance maladie recommande de s’attacher particulièrement aux circonstances dans lesquelles les salariés pourraient être exposés au virus (contacts rapprochés avec le public, la clientèle, les fournisseurs ou prestataires, circulation dans l’entreprise). Les risques habituels ne doivent pas être négligés dans la mesure où ils peuvent être augmentés par le port des protections individuelles ou la réorganisation des locaux ou du travail.

RISQUE BIOLOGIQUE

Enfin, le virus du Covid-19 est un agent biologique pathogène exposant au risque de contamination, tel que visé par les règlements. En ce domaine, l’employeur a une obligation spécifique de prévention pour les travailleurs dont les fonctions les exposent à ce risque (c. du travail, article R4422-1). Cette situation concerne, non seulement les professionnels de santé et de secours, mais aussi les travailleurs dont les tâches impliquent des contacts rapprochés avec des personnes potentiellement contaminées (soins, aide à domicile, services à la personne…).