Rentrée judiciaire : les moyens en questions

Tribunal judiciaire Reims

Lors de l’audience de rentrée au Tribunal Judiciaire de Reims, les avocats ont une nouvelle fois manifesté et prolongé leur mouvement de grève d’une semaine supplémentaire.

La rentrée judiciaire s’est effectuée dans un climat de grève des avocats.

Véritable fil conducteur des trois audiences de rentrée Matthieu Bourrette, Procureur de la République près le Tribunal Judiciaire de Reims, a gratifié les trois cérémonies de ses discours ciselés, aux dizaines de références aussi surprenantes qu’hétéroclites, de Camus à Flaubert en passant par Hollande et Chirac sans omettre les inattendus Inès Rieg ou Star Wars. Un florilège qui n’occulte toutefois pas le fond du discours, cher au parquetier, à savoir le présent et surtout l’avenir de la Justice. « La juridiction de Reims aura été riche de changements en ce moment charnière 2019-2020 », rappelle- t-il à l’heure où le Tribunal d’Instance et le Tribunal de Grande Instance fusionnent en une seule juridiction : le Tribunal Judiciaire. Outre la modification de certaines fonctions de greffe, l’élargissement de la représentation obligatoire, le principe de l’exécution provisoire de droit des décisions de première instance, la mise en place de la tentative de conciliation obligatoire préalable ou encore la simplification, des modalités de saisine des tribunaux constituent « des évolutions de fond à l’importance bien réelle », souligne le Procureur. « À présent, d’une cour à l’autre, les lieux où certains contentieux seront débattus pourront être, au choix, au tribunal judiciaire ou dans les chambres détachées. Simplicité, accessibilité, efficacité ? Telles sont les promesses de ce texte, nous verrons si elles sont exaucées ».

DÉLAIS D’AUDIENCEMENT RAISONNABLES

Au sujet des moyens attribués à la Justice, Matthieu Bourrette relativise grandement la hausse de 2,5% du budget du ministère de la Justice : « L’essentiel de cette hausse sera absorbé par l’administration pénitentiaire et dans une moindre mesure par l’administration de la Protection Judiciaire de la Jeunesse », note-t-il, soulignant que la ligne spécifiquement dédiée au fonctionnement des tribunaux est en hausse de 0,32% en euro courant en 2020, celle-ci sera en réalité en baisse de près de 1% en raison de la hausse des prix estimée à 1,2% dans le projet de budget 2020 du gouvernement… Pour rappel, le TJ de Reims disposait d’une dotation de fonctionnement de 58 000 euros en 2019.

« Chaque année, il est demandé à la justice judiciaire de faire plus et mieux avec moins », déplore le Procureur. « Si sur le plan pénal et local, nos délais d’audiencement sont encore très raisonnables, cela est uniquement dû à des choix de recours massif à des systèmes procéduraux simplifiés encore en 2019, comme en attestent les statistiques, et à l’investissement bien compris de chacun, magistrats, greffiers fonctionnaires et nos partenaires de justice, qu’il faut remercier, au détriment des principes d’oralité des débats et en minorant l’apport pédagogique de l’audience ».

Avant de conclure : « Je crains malheureusement que 2020 soit une nouvelle année sombre pour les moyens de la justice ». Une année qui verra l’arrivée de nouvelles têtes à la présidence du Tribunal Judiciaire avec notamment l’arrivée d’un(e) président(e) après que le premier vice-président Vincent Dufourd a assuré la présidence par intérim au cours des dernières semaines.

Une année 2020 chargée qui s’annonce pour le Tribunal Judiciaire de Troyes

Sous l’autorité du président Carbonaro, le tribunal judiciaire de Troyes a fait le point sur une année intense en termes d’activité.

La première audience de rentrée du nouveau tribunal judiciaire de Troyes, issu de la fusion des tribunaux d’instance et de grande instance, a été l’occasion d’évoquer le récent départ de l’ancien procureur de la République, Olivier Caracotch. En novembre dernier, il a quitté les fonctions qu’il occupait à Troyes depuis quatre ans pour celles de sous-directeur des affaires criminelles et des grâces à la Chancellerie. Olivier Caracotch sera remplacé par Sophie Macquart-Moulin, qui exerçait les fonctions de procureur de la République à Auxerre. Du point de vue de l’activité, l’année écoulée aura été intense, retrouvant ainsi le niveau de 2017 avec plus de 20 000 procédures pénales traitées et trois sessions de cour d’assises organisées. « Nous enregistrons aussi une baisse des jugements correctionnels qui traduit une orientation vers des jugements alternatifs », indique le président du tribunal judiciaire de Troyes, Raoul Carbonaro. Les affaires familiales ont connu une activité soutenue en 2019, au même titre que les tutelles, l’aide juridictionnelle ou encore la justice des mineurs. En matière d’affaires civiles le taux de couverture a continué de s’améliorer et le stock d’affaires à traiter a continué de décroître au cours de l’année. Le nombre d’affaires de divorce est en diminution, passant de 574 à 323, en attendant le 1er septembre prochain et l’entrée en vigueur de la nouvelle procédure dans ce domaine. Enfin, le tribunal d’instance a apuré l’an passé le stock de dossiers de surendettement à traiter. Par ailleurs, dans le cadre des réformes de la justice, le tribunal troyen est devenu un site pilote pour la régulation carcérale et le service pénitentiaire probatoire.

GRÈVE ET REPORT DES AFFAIRES

Les mois qui viennent risquent donc d’être particulièrement chargés en termes d’activité et il sera très difficile sans doute d’obtenir les mêmes résultats. Le président Carbonaro s’inquiète déjà des conséquences « des mouvements sociaux actuels qui auront un fort impact et ne permettront pas d’absorber l’engorgement des services ». La grève des avocats observée à Troyes comme dans d’autres juridictions occasionne le renvoi de très nombreuses affaires qu’il faudra traiter ultérieurement. L’accès au droit a aussi été renforcé avec une implantation remarquée de la Maison de la justice et du droit à Romilly-sur-Seine et une hausse de la fréquentation des accueils du public sur l’ensemble du département et notamment sur les trois sites troyens.

Laurent Locurcio

Sous l’autorité du président Carbonaro, le tribunal judiciaire de Troyes a fait le point sur une année intense en termes d’activité.

Matthieu Bourrette, Procureur de la République près le Tribunal Judiciaire de Reims, a rappelé le récurrent manque de moyens alloués à la Justice.