Relance de l’activité : la santé et la sécurité en ligne de mire

Les entreprises ont anticipé la reprise progressive de l’activité. Elles doivent rédiger, mettre à jour ou améliorer les documents permettant d’assurer la protection de leurs salariés. Céline Bauer, présidente du groupe de travail Ressources humaines d’Absoluce, leur donne des conseils pratiques.

Certaines branches ont déjà, par le biais de leurs syndicats ou de leurs fédérations, reçu de la documentation pour les aider. Le ministère du Travail a également formalisé de nombreuses « fiches métiers », destinées à orienter les salariés et les employeurs dans la mise en œuvre des mesures de protection et ainsi permettre de maintenir ou de relancer sereinement l’activité économique.

ÉVALUER LES RISQUES ET IDENTIFIER LES DISPOSITIONS À PRENDRE

Les entreprises doivent évaluer les risques, c’est-à-dire identifier les sources possibles de contamination ou d’exposition, puis identifier les dispositions pouvant être prises pour y remédier.

Concrètement, il s’agit là de :

– mettre à jour le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) ;

– préparer un plan de continuité d’activité (PCA) ;

– définir éventuellement un plan de circulation afin d’éviter, au maximum, le contact entre les personnes ;

– définir les mesures liées à l’entrée dans l’entreprise, qu’il s’agisse des salariés ou de tiers ;

– définir les règles d’utilisation des espaces communs : sanitaires, restauration, machine à café, etc. et ce afin que les gestes barrières puissent être respectés.

NÉCESSITÉ DE DOCUMENTER LES CONDITIONS DE REPRISE DE L’ACTIVITÉ

Le Plan de continuité de l’activité (PCA) est un document facultatif qui liste l’ensemble des mesures prises pour assurer le maintien de l’activité essentielle de l’entreprise, tout en préservant la santé et la sécurité des salariés. Il peut, par exemple, détailler des scénarios d’absentéisme, organiser la hiérarchisation des missions ou encore modifier l’exécution du travail.

Comment le mettre en place ? Les dirigeants doivent mobiliser l’ensemble des acteurs de leur entreprise, par le biais notamment du comité social et économique, des managers, des chefs de service, etc. Ceci permet d’avoir une vision globale et collective des problématiques auxquelles l’entreprise peut être confrontée.

L’élaboration du PCA doit se faire en plusieurs étapes :

– procéder à un état des lieux

et évaluer les risques (sanitaires, sociaux, économiques, techniques, etc.),

– déterminer quelles sont les tâches essentielles pour maintenir l’activité,

– formuler des hypothèses : perturbations sur l’organisation, absentéisme, risques qui pourraient être accrus…,

– élaborer en conséquence des scénarios permettant d’anticiper les mesures à mettre en œuvre pour répondre à ces hypothèses,

– faire des simulations de ces scénarios afin de tester leur opérationnalité et/ou de les enrichir,

– nommer des responsables qui auront la charge de faire appliquer les mesures prises.

INTÉRÊTS DU PCA

Le PCA a un double intérêt : d’une part, il permet d’informer les salariés des aménagements et des mesures qui leur sont opposables : il pose le cadre. D’autre part, il permet d’informer les tiers (prestataires, clients, etc.) des mesures de prévention et d’organisation afin qu’ils puissent s’y conformer.

De plus, le Plan de continuité d’activité permet d’être réactif en cas de crise et peut aider à minimiser les pertes de chiffre d’affaires. En effet, un certain nombre de dangers auront déjà été anticipés, mais aussi et surtout : les modalités d’organisation du travail liées à la survenance de l’événement auront été déterminées.

Actuellement, la réglementation évolue quotidiennement de façon frénétique et les informations de cet article n’ont pas vocation à être exhaustives. Les services de santé au travail ou encore les structures spécialisées ou liées au secteur professionnel de chaque entreprise ont la capacité d’assister les chefs d’entreprise pour, le cas échéant, les accompagner et formaliser les documents requis. Les départements en droit social des cabinets d’expertise comptable peuvent utilement orienter les entreprises ou les mettre en relation avec ces organismes.

OBLIGATION DE METTRE À JOUR LE DOCUMENT UNIQUE D’ÉVALUATION DES RISQUES

La crise sanitaire du Covid-19 doit être intégrée dans l’appréciation des risques qui pèsent sur l’entreprise et ses salariés. Une mise à jour du Document unique d’évaluation des risques (DUER) s’impose !

Il s’agit d’un document qui recense l’ensemble des risques pour la santé et la sécurité du personnel dans l’entreprise (article R4121-1 du code du travail). Il faut donc examiner chaque catégorie de poste de travail pour ensuite dresser un bilan des dangers existants sur ce poste et les consigner dans le DUER.

Le DUER doit refléter la situation présente de l’entreprise, il doit donc être mis à jour régulièrement :

– au minimum : chaque année sauf pour les TPE (moins de onze salariés) qui peuvent faire une mise à jour moins fréquente « sous réserve que soit garanti un niveau équivalent de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs » ;

– lors de toute décision importante d’aménagement modifiant les conditions de santé, d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail dans l’entreprise ;

– lorsqu’apparaît un nouveau risque consécutif à des événements tels que l’évolution des connaissances techniques et scientifiques, la survenance d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou encore de nouvelles règles concernant la santé et la sécurité des travailleurs.

Gare aux sanctions !

Le défaut de transcription ou de mise à jour des résultats de l’évaluation des risques peut être puni d’une amende prévue pour les contraventions de 5e classe (article R. 4741-1 du code du travail et article 131- 13 du code pénal). Par ailleurs, la non-présentation à l’Inspecteur du travail du Document unique d’évaluation des risques est punissable d’une amende de 3e classe (article L 2 316-1 du code du travail et articles 131-12 et suivants du code pénal).

Épidémie de Covid-19 : de nouveaux risques

L’épidémie de Covid-19 a créé de nouveaux risques directs comme indirects, notamment du fait du recours au télétravail dans des entreprises où cette organisation n’existait pas. Elle oblige également l’employeur à prendre toute mesure afin d’éviter la contagion à l’occasion du travail ou sur le lieu de travail.

La Direction générale du travail a rappelé cette nécessité dans des « Questions/Réponses Entreprises et Salariés » du 28 février 2020. Il convient donc :

– d’identifier toutes les situations de travail dans lesquelles le risque de contagion existe, sans oublier les risques secondaires (ex : télétravail) ;

– d’évaluer l’importance du risque et le nombre de salariés concernés par chacune des situations ;

– de prendre les mesures de protection nécessaires : qu’il s’agisse aussi bien de protections techniques individuelles ou collectives (masques, gel hydroalcoolique, etc.) que de mesures organisationnelles (réorganiser les espaces de travail ou les espaces communs, réorganiser les équipes, définir la conduite à tenir en cas de contamination d’un salarié, etc.).

Le contenu est à adapter en fonction du secteur d’activité de chaque entreprise, de son organisation, de ses conditions de travail. Comme évoqué précédemment, des fiches métiers sont disponibles sur le site https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/proteger-les-travailleurs/article/fiches-conseils-metiers-et-guides-pour-les-salaries-et-les-employeurs

Lors de l’élaboration de cette mise à jour, il est préférable d’associer les membres du CSE (si l’entreprise en a un) ou encore le médecin du travail. Enfin, il convient de le porter à la connaissance des salariés par voie d’affichage.

L’évaluation des risques professionnels par l’employeur n’est pas une obligation nouvelle mais il ressort qu’à différentes occasions, l’existence du Document unique d’évaluation des risques peut éviter bon nombre de tracas ! Anticiper la relance ou sécuriser la continuité de l’activité est, certes, un exercice complexe mais constitue, en cette période inédite, une nécessité.