Recrutement : des comportements qui génèrent la perplexité

Claude Seguin dirige la Sonofep, entreprise familiale, depuis 2003. Que ce soit pour assurer le quotidien ou pour faire reposer ses développement futurs sur des bases solides, les difficultés de recrutement auxquelles il se heurte sont, à ses yeux, difficilement compréhensibles. (Droits réservés)

La difficulté à recruter ou à conserver son personnel, Claude Seguin y est confronté au quotidien, comme n’importe quel chef d’entreprise. Mais le patron de la Sonofep considère tout de même qu’il y a une évolution des comportements problématique, et récente, face à laquelle il se sent parfois désarmé.

«Je vais réfléchir…» Cette petite phrase, elle résonne d’une manière bien particulière aux oreilles de Claude Seguin, dirigeant de la Sonofep, entreprise spécialisée dans l’entretien d’espaces verts, la commercialisation de végétaux et de produits annexes, à destination des particuliers et des professionnels. En ce début de printemps, dans la cour de l’entreprise à Saulon-la-Rue, au sud de Dijon, les camionnettes des artisans- paysagers font la queue afin de venir se fournir en matériels ou plants nécessaires à leurs activités. Printemps et automne sont, pour l’entreprise, les deux périodes « coup de feu », pour reprendre une métaphore propre à la restauration. Le niveau d’activité est alors très fort et réclame, pour y faire face, les ressources humaines adéquates. Or, ce fameux « Je vais réfléchir… », Claude Seguin ne le comprend tout simplement plus. Car il émane de personnes reçues en entretien préalable à une embauche.

Les besoins en recrutement sont élevés et pourtant, le patron de la Sonofep ne parvient pas à les combler. « J’emploie à l’heure actuelle, précise-t-il, 30 salariés et 6 saisonniers. Très récemment j’ai réalisé 5 nouvelles embauches, dont une en CDI et j’en cherche encore 3. Mais c’est un véritable parcours du combattant. Jusqu’à une date récente je parvenais à trouver des gens formés mais c’est de moins en moins le cas… Le problème, c’est que lorsque je recrute un chargé de communication, je reçois 60 candidatures en 2 jours, mais lorsque mes offres concernent des postes de vendeur, de cariste, d’hôtesse de caisse ou d’employé polyvalent, je ne reçois pratiquement aucun CV ».

ÉVOLUTION DU RAPPORT AU TRAVAIL ?

Ce dirigeant d’entreprise considère en fait que la situation est devenue très compliquée, sur ce front, depuis 2 ou 3 ans. Mais ce n’est pas tout : il constate également que des personnes travaillant pour lui dans le cadre de CDI n’hésitent pas à partir… pour des CDD. Doit-on voir là l’une des traductions de l’évolution profonde du rapport au travail entretenu par les nouvelles générations ? « J’en arrive aujourd’hui, poursuit Claude Seguin, à m’intéresser plus au savoir-être des candidats qu’au savoir-faire, parce que ce dernier est de plus en plus rare et que je trouve de moins en moins de gens formés. Le patron de la Sonofep sait, par ailleurs, pouvoir s’appuyer sur un certain nombre de personnes qui « font tourner la boutique ». Le problème touche plus à la nécessité de préserver cet esprit dans le temps, de le faire perdurer, de le transmettre aux nouveaux arrivants afin d’en faire un pilier des développements à venir de l’entreprise. « En tant que dirigeant, mon rôle est de motiver les gens qui m’entourent, de les faire adhérer à un projet d’entreprise et j’ai besoin de tout le monde mais gérer l’humain reste compliqué. J’ai parfois le sentiment, lorsque je recrute, d’avoir en face de moi des gens qui n’ont pas envie de faire d’effort. J’estime pourtant que, dans mon entreprise, quelqu’un de motivé et sérieux peut progresser. Je fais aussi partie de ceux qui ont versé la prime Macron… »

SENTIMENT DE DÉCALAGE

Alors, qu’est-ce qui cloche ? Claude Seguin l’affirme : même s’il recrute régulièrement pour des périodes courtes correspondant à des pics d’activité ponctuels mais récurrents dans l’année, ces emplois peuvent contribuer, d’une part, à repérer de bons éléments, capables d’intégrer durablement l’entreprise, voire d’y progresser, mais aussi de permettre à des personnes de conserver un lien avec le monde du travail. Lorsqu’il rencontre un candidat potentiel, le patron de la Sonofep exprime évidemment ses attentes, mais met aussi en avant le potentiel de progression qui peut s’offrir aux personnes ayant cette envie de travailler, d’avoir le sens du client, même si celui-ci n’est pas toujours roi. Le « Je vais réfléchir…» qu’on lui renvoie trop souvent lui donne le sentiment d’un décalage croissant entre deux mondes. Un décalage qui le rend perplexe et qui le conduit même à s’interroger sur les possibilités de développer son entreprises à l’avenir. Des idées, il en a, mais il lui faudra des gens pour les faire tourner.

Pour contacter Claude Seguin :
c.seguin@sonofep.fr ou 0380366103