Quand les navires marchands font du kitesurf

La start-up Airseas donne des ailes aux cargos. (Droits réservés)

La start-up Airseas, qui a développé une voile automatisée pour tracter les navires marchands, fait un grand bond en avant grâce à son partenariat avec « K » Line.

Le secteur maritime et l’industrie aéronautique ne sont pas réputés pour avoir une empreinte carbone exemplaire. Pourtant, la spin off d’Airbus, Airseas, implantée à Toulouse, planche depuis 2016 sur le développement d’une méga aile, baptisée Seawing. Son objectif : tracter les cargos et ainsi réduire les émissions de CO2 de 20% grâce à la propulsion éolienne.

Séduit par cette solution innovante combinant le savoir-faire aéronautique en matière de lois de modélisation et de contrôle et la technologie maritime, l’armateur japonais Kawasaki Kisen Kaisha, qui exploite 520 navires sur tout le globe, a signé un accord de 20 ans avec la jeune pousse. « Avant la signature du contrat lors du Bourget, nous avons été en discussion avec “K” Line pendant deux ans, période durant laquelle, le géant japonais a pu analyser notre technologie et notre organisation. À l’issue du test sur un premier dispositif en 2021, notre partenariat devrait aboutir à l’achat de 50 produits. Deux formats de 500 m2 et 1 000 m2 seront disponibles et donc adaptés aux différentes tailles des navires », explique Vincent Bernatets, PDG d’Airseas.

Selon la start-up, Seawing permettrait aux navires de réduire de 1 à 2 M€ leurs coûts opérationnels, le carburant, qui en représente la moitié, pesant lourd sur la balance.

La marine marchande constituant un secteur profitable et en forte demande, la start-up n’envisage pas, dans les mois à venir, d’étendre son offre et de conquérir d’autres marchés.

13 M€ auront été nécessaires au développement de ce procédé conçu par des anciens d’Airbus qui se sont lancés à l’assaut d’une solution écologique. Concrètement, ce cerf- volant automatisé, basé sur la technologie du parafoil, analyse une pléthore de données météorologiques et océaniques en temps réel afin d’optimiser la performance des navires : « L’aile est utilisée lorsque les conditions de vent sont favorables et à l’initiative du commandant du navire. En revanche, toute son opération est automatique : décollage, vol, atterrissage et stockage. Une méthode d’optimisation de route permet de maximiser les performances de l’aile de traction et de proposer le chemin le plus économique, en profitant au mieux des opportunités météorologiques. Elle permet de réduire significativement la demande en puissance de propulsion mécanique du navire et ainsi sa consommation tout autant que ses rejets polluants », précise-t-il.

Cette voile qui se déploie en dix minutes maximum et peut être neutralisée rapidement en cas de besoin, a une durée de vie de deux ans. « Nous menons des études pour la rallonger », souligne le directeur qui chapeaute aujourd’hui une trentaine de collaborateurs en appliquant la méthode agile. En parallèle du projet Seawing, ces derniers étudient aussi la possibilité d’utiliser la technologie du kite pour générer de l’électricité grâce au vent. L’équipe quittera d’ici un an la Ville rose pour mettre le cap à l’ouest, direction Nantes. Air-seas, qui a déjà testé son prototype sur des navires d’Airbus, livrera son Seawing de 500 m2 d’ici la fin 2020, au grand navire roulier d’Airbus, « Ville de Bordeaux », long de 150 mètres et opérant entre Saint-Nazaire et la ville américaine de Mobile, dans l’Alabama, située sur les rives du golfe du Mexique. En effet, la société Airbus envisage d’installer le Seawing sur sa propre flotte de navires de transport.

Soutenue par l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), la start-up qui a déjà levé 1,2 M€, espère entamer un deuxième tour de table en 2020 et réaliser des centaines de livraisons par an d’ici une décennie.