Pour l’amour des mots

Avant de sortir un 5e album en 2022, Barcella livre son premier roman, Papillons.

Le chanteur rémois élargit encore son terrain de jeu en sortant son premier roman, intitulé Papillons, le 8 avril.

Auteur-compositeur, chanteur, organisateur de festival… l’artiste rémois Barcella cumule les talents. À l’aube de ses quarante ans (il les fêtera le 11 mai prochain), il ajoute une corde de plus à sa guitare en sortant son premier roman. Passionné d’écriture depuis l’enfance, Mathieu Ladevèze traduit son amour des mots et de la langue française en écrivant des poèmes et des chansons. Fils d’une professeur de lettres, il se dirige à son tour vers une carrière dans l’enseignement. Après un bac scientifique, il s’engage en STAPS et obtient une licence Education et motricité, dans l’objectif d’enseigner l’éducation physique et sportive. Un avenir presque tout tracé.

Mais à l’heure d’intégrer l’Education Nationale il échoue aux épreuves finales du concours. Un échec presque salvateur puisqu’il lui permet de se consacrer à la chanson en parallèle. Mathieu devient alors Barcella. Un premier album autoproduit en 2010 vendu à 10 000 exemplaires et une quarantaine de concerts lui valent alors d’être remarqué par Sony et de signer dans la foulée sur cette maison de disques en 2011. Son deuxième album, Charabia, remporte plusieurs prix et s’impose dès sa sortie en 2012 auprès des critiques spécialisés et des programmateurs des radios nationales comme France Inter, Europe 1 ou RTL.

UN FESTIVAL À SON IMAGE

« La langue est un vecteur de lien essentiel, d’autant plus quand la culture anglo-saxonne vient phagociter toute une partie de notre identité culturelle », souligne l’auteur de Ma Douce.

Traduite dans ses chansons, la grande tendresse de Barcella pour la langue française s’est encore développée avec la création du festival Charabia en 2017. Après un galop d’essai immédiatement concluant à l’été 2016, le Rémois s’est lancé dans l’organisation d’un festival consacré à la chanson française et à l’amour des mots. Un rendez-vous automnal qui monte en puissance avec une programmation toujours plus étoffée et enrichie de talents et de découvertes à chaque saison. Epaulé par les collectivités, des entreprises partenaires (une quarantaine) et les scènes locales, Charabia attire dès sa première édition grâce à Barcella de nombreux artistes d’envergure nationale et internationale, avec, comme dénominateur commun, outre une affection particulière pour son organisateur, l’amour de la langue française et de la poésie. Un festival naissant qui attire Vanessa Paradis, Olivia Ruiz, Gaëtan Roussel, BigFlo et Oli, Gaël Faye, Feu ! Chatterton, Katerine, Oxmo Puccino ou Grand Corps Malade parmi les têtes d’affiches de ses trois premières éditions, de quoi lui prédire un bel avenir dans la lignée des grandes aventures festivalières nationales.

« Avant de me lancer dans l’aventure du festival j’ai « digéré » près de 800 concerts en France, Belgique, Suisse ou au Canada, au cours desquels j’ai croisé de nombreux artistes devenus des amis. Reims est une ville effervescente et culturelle qui attendait un festival comme celui-là », explique l’organisateur, qui ne compte pas s’en arrêter là. « Je suis ambitieux », admet-il. « Et je vois l’ambition comme un mot très positif. Je rêve que Charabia embrasse les destinées de festivals tels que les Francofolies de La Rochelle ou du Printemps de Bourges ».

Après avoir accueilli près de 8 000 spectateurs en 2019, l’édition 2020, prévue sur 9 jours prévoyait de doubler sa fréquentation. La crise sanitaire en a voulu autrement mais Barcella, ne conçoit pas une année 2021 sans Charabia.

En attendant de savoir dans quelles conditions l’organiser; il a déjà tout prévu : jauges réduites, places assises, formats scéniques revus et corrigés… Boulimique de travail, il a déjà grandement mis la patte à son cinquième album, successeur de Soleil, paru en 2018. Mais Barcella l’annonce d’emblée : « L’album ne sortira pas cette année ». Pour l’artiste rémois, l’année 2021 s’annonce davantage placée sous le signe des mots gravés sur papier que sur sillon. Et pour cause, dès le 8 avril, sort aux Editions du Cherche Midi son tout premier roman : Papillons, qui raconte l’histoire d’Alexandrin, un jeune homme qui s’aperçoit qu’il a perdu ses capacités d’émerveillement et qui va se lancer dans une quête pour retrouver cette effervescence et l’enfant qui sommeille en lui. Ecrit à l’occasion de cette année 2020 pas comme les autres, entre confinements et sevrage de scène pour les artistes, Papillons est le fruit d’une année de travail. « J’avais amorcé l’écriture avant la crise sanitaire et je savais déjà que j’y aborderai les grandes lames de fond de notre existence telles que l’amour, l’espoir, le désespoir, la solitude… », précise le néo-écrivain.

Rompu à l’exercice de l’écriture de chansons mais aussi de conte pour enfant (Tournepouce) , Barcella a découvert une nouvelle manière de raconter des histoires. « Il y a dans l’écriture des chansons un aspect très ludique et aussi très mathématique dans la rythmique. J’avais envie d’avoir un espace de jeu plus vaste pour tricoter et détricoter les sentiments humains qui m’habitent. Grâce au format du roman, le jardin est plus grand », note Barcella, qui marque néanmoins son livre de son empreinte avec des chapitres assez courts et nombreux, au nombre (heureux hasard) de 51. « Je ne sais pas m’ennuyer, c’est pourquoi je préfère des chapitres rythmés pour garder le sucre ». Même en livre, l’auteur impose sa plume de poète, entre réalisme et onirisme pour signer un roman à la lisière du conte. Un roman très… « Barcellien », en somme.

SIX MOIS D’ÉCRITURE

Proche de la nature, l’artiste est habitué à aller se ressourcer dès qu’il le peut en Ardèche, c’est là, entre rivière et montagne que le chanteur s’est mué en écrivain, à la faveur d’un confinement qui lui aura donné l’envie de se plonger à corps perdu dans l’écriture pour combler le temps.

« Il fallait remplir ces longues journées et j’ai écrit pour me concentrer sur quelque chose qui me nourrissait », se souvient-il. Après avoir amorcé une première ébauche de son roman, Barcella propose à quelques amis dont Mathias Malzieu et Cali, d’en lire les premiers chapitres. Une idée couronnée de succès puisqu’elle lui permettra d’être mis en relation avec son éditeur et de signer un premier contrat dans la foulée. S’en suivront près de six mois d’écriture puis quelques semaines de relectures et de corrections, avant de mettre la touche finale à l’ouvrage. À quelques jours de la sortie officielle, l’écrivain ne masque pas son excitation, d’autant que le roman reçoit déjà des critiques élogieuses.

Sélectionné parmi les 14 ouvrages finalistes du Prix des Maisons de la Presse – parmi plus de 500 livres – Papillons s’annonce comme une des découvertes du printemps en librairie. « Je suis très heureux, de nombreux feux sont au vert », avance-t-il. Signe annonciateur d’un succès naissant, le livre est déjà prévu en format poche dès 2020 alors même qu’il n’est pas encore sorti en librairie, lui garantissant déjà une seconde vie.

Et si la possibilité de voir Papillons un jour décliné en format audiovisuel n’est pas à exclure, Barcella s’imagine-t-il composant la musique d’un tel projet ? « J’ai déjà des mélodies en tête », avoue le chanteur-écrivain, prêt à bondir pour se lancer d’un énième projet, en forme de nouveau défi artistique. On s’en serait étonné…