Plein emploi chez les cadres dans le Grand Est

APEC moral établissements

Chaque année, l’APEC (Association pour l’emploi des cadres) publie ses prévisions. Si depuis 2016, les recrutements de cadres sont chaque année, en augmentation régulière, les prévisions 2020 tablent pour la première fois depuis quatre ans sur une stagnation, avec un peu plus de 12 200 recrutements prévus.

En 2013, le chômage avait atteint un pic avec au deuxième trimestre, un taux de 10,5 %. Aujourd’hui, le taux de chômage toutes catégories confondue s’élève au 4e trimestre 2019, à 8,1 % soit le taux le plus bas depuis 10 ans. Pour les cadres, il est radicalement plus bas : 3,8 % de chômage en 2019. Et ce taux, que certains économistes qualifient de « plein emploi », s’en ressent dans le recrutement des cadres en France, mais aussi plus spécifiquement dans le Grand Est.

UN STAGNATION DES EMBAUCHES EN 2020

Ainsi, depuis 2016, le taux de recrutement des cadres dans la région évolue positivement chaque année, passant de 8 810 recrutements en 2016 à 12 310 en 2019, soit une augmentation de 39,7 %. Le taux d’augmentation entre 2018 et 2019 s’élève quant à lui à +9%. Le nombre de cadres dans la région en 2019 est de 243 760 soit 7% du poids des cadres français (3,6 millions). Pour 2020 en revanche, pas d’augmentation de prévue, avec 12 200 recrutements en projection, soit une stabilité par rapport à 2019.

La dynamique de la région est portée par son Est, la Lorraine et l’Alsace, qui en 2020 prévoient d’embaucher respectivement 4 000 et 5 560 cadres soit 33% et 46% de l’ensemble régional. Les entreprises de Champagne-Ardenne tablent quant à elles sur 2 620 recrutements soit 21% de l’ensemble du Grand Est. Ces disparités s’expliquent par le dynamisme et le tissu économique local. Ainsi, les secteurs les plus porteurs, par ordre d’importance, sont les services, avec 52% de recrutements prévus dans cette branche, devant l’industrie (28%), le commerce (10%) et la construction (10%).

« La situation de la Champagne-Ardenne bénéficie des avantages et des inconvénients de la proximité avec Paris. Nationalement, le secteur des services est très porteurs avec un taux de recrutement prévu en 2020 de 74%, or beaucoup d’entreprises se situent en région parisienne », explique Bruno Lestingi, consultant relations entreprises pour la Champagne-Ardenne. « Les cadres sont aussi très mobiles, plus qu’avant, car ils privilégient le bien-être dans une entreprise qui va répondre à leurs critères. » Quant aux métiers du commerce, de la recherche et développement mais aussi de la production industrielle, ils sont en tension depuis quelques temps. « 20% des offres reçoivent moins de 10 CV, ce qui est peu et en baisse depuis plusieurs années. »

L’INDUSTRIE, SECTEUR PORTEUR EN CHAMPAGNE ARDENNE

Par ailleurs, contrairement à la tendance nationale, les cadres régionaux sont surreprésentés dans l’industrie et les petites structures, ce qui là, aussi, s’explique par le tissu économique local. Ainsi, 26% des effectifs cadres se retrouvent dans l’industrie dans la région Grand Est alors qu’ils ne sont que 18% au niveau national. Ces derniers sont employés à 20% dans des établissements de 250 salariés et plus, à 29% dans des établissements de 50 à 250 salariés, 30 % dans ceux allant de 10 à 49 salariés et 21% dans des petites structures de moins de 9 salariés.

Une des données particulières de la région est aussi l’âge des cadres, plus élevé que dans le reste du pays. « Deux éléments permettent de comprendre cette tendance », indique Bruno Lestingi. « Le premier est le fait que les cadres de moins de 30 ans bougent vers Paris, toujours dans la recherche d’une entreprise à leur image, qui leur offrirait des possibilités et des avantages qu’ils ne trouveraient pas ailleurs. Le second est que les cadres seniors sont privilégiés dans l’industrie car ce secteur nécessite des compétences très spécifiques qui s’acquièrent au fil du temps, avec de l’expérience dans un domaine bien précis. » Ainsi, 34% des cadres régionaux ont 50 ans ou plus contre 30% dans le reste de la France. Toutefois, dans l’embauche de nouveaux salariés, les entreprises recherchent à 44% des cadres de moins de 5 ans d’expérience et 40% de 6 à 15 ans d’expérience. « En 2019, 66 000 cadres étaient recherchés au niveau national, ce sont 74 000 qui ont été embauchés. Il y a donc toujours des besoins, au-delà des prévisions. »

18% DES ENTREPRISES MARNAISES PRÉVOIENT D’AUGMENTER LEURS EFFECTIFS CADRES

Cette confiance dans les recrutements et dans la fidélisation des employés, avec un taux de promotion interne relativement élevé (+27%) entre 2018 et 2019, dénote aussi une confiance des entreprises. L’APEC a mesuré le « moral des établissements » et il en ressort que 18% de ceux de la Marne prévoient, pour l’année 2020 d’augmenter leurs effectifs cadres quand ils ne sont que 12% dans le Grand Est et en France métropolitaine (voir photo).

Au-delà de tous ces chiffres, au niveau de la conjoncture globale, il ressort de l’étude de l’APEC une véritable attente de la part des salariés vis-à-vis des entreprises. La diffusion de nouveaux modes de management, de nouvelles orientations sociétales et environnementales font que le futur cadre se donne la liberté de choisir l’entreprise dans laquelle il souhaite évoluer. « Pour palier aux difficultés de recrutement dans certain secteurs, nous poussons les entreprises à mettre en avant leur identité et leur différenciation », livre Bruno Lestingi. En outre, les prochaines années vont voir se créer de nouveaux besoins avec de nouvelles compétences, notamment dans les domaines du numérique ; l’humeur est donc à l’optimisme.