Pinet Montrivel : retour aux sources (du Haut-Doubs)

On la disait enterrée depuis les années 1970, notamment en raison de la banalisation du quartz. Aujourd’hui, l’horlogerie française semble renaître de ses cendres, portée par de jeunes talents comme Marc Gauthier. Il vient de créer à Maîche, dans le Doubs, une toute nouvelle marque de montres 100% mécaniques et automatiques, baptisée Pinet Montrivel.

Né et façonné dans le Haut-Doubs, comme il aime à le dire, par une enfance oscillant sans cesse entre comté, saucisse de Morteau, pelle à “cheni” (prononcer Ch’ni) et “remises de pendules à l’heure”… Marc Gauthier, brossé et poli par la rugosité du terroir comtois, a puisé dans l’authenticité des paysages jurassiens et le passé horloger du pays pour aller de l’avant et imaginer une nouvelle marque de montres qui fait le pont entre hier et aujourd’hui.

CETTE MONTRE DONNE L’HEURE… ET C’EST TOUT !

Marc fait partie de ces jeunes talents qui a coup d’audace et d’envie sincère font petit à petit renaître de ses cendres l’horlogerie française. Baptisée Pinet Montrivel, du nom d’une petite montagne à côté de la ferme de ses grands parents, cette nouvelle marque affiche haut ses racines locales avec l’élégance, l’humour et la simplicité du montagnard. À contre-courant des tendances actuelles de la montre connectée, notre jurassien à la trentaine naissante propose, au travers de ces gardiennes du temps, automatiques, dépourvues de piles et de tout autres composants électroniques, une déconnexion qui invite paradoxalement à la reconnexion, à une certaine idée de l’essentiel : l’authenticité, la simplicité, la nature, la liberté des grands espaces, la légèreté et la modernité. « Baroudeuses, sobres, élégantes avec une touche de pep’s, elles se veulent l’antidote à une société dominée par la vitesse et par le stress », affirme Marc Gauthier, tout en confiant avoir toujours été émerveillé par la magie du tic-tac qui naît de pièces minuscules savamment assemblées par des horlogers, tous autant artistes qu’artisans. Après des études au lycée horloger de Morteau, Marc Gauthier travaille dix ans en Suisse, d’abord comme dessinateur technique puis chef de projet au sein de la prestigieuse marque TAG Heuer. Au fil du temps, ce passionné de l’horlogerie et du monde de l’entreprise – qui lisait déjà Capital au lycée, fasciné par les success story des plus grandes marques françaises ainsi narrées sur papier glacé – commence à nourrir une idée un peu folle : créer sa marque de montre Française. « Herbelin, Pequignet… Mon enfance a été bercée par l’actualité de ces grands noms, par l’évolution de l’horlogerie française, de ses heures de gloire au déclin, où seules aujourd’hui subsistent quelles grandes marques, dont mes dix doigts suffisent amplement à calculer le nombre. J’ai suivi le boom helvète puis son récent essoufflement, la question des travailleurs frontaliers, la sous-traitance locale qui répond aux commandes suisses et l’arrivée de nouvelles marques franc-comtoises… Il y a cinq, six ans, je  me suis interrogé sur tout cela avec en germe ce désir de libérer ma créativité dans un projet personnel. Fort de mes dix ans d’expérience dans le métier, je commençais à appréhender de mieux en mieux l’écosystème horloger. Il était temps pour moi d’arrêter de remettre au lendemain puis, au surlendemain pour, enfin, me dire que j’aurais eu meilleur temps de le faire hier. Bref, il me fallait réviser mon horloge interne dont le balancier, tantôt s’emballait, tantôt s’arrêtait pour enfin déverrouiller cette butée psychologique qui m’empêchait de me lancer ».

MARQUE INDÉPENDANTE ET ENGAGÉE

En 2018, il met tout ce qu’il a en tête sur papier et fait le grand saut. Pour le design, il peaufine ses idées sur la marque et le produit, à l’aune du talent de Cyrille Bernard, qui comme son père avant lui, est designer pour les plus grands noms de l’horlogerie française et suisse : Pequignet, Ambre,Yonger et Bresson. Les montres sont ensuite assemblées à Morteau, chez Michel Épenoy, un partenaire historique de la ville actif depuis 50 ans dans l’assemblage et le SAV de nombreuses marques prestigieuses. « Aujourd’hui, je suis heureux de pouvoir présenter ma première collection au public. C’est une fierté et un aboutissement pour moi. La création de la marque Pinet Montrivel est la réalisation de mon rêve d’enfant mais aussi le point de départ d’une ambition : participer à la renaissance de l’horlogerie Française. » Baptisée Levento, cette première collection de montres 100 % mécaniques et automatiques ne cherche pas s’esbroufe. De style néo-contemporain, Pinet Montrivel offre un design intemporel, un rien vintage, qui rend hommage aux belles mécaniques d’antan. Le tout réveillé d’une touche de vert fluo photo luminescent. Un effet pep’s également symbole de la nature et des sapins jurassiens, que l’on retrouve sur les aiguilles et les index bâton des heures. Ces derniers rappelant les tavaillons : ces petits rectangles de bois qui couvrent les façades exposées au vent des fermes traditionnelles comtoises. Côté caractéristiques techniques, les montres intègrent un bracelet en caoutchoux rubber de haute qualité. Outre son aspect racé et dynamique, le matériau procure un confort inégalé. Le boîtier est en acier inoxydable brossé et poli. Il est coiffé d’un verre saphir inrayable, traité anti-reflets. Le tout est équipé d’un fond transparent dévoilant les rouages du mouvement automatique. Ce dernier est un calibre Miyota japonais. Sur la provenance étrangère de certaines des ses pièces, Marc Gauthier, qui s’est lancé dans cette aventure sur ses seules économies, joue la carte de la transparence : « Nous n’utilisons pas le label Made In France, alors que nous le pourrions, car nos montres sont imaginées, conçues, assemblées et réglées en France. Nombre de composants viennent de divers partenaires du monde entier ( Japon, Chine, Suisse). Ils ont été sélectionnés pour leurs qualités qui répondent aux standards horlogers français et suisses. Cette collaboration me permet également de pouvoir offrir une belle mécanique à prix accessible (moins de 500 euros), ce qui était pour moi une priorité. Si dans le futur, la renaissance de l’horlogerie française se confirme et qu’elle se traduit par la construction d’un nouveau réseau de sous-traitance locale (aujourd’hui, certains composants ne sont tout simplement plus fabriqués en France) nous pourrons davantage inclure du Made in France. » Engagée, la marque l’est également du point de vue environnemental. « Tout d’abord, par le choix de matériaux robustes et fiables, nos montres sont conçues pour durer. Elles ne contiennent pas de piles ni de composants électroniques et 80 % de leur poids est recyclable. J’ai mis en place une démarche éco-responsable de gestion des déchets horlogers à travers un partenariat avec EcoTempo, qui – par ailleurs – via la plateforme Agir Durable offre un tremplin vers l’emploi à des personnes en grande difficulté sociale ou professionnelle ».

ULULE POUR PRENDRE SON ENVOL

Afin de lancer sa production et de garantir des prix accessibles, Marc Gauthier a lancé une campagne de pré-commandes sur Ulule pour créer sa première collection (une plateforme française en accord avec les valeurs défendues par la jeune marque). L’objectif affiché de 100 montres minimum est largement dépassé avec 202 pré-commandes enregistrées le 13 juillet, date de fin du crowdfunding et ce malgré la crise sanitaire. Cette édition spéciale numérotée devrait être livrée en décembre. La suite : « Je vise le marché français en priorité. Aujourd’hui, je propose quatre modèles, j’envisage naturellement de développer la gamme, mais je ne veux pas faire les choses trop vite. Pour gérer au mieux l’avenir, je vais m’entourer d’entrepreneurs capables de m’aiguiller sur ma stratégie marketing et sur la distribution ( vente en ligne via des market place, distribution en magasin, chez des bijoutiers locaux…). J’aimerais pouvoir également financer un stock pour ne pas devoir repasser par le crowfunding à chaque nouvelle collection ».

pinet-montrivel.com