Phytocontrol dans la course contre la pandémie

Spécialisé dans la sécurité sanitaire des eaux et des aliments, le laboratoire, basé à Nîmes, s’est imposé comme l’un des leaders sur son marché. Après 13 ans d’existence, il nourrit désormais une ambition internationale.

Même s’il ne parvient pas à réaliser les objectifs qu’il s’était fixés avant le Covid-19, Phytocontrol Group anticipe une nouvelle hausse de son chiffre d’affaires en 2020. Fort de 350 collaborateurs, techniciens et ingénieurs, le laboratoire spécialisé dans la sécurité sanitaire des eaux et aliments est abonné à la croissance – il a réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 25 M€, en progression d’un « petit » 21 %, après des taux de progression qui flirtent certaines années avec les 30 %. Basé à Nîmes, dans des locaux dont la surface atteint aujourd’hui 4 000 m2 après l’inauguration il y a deux ans d’une extension de 1 000 m2, le laboratoire fondé il y a 13 ans par Mikaël Bresson et Éric Capodanno, respectivement président et directeur scientifique du groupe, est aujourd’hui l’un des leaders sur son marché : la détection de contaminants dans les aliments et les eaux (propres, usées ou de mer). Des contaminants dont la liste ne fait que croître, depuis les pesticides aux résidus de médicaments en passant par les métaux lourds, les mycotoxines, les dioxines, le PCB, les allergènes, les OGM… pour n’en citer que quelques-uns. Pour chacun, la cellule R & D du laboratoire nîmois, forte d’une trentaine de collaborateurs, développe sans cesse de nouvelles méthodes d’analyse, soit une centaine par an.

Un savoir-faire qui l’a conduit à élaborer en trois semaines, en pleine pandémie de Covid-19, une méthode d’analyse surfacique à l’aide d’un écouvillon pour détecter la présence de coronavirus sur toutes les surfaces. Laquelle, confirme Jessy Favari, secrétaire général de Phytocontrol Group, « a remporté un grand intérêt » auprès des collectivités, industriels de l’agroalimentaire, commerces, coopératives, professionnels libéraux, sociétés de nettoyage, hôtels, campings… auxquels l’innovation est proposée. En complément, Phytocontrol Group a développé plus récemment une méthode d’analyse, basée sur la technologie dite PCR digitale, qui permet, sous 48 heures, de détecter les traces de coronavirus dans les eaux usées cette fois, un processus mis au point avec les grands acteurs du secteur. « On peut observer des signes de reprise potentielle de l’épidémie en examinant le taux de présence du virus dans les eaux usées, détaille le secrétaire général. À l’image d’un réseau de sentinelles constitué dans les centres de traitement, l’idée est de cartographier le plus finement possible cette présence qui constitue un signal fort d’une reprise du virus sur le sol français. »

Si elle peut, à la marge, constituer pour le laboratoire une source d’opportunités, la pandémie n’en a pas moins « rebattu les cartes », pointe toutefois Jessy Favari : « la consommation s’est effondrée et notre marché avec elle ». Depuis, malgré la reprise molle que l’on observe, le groupe a remis à jour certains objectifs de son plan stratégique à cinq ans, qui doit lui permettre d’ici 2025 de devenir le leader européen sur son marché.

L’un des jalons de ce plan est l’ouverture, après celui de Rennes il y a un an et demi, d’un second laboratoire de proximité, dont l’implantation reste confidentielle. Programmée en mai, elle aura finalement lieu d’ici la fin de l’année ou le début de la prochaine. Malgré ce report, le groupe devrait poursuivre cette stratégie car, résume Jessy Favari, « nous serons plus réactifs et plus compétitifs aussi si nous sommes plus près de nos clients. »

FUTUR LEADER EUROPÉEN

C’est cette même logique qui a conduit Phytocontrol Group a racheter il y a un an un laboratoire près de Barcelone. « Historiquement, l’Espagne est le premier pays que nous avons ouvert. C’est pour cela que nous avons fait cette acquisition, afin d’y asseoir un peu plus notre positionnement. Nous avons aussi des implantations commerciales à Madrid et Alicante. » Au-delà de la péninsule ibérique, le groupe nîmois dispose également d’agences en Italie, au Maroc, au Royaume-Uni, et en Belgique auxquelles s’ajoute « une présence plus embryonnaire » en Irlande. « Nous allons aussi ouvrir une structure commerciale en Pologne dans les prochaines semaines », ajoute Jessy Favari.

Cette stratégie de développement à l’international se double d’une volonté forte de se doter de moyens techniques plus performants. Le groupe qui couvre un vaste terrain d’analyses, « du champ à l’assiette », recourt aujourd’hui à un réseau de laboratoires partenaires pour la détection de certains contaminants. « Vis-à-vis de nos clients, détaille Jessy Favari, nous voulons être un acteur global de la sécurité sanitaire et nous couvrons aujourd’hui plus de 80 % du spectre d’analyse. Le reste demande des moyens matériels très spécialisés. Nous préférons pour l’instant nous appuyer sur des laboratoires extérieurs qui ont cette expertise et ces équipements. Cependant notre stratégie à cinq ans est d’être en capacité de maîtriser la totalité du spectre au niveau européen. » Une ambition qui suppose « une politique d’investissements très forte. Sachant que certaines machines coûtent jusqu’à 350 K€, cela nécessite un prévisionnel précis et ambitieux ! Mais la qualité de nos équipements fait aussi partie, en même temps que la qualité de nos ingénieurs, de notre expertise et de notre valeur ajoutée. Nous préparons d’ailleurs avant la fin de l’année l’arrivée d’innovations de rupture qui permettront d’aller beaucoup plus loin que ce qui se fait déjà aujourd’hui », confirme-t-il.

Si l’agroalimentaire et l’eau de consommation restent son cœur de métier, le secrétaire général voit émerger, en périphérie, d’autres sujets. « Notamment l’authenticité, c’est-à-dire la fraude alimentaire. Il s’agit par exemple de garantir à un client que le thé qu’il consomme vient précisément de telle région du monde. Cette de- mande est de plus en plus forte ». Un constat fait lors de la première édition du colloque international Food Risk, organisé par le groupe Phytocontrol, à Nîmes, fin janvier sur le thème du risque alimentaire et de l’authenticité. Une nouvelle édition est en préparation pour juin prochain, toujours à Nîmes. D’autres thématiques comme l’analyse compositionnelle (vitamines, nutriments) ou le packaging, « avec les contaminations croisées dues aux microplastiques » sont également en progression.

Phytocontrol, qui a recruté 90 personnes l’an dernier, devrait encore accroître ses effectifs cette année. Difficile cependant pour le groupe de trouver des personnes qualifiées dans ses métiers. Pour pallier cet écueil, Mikaël Bresson s’est attelé depuis quelques années à la création à Nîmes d’un BTS des métiers de la chimie dont le groupe est partenaire. Une deuxième promotion devrait faire sa rentrée en septembre. Preuve que « notre capital humain est aussi important que notre projet de développement technologique », assure Jessy Favari.