Phare de Cordouan, objectif Unesco

Pendant la période estivale, le Réso-Hebdo-Éco vous invite chaque semaine à parcourir la France en découvrant des lieux uniques

Surnommé le « Versailles de la mer », le plus ancien phare français en activité (depuis 1611) est candidat pour être classé au Patrimoine mondial de l’Unesco en 2020. Depuis le 11 juillet, cette merveille est à découvrir ou à redécouvrir par sa beauté majestueuse très grand siècle de Louis XIV.

Le nom « Cordouan » proviendrait des Maures de Cordoue qui auraient installé à l’entrée de l’estuaire un comptoir commercial et donc un premier phare durant le Haut Moyen Âge, mais cela relève de la légende. Situé à l’embouchure de l’estuaire de la Gironde sur un plateau rocheux, à égale distance (7 kilomètres) en mer de Royan et du Verdon, le phare de Cordouan est spectaculairement célèbre pour ses caractéristiques remarquables : 68 mètres de hauteur, portée considérable de la lanterne d’environ 40 km, tour tronconique en maçonnerie et pierres de taille, 311 marches pour atteindre la lanterne, chaussée empierrée de 260 mètres de long pour apporter vivres et matériels, accessible à marée basse.

DEPUIS 400 ANS, LE PHARE DE CORDOUAN A RÉSISTÉ AUX ASSAUTS VIOLENTS DES VENTS ET MARÉES

Son histoire reste bien mystérieuse et à la fois tourmentée. Dès le XIVe siècle, le célèbre Prince noir, prince de Galles, fils aîné du roi Édouard III d’Angleterre qui gouverna la Guyenne de 1362 à 1371, aurait ordonné précisément à cet emplacement de l’embouchure, la construction d’une tour au sommet de laquelle une personne vivait recluse et allumait de grands feux. La tour fut vite abandonnée et tomba en ruine. Deux siècles plus tard, le maréchal de Matignon, gouverneur de Guyenne, se préoccupa à son tour de la sécurité de la navigation dans l’estuaire. Le 2 mars 1584, en présence de son ami Michel de Montaigne, maire de Bordeaux, il passa commande du phare de Cordouan à Louis de Foix, ingénieur architecte. Ce dernier a consacré 18 ans de sa vie et mourra en 1602 avant d’en voir la fin. Son fils reprendra le flambeau, mais ruiné, il sera remplacé par François Beuscher, ancien conducteur de travaux de Louis de Foix. Depuis 400 ans, le phare de Cordouan a résisté aux assauts violents des marées et des tempêtes (celle de 1999 fut particulièrement terrifiante, se souvient le dernier gardien) et a toujours parfaitement rempli son rôle. Appartenant à l’État, le phare de Cordouan est candidat pour une inscription sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco. Lancée officiellement en 2016, cette candidature est le fruit d’un travail commun avec tous les acteurs du territoire dans une vision pérenne, respectueuse et ambitieuse du monument et de son environnement. La France ne peut présenter qu’un bien par an au comité du Patrimoine Mondial de l’Unesco.

LA CANDIDATURE CORDOUAN A ÉTÉ DÉPOSÉE PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN 2019

En janvier 2019, le président de la République a proposé le phare de Cordouan. Le dossier est désormais entre les mains du Comité du Patrimoine Mondial. L’annonce devant intervenir en juin 2020. La Région Nouvelle-Aquitaine et les Départements de la Charente-Maritime et de la Gironde sont fortement impliqués dans la gestion quotidienne du site et la conservation du monument. Cette union des collectivités est plus que jamais au cœur du pro- jet de candidature. Des courriers de soutien émanant des élus locaux ont été adressés directement au président Macron.

Une délégation d’élus s’est rendue le 18 juillet dernier au phare pour témoigner de la mobilisation de tout le territoire. Le monde maritime s’est aussi largement mobilisé : l’association internationale de la signalisation maritime (AISM), l’association des phares de France, l’association des phares de Cordouan et de Grave, etc. Enfin un comité de soutien en ligne a été créé. On compte aujourd’hui près de 10 000 signatures. Des messages, photos et vidéos sont également postés régulièrement sur les réseaux sociaux avec le hashtag #UNESCORDOUAN. Vieux de 400 ans, offert à la houle et aux embruns salés, le phare souffre. Les formes des sculptures et ornements disparaissent, les joints des pierres s’effritent. Ce petit château posé en pleine mer nécessite un entretien régulier pour conserver sa prestance et son intégrité. « À l’heure d’une candidature Unesco, ces grands travaux marquent la volonté de tous les acteurs associés au phare de conserver au mieux le monument pour transmettre aux générations futures les valeurs architecturales, techniques et humaines qu’il incarne », déclarent les représentants des collectivités concernées. Pour la période 2019-2021, des travaux de restauration, d’un montant de 6 M€ (financés à 50 % par l’État) concernent l’intérieur du fût, c’est-à-dire la chapelle, le vestibule et les appartements du roi.

ÉLU « PHARE DE L’ANNÉE 2019 »

L’Association internationale de signalisation maritime (AISM) lançait en 2019 la première édition de la journée mondiale des aides à la navigation. L’Espagne, a organisé un séminaire international à Palma de Mallorca, en présence du secrétaire général de l’AISM. De nombreux pays étaient présents, dont la France, et ont organisé, au même moment, des manifestations (Danemark, Uruguay, Argentine, Japon, Corée, Brésil, Portugal…). Pour marquer cette première journée mondiale des aides à la navigation, l’AISM a décidé qu’un phare du monde serait désigné « Phare de l’année ». Cordouan a eu l’honneur d’être désigné « Phare de l’année 2019 ».

Après une présentation de Cordouan lors du séminaire de Palma de Mallorca, le secrétaire général de l’AISM a remis au représentant français (Ministère de la transition écologique et solidaire, Direction des affaires maritimes), en présence du représentant du Smiddest, ce prix réalisé par un artiste Coréen. Ce prix, marquant une première reconnaissance internationale de la valeur universelle de Cordouan, a été officiellement déposé sur le phare de Cordouan le 18 juillet 2019 par la préfète de la Région Nouvelle- Aquitaine et de la Gironde également présidente du Smiddest Fabienne Buccio en présence des élus du territoire. Chaque année, d’avril à octobre, 23 000 visiteurs accostent à Cordouan, avec un pic saisonnier en juillet et août. Le classement au Patrimoine mondial de l’Unesco aura pour conséquence une réorganisation d’envergure de l’accès au monument pour une nouvelle offre touristique. On sait que ce label (Saint-Émilion et Bordeaux en sont les illustres exemples) entraîne automatiquement une forte hausse de la fréquentation touristique. De nouveaux défis seront à relever pour les départements de la Gironde et de la Charente-Maritime.

Vincent Rousset Une chronique réalisée dans le cadre de RésoHebdoEco – www.reso-hebdo-eco.com

www.phare-de-cordouan.fr


EMBARQUEMENT À BORD DE « LA BOHÈME »

Pour se rendre sur le site au départ du Verdon-sur-Mer (Gironde) au Port-Médoc, il faut réserver sa place à bord des bateaux « La Bohème » (05 56 09 62 93 – www.vedettelaboheme.com) Pour s’y rendre au départ de Royan (Charente-Maritime), il faut embarquer à bord du bateau « Le Jules Verne » (06 81 84 47 80 – www.croisierelasirene.com)

Le prix en juillet-août est de 49 €par personne (bateau + visite du phare).


Que reste-t-il des gardiens du phare ?

Le phare de Cordouan est un exemple unique de la succession ininterrompue, depuis le XIVe siècle, de générations de gardiens ayant assuré son fonctionnement. Le dernier gardien qui vivait 24 heures sur 24 sur place est parti à la retraite en 2011. Il a été remplacé par quatre gardiens, agents du Smiddest, qui se relaient, deux par deux et restent une semaine ou une quinzaine, selon les périodes. La relève se déroule le vendredi aux heures dictées par la marée, au départ du Verdon-sur-Mer, à bord du navire de l’armement des Phares et Balises. Cette présence humaine, jour et nuit, 365 jours par an, est indispensable pour préserver le monument, l’entretenir quotidiennement, éviter le pillage et le vandalisme. Ils participent à la gestion environnementale du plateau rocheux et assurent l’accueil des visiteurs.