Oberti, petite salaison devenue grande

Didier Oberti, patron la charcuterie éponyme.

Fondée en 1956 par Georgette et Ernest Oberti, la salaison de Lacaune est riche de son histoire et de ses valeurs. La PME familiale emploie aujourd‘hui 65 personnes.

Pourquoi ce village de la Montagne Noire garde-t-il cette image de charcuterie ? Il faut remonter aux années 50, Lacaune comptait une quarantaine de charcutiers, il en reste une dizaine aujourd’hui. « De nombreux artisans sont venus s’installer ici parce que Lacaune a un atout géographique indéniable, explique Didier Oberti, aux commandes de l’entreprise depuis 1971. C’est son altitude. Nous bénéficions de l’influence de deux vents dominants: le vent du Nord et le vent d’Autan. Ils sont souvent chargés d’humidité, ce qui facilite le séchage des salaisons. » Il y a 60 ans, les parents de Didier Oberti, tous deux employés dans des charcuteries ont eu envie de créer leur activité. Ils ont commencé à vendre de la charcuterie sur les marchés entre Castres et Albi, puis se sont lancés dans la fabrication. « Je suis né avec les jambons au-dessus de la tête, s’amuse Didier Oberti, ils séchaient dans le grenier. » À 17 ans, il décide de rejoindre l’entreprise familiale et passe son CAP de charcutier. À 19 ans, il est au volant de son premier camion magasin. Son épouse le rejoindra pour assurer le volet comptabilité de l’entreprise.

UN CHEF D’ENTREPRISE PASSIONNÉ

Didier Oberti ne fait pas les choses à moitié, c’est un ardent défenseur des bons produits et de son terroir. Pendant 18 ans, il est resté à la tête du Syndicat des Salaisons, un syndicat professionnel qui s’est battu pour obtenir l’IGP (Indication géographique protégée) pour le saucisson, le jambon et la saucisse de Lacaune. C’est une vraie reconnaissance de qualité garantissant le respect absolu du cahier des charges : la charcuterie doit être salée avec le sel de la mer Méditerranée, provenant de Gruissan ou d’Aigues-Mortes. Il en est ainsi depuis le XIXe siècle lorsque les montagnards allaient prêter main-forte aux Languedociens pour les vendanges, ils échangeaient de la charcuterie contre du sel de mer.

UN NOUVEAU MUSÉE : L’ADN DE LA MAISON OBERTI

Didier Oberti a mis tout son cœur dans ce nouvel espace. Officiellement en mode « retraite », il continue à veiller sur l’entreprise mais c’est surtout le musée qui requiert toute son attention. Inauguré en juin dernier, un parcours attractif raconte toute l’histoire de la famille. On y découvre la technique de salage, le séchage des jambons et la saga du jambon de Lacaune. Le circuit de visite existait depuis 2012 mais « on commençait à être à l’étroit, explique Didier Oberti. La boutique a laissé place au nouveau musée, nous avons agrandi et réaménagé l’espace de vente. »

Oberti est une entreprise qui compte dans le Tarn et autour de Lacaune, elle est passée à la vitesse supérieure ces dernières années mais reste dans le giron familial. Lise Oberti, une des filles de Christine et Didier Oberti a repris les rênes, soucieuse de faire perdurer l’âme de la Maison. Elle s’est associée à Bertrand Thomas, qui a rejoint l’entreprise en 2005.

UNE STRATÉGIE COMMERCIALE CLAIRE

Les salaisons distribuent leurs produits de Bordeaux à Montpellier. Seule zone blanche, le Pays basque : « ils ont déjà leur jambon », ironise Didier Oberti. La grande distribution représente 50 % du CA, les autres ventes se font via les collectivités, la boutique en ligne ou directement à Lacaune. « Nous ne possédons pas de centrale d’achat, ajoute Didier Oberti, on peut ainsi mieux maîtriser les coûts de revient. »

L’export progresse doucement avec des premiers contacts du côté de Singapour. Le musée, avec une moyenne de 8 000 visiteurs (4 à 6 € l’entrée), est essentiellement une vitrine pour la marque.

16 M€ de CA, 3000 tonnes de charcuteries produites chaque année : « je ne suis plus vraiment un artisan, s’amuse Didier Oberti, mais on a gardé les mêmes méthodes de fabrication. » Il reconnaît qu’il est parfois difficile de recruter dans le secteur, les hivers y sont rudes. La porte de la charcuterie est ouverte, l’entreprise embauche et forme sur le terrain. « Si on y croit, on peut faire sa carrière sur Lacaune.» conclut Didier Oberti.