Géraud SpireMissions accomplies

Géraud Spire, devant les locaux de la CCI des Ardennes, à Charleville-Mézières. (Photo : Pascal Rémy)

Patron de l’entreprise familiale durant 42 ans, Géraud Spire (69 ans) restera président de la Chambre de commerce et d’industrie des Ardennes jusqu’en 2021.

«J’ai toujours aimé l’ordre, l’autorité. Je suis un légaliste, attiré par l’uniforme, mais pas celui d’apparat, le treillis me va très bien. La défense du pays est une notion importante pour moi. J’aurais sans doute fait carrière dans l’armée s’il n’y avait pas eu ce conseil familial qui m’a amené à reprendre l’entreprise… ». Président des officiers de réserve depuis 1980, Géraud Spire a en effet emprunté la voie économique en raison de l’état de santé de son père. L’action était son moteur. Et ce quatrième fils d’une fratrie de sept enfants accepta, à 25 ans, le défi de succéder à son père, Jacques et de continuer la saga familiale.

Bachelier en 1969 et sorti diplômé en 1972 de Sciences Po Strasbourg, Géraud Spire, qui pensait se diriger vers l’ENA, est alors fortement encouragé par son père à intégrer l’Ecole Supérieure de Sciences Economiques et Commerciales pour compléter sa formation. Cette école de commerce lui prodigua les capacités nécessaires pour diriger Spire-Frères Bois Construction. « J’y suis entré 48 heures après la fin de ma période militaire avant d’en sortir en juin 1975 pour intégrer le négoce des Forges Saint-Charles puis de prendre le poste de Pdg le 1er avril 1976 trois mois avant la mort de mon père ».

Après Jules, Henri et Jacques, il représente la quatrième et probablement dernière génération Spire. « Il m’a fallu deux ou trois ans pour m’imposer, comprendre les problématiques du négoce et cerner un métier finalement simple qui consiste à acheter en gros, à stocker et à vendre en détail aux artisans du bâtiment. Après avoir pris les choses en mains, j’ai fait en sorte qu’on puisse fournir tous les produits nécessaires à la construction ».

UN HOMME ENGAGÉ AUX MULTIPLES CASQUETTES

Sous son impulsion, la société, qui tournait alors avec une quarantaine de personnes va fortement se développer. « Après avoir procédé au rachat de six de ses concurrents, Gedimat-Spire emploie aujourd’hui 70 salariés. La société compte six points de vente dans les Ardennes et l’Aisne, réalise un chiffre d’affaires de 17 millions d’euros et propose 45 000 références à une clientèle de professionnels et de particuliers. Elle est leader du négoce de bois et matériaux dans les Ardennes en détenant 33% du marché local ».

Entre-temps, Géraud Spire, sachant qu’il n’aurait pas de successeur car ses deux filles sont installées à l’étranger et son fils est avocat, s’est associé en 1987 avec les frères Christian et Claude Lambert, propriétaires de La Scierie Ardennaise, qui ont repris 49% du capital de l’entreprise. « L’entreprise étant par ailleurs confrontée à un problème d’indivision, cet accord m’a permis de désengager mes frères et sœurs de la société et d’avoir ainsi davantage de moyens pour la développer. Car jusqu’alors, il me fallait leur accord pour prendre les décisions importantes. En trouvant cette porte de sortie, on a accéléré la modernisation du dépôt des Forges Saint-Charles ».

SA DEVISE : « FAIRE OU AGIR »

Dans les années 80, profondément attaché à son terroir, il s’est plus fortement impliqué dans la vie économique et politique ardennaise. Son tempérament le conduit, en effet, à devenir juge au Tribunal de Commerce (1981- 2008), conseiller municipal à Charleville-Mézières à trois reprises (1989, 1995-2001 et 2001-2004), suppléant du député Michel Vuibert (1993-1997) mais aussi et président de la Chambre de Commerce et d’Industries des Ardennes à partir de 2004.

Des responsabilités locales qui ne l’empêcheront pas par la suite de briguer d’autres mandats professionnels : membre du directoire de Gedimat, président des fédérations nationales de négoce du bois et des matériaux de construction. « Faire ou agir, c’est ma devise. À tous ces postes, j’ai essayé d’être constructif et efficace. Je me suis efforcé de travailler dans l’intérêt général, en étant soucieux du collectif et avec la volonté de transcender les clivages. Rassembleur, j’ai la fierté d’avoir activement participé à la fusion des Caisses d’Epargne, des deux CCI ardennaises et des fédérations des négoces de bois et de matériaux de construction en créant une Confédération unique en 2010. J’ai aussi bravé les conformismes en défendant l’idée d’une grande Agglo réunissant les bassins de vie de Charleville-Mézières et Sedan ».

Ce qui a fait de lui un interlocuteur incontournable du développement économique des Ardennes. Fervent gaulliste, il adhère à ce mouvement en 1986 et sera élu quatre fois de suite au conseil national du RPR et de l’UMP.

DEUX PASSIONS : LE SPORT ET LE CHEVAL

Sportif durant ses rares heures de loisirs, l’homme aux multiples casquettes fut aussi footballeur à l’Olympique de Charleville, basketteur à l’Étoile, président du conseil de surveillance puis vice-président de l’Olympique et aussi sponsor de nombreux clubs ardennais. Celui qui n’aime pas rester inactif – « lorsque je suis en stand-by, je me demande pourquoi je n’ai rien à faire » – aime aussi se détendre en partant quelques heures à cheval dans les forêts ardennaises après avoir appris l’équitation au club hippique du Bois-Fortant. « J’ai commencé à l’âge de 8 ans en réussissant à convaincre mes parents et depuis je suis toujours monté en selle à chaque fois que j’en ai eu le temps ».

Désormais proche des arrêts de jeu, Géraud Spire (69 ans), après avoir déjà annoncé en juin 2018 son départ en retraite à l’occasion du 155e anniversaire d’une entreprise qu’il aura dirigée durant 42 ans, s’apprête, aujourd’hui, à entonner le clap de fin dans ses nombreuses autres activités. Son mandat de président de la CCI s’arrêtera à la fin de l’année 2021 après 43 ans de mandat et 17 de gouvernance. « Arrivé dans la dernière ligne droite, je pense achever toutes ces missions avec le sentiment du devoir accompli et la satisfaction d’avoir assuré la pérennité de l’entreprise familiale », conclut celui qui pourra alors se rapprocher plus souvent de ses trois enfants qu’il a eus avec son épouse Jacqueline : Emeline (41 ans) qui travaille chez le distributeur d’électricité belge Elia à Bruxelles, Christelle (40 ans) cadre es qualité chez Lactalis à Annecy et Vandrille (35 ans) avocat au barreau de Paris.

Parcours

1950 Naissance le 8 janvier à Charleville.
1972 Diplômé de Sciences Po Strasbourg.
1975 Débute dans le négoce.
2004 Président de la CCI des Ardennes.
2018 annonce sa retraite à l'occasion du 155e anniversaire de son entreprise.