Logiyonne, transporteur multi-modal et gestionnaire depuis sa création en 2010 du port de Gron, investit dans un navire ballastable de près d’un million d’euros pour soutenir sa croissance compromise par le nouveau pont de Pont-sur-Yonne.
Depuis quelques mois, l’affaire du nouveau pont de Pont-sur-Yonne, plus bas de 39 centimètres que son prédécesseur alimente la chronique. Elle a trouvé une première réponse judiciaire après que le tribunal administratif de Dijon a autorisé le Conseil départemental de l’Yonne à achever les travaux. Si le maître d’ouvrage n’exclut pas une rehausse a posteriori, le nouveau dimensionnement n’est pas sans incidences économiques substantielles, notamment sur le port fluvial de Gron en croissance ininterrompue depuis dix ans. « L’Yonne est une rivière sauvage. Sur l’ensemble du bassin Seine-Normandie, Gron est le port le plus contraint en tirant d’air (hauteur) et en tirant d’eau (enfoncement). Rabaisser ce pont en aval à un endroit aussi technique, c’est ajouter une difficulté supplémentaire, explique Didier Mercey, patron du transporteur Logiyonne qui assure l’exploitation du port. Sur la trentaine de mariniers qui empruntent régulièrement la voie d’eau, beaucoup ne vont plus s’y aventurer ».
Pourtant, le port sénonais s’est imposé comme un partenaire logistique incontournable des industriels locaux tels que Prysmian ou FMC, à tel point que Logiyonne – dont 99 % de l’activité se fait en grand export, notamment vers la Chine et le Vietnam – assure jusqu’à 30 % de l’activité « colis lourds » du port du Havre (Seine-Maritime). « Certaines entreprises ont maintenu les emplois en développant des solutions logistiques avec nous. Nous devons continuer d’assurer l’affrètement des colis lourds. C’est pourquoi j’ai pris la décision de faire l’acquisition d’un automoteur ballastable doté d’une cale de 70 mètres. Il sera dirigé par un jeune capitaine et battra le pavillon de Sens ». Le bâtiment dont l’investissement s’élève à près d’un million d’euros est équipé d’une double coque qui, « à la manière des sous-marins », peut se remplir d’eau pour franchir plus aisément, à vide, le pont problématique. En parallèle et jusqu’à l’hypothétique rehausse de l’ouvrage d’art, tous les chargements conteneurisés emprunteront la route jusqu’au port de Genevilliers (Hauts-de-Seine).
BIENTÔT UNE CONNEXION FERROVIAIRE ?
Si Logiyonne a connu un fort développement dès sa création, poussé par le report modal vers le fluvial, avec un chiffre d’affaires annuel de neuf millions d’euros et l’ouverture d’une filiale au Vietnam, Didier Mercey entend étoffer plus encore la plateforme portuaire. Interconnecté au réseau autoroutier et au maritime, Gron pourrait bientôt disposer de son propre embranchement ferroviaire. Depuis trois ans, le logisticien travaille sur ce dossier en partenariat avec la communauté d’agglomération du Sénonais qui vient d’approuver la démarche. « À quelques centaines de mètres, il existe un embranchement particulier industriel jamais utilisé. Nous avons étudié la possibilité de créer une plateforme ferroviaire spécialisée dans le transport de conteneurs et faire de Gron un hub logistique trimodal. » Il ne reste plus qu’à attendre l’étude d’impact environnemental de la Dreal. En dehors des sillons voyageurs, cette ligne permettrait d’acheminer directement sur le port du Havre un train de 54 conteneurs de nuit. Et supprimer 15.500 poids lourds routiers par an.