Lip a trouvé le bon timing à Lectoure

L’entreprise a développé une filière de recyclage de montres et de bijoux fantaisie. Prochaine étape : fabriquer de nouvelles montres à partir de ces « déchets ».

Avoir un temps d’avance, c’est le credo de Jean-Luc Bernerd aux commandes de MGH, la Manufacture Générale Horlogère à Lectoure dans le Gers. Si la vitrine de cette PME repose en grande partie sur la marque Lip, MGH a su développer un écosystème autour de l’horlogerie.

L e hasard fait bien les choses, assure Jean-Luc Bernerd. En 1990, il quitte Besançon pour le Gers et rejoint l’entreprise Sensemat. Leader sur le marché de l’outillage, il s’agit à l’époque du plus gros employeur privé du Gers avec 500 salariés. L’entrepreneur Jean-Claude Sensemat suit alors de près la crise que traverse Lip. Très attaché au savoir-faire de l’horloger français, il décide de sauver l’entreprise. Jean-Luc Bernerd se voit confier la direction de l’horloger de Besançon, un retour aux sources franc-comtoises en quelque sorte. En 2002, il crée MGH et en 2015, il devient propriétaire de la marque à 100 %, du design jusqu’à la vente.

DES MONTRES DANS LE GERS, COMMENT ÇA ?

« Pour des raisons stratégiques de développement, j’ai signé un contrat de licence avec l’entreprise SMB à Besançon, spécialisée dans l’horlogerie. On a ramené la marque dans son berceau dans la logique du made in France », explique Jean-Luc Bernerd. SMB emploie une trentaine de salariés.

Lip s’appuie donc sur deux sociétés, une en charge de la fabrication et de l’assemblage, l’autre à Lectoure, qui s’occupe du marketing. « C’est la vitrine officielle du BtoC, » ajoute Jean-Luc Bernerd.

Le chef d’entreprise est incollable sur les 150 ans d’histoire de Lip. La marque représente 30 % du volume des ventes et le site internet affiche 100 000 visiteurs par mois, elle est présente dans 900 points de vente. À l’export, les ventes au Japon et en Europe ne représentent que 10 % du CA. « Le contexte n’est pas propice à l’export. La crise liée au virus a donné un coup de frein aux ventes », précise Jean-Luc Bernerd,

À Lectoure, MGH assure aussi l’assemblage des montres Kelton et d’autres modèles au positionnement compétitif. Elles sont vendues en grande distribution et sur le site internet multimarques du « Club de la Montre ».

PRIORITÉ À L’INSERTION ET AU RECYCLAGE

Design, marketing, logistique… 30 personnes travaillent chez MGH à Lectoure. « Pour le packaging des montres, je fais appel à AG2I et R2d2, des sociétés d’insertion par le travail à Auch », précise Jean-Luc Bernerd.

Autre priorité de l’entreprise : le recyclage. Le chef d’entreprise a en effet créé la marque Eco Tempo, une filière qui récupère les montres et les bijoux pour les recycler. « On y travaille depuis 10 ans. Sachant qu’une montre peut être recyclée à 80 %, c’est le seul déchet d’équipement électrique et électronique (DEEE) qui ne l’est pas encore ». Une fois récupérées, les montres sont démontées par les jeunes de l’Institut médico-éducatif (IME) d’Auch.

L’entreprise recycle en moyenne une tonne de montres par an. Elle propose sur son site ecotempo.net des enveloppes prépayées pour envoyer les montres ou les bijoux fantaisie que les clients n’utilisent plus.

MGH est prête à passer à la phase 2: réutiliser tous les composants d’occasion pour en faire une montre unique 100 % made in Lectoure. Elle est commercialisée sous le nom d’eHo. Il y a quelques mois, MGH lançait une opération de crowdfunding pour lancer la nouvelle marque. « Avec ces produits écoresponsables, nous devrions intéresser des enseignes comme Biocoop », assure le dirigeant.

L’horlogerie gersoise attire également les touristes. C’est d’ailleurs en été, grâce à sa boutique, que l’entreprise réalise ses plus grosses ventes. Dès le printemps prochain, des circuits de visites seront organisés dans les ateliers de Lectoure.

Jean-Luc Bernerd ne tient pas en place. « Agilité est un mot qui convient bien à l’entreprise », s’amuse-t-il. MGH vient d’ouvrir un espace de coworking à Lectoure, la Manufacture, évidemment en écho à l’atelier mais aussi à la Manufacture royale de Lectoure.

Jean-Luc Bernerd dirige MGH à Lectoure, propriétaire de la marque Lip.