Le décret n°2019-356 du 23 avril 2019 vient réformer la procédure d’instruction des déclarations d’accidents du travail et de maladies professionnelles du régime général. Ce décret vient davantage encadrer cette procédure et renforcer le contradictoire.
L’instruction des dossiers ATMP devient une succession d’étapes encadrées par une multitude de délais. L’entrée en vigueur de ce décret va permettre d’uniformiser, sur le plan national, des pratiques plus ou moins différentes d’une CPAM à l’autre.
Comme sous l’empire du décret n°2009-938 du 29 juillet 2019, la procédure diffère selon qu’il s’agisse de l’instruction d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
I. Sur la reconnaissance des accidents du travail
➢ L’émission de réserves est encadrée
Ainsi, l’article R. 441-6 nouveau du code de la sécurité sociale prévoit que l’employeur dispose d’un délai de 10 jours francs pour émettre des réserves.
La circulaire 28/2019 du 9 août 2019 précise que le point de départ de ce délai est la date de « rédaction de la DAT (mentionnée sur le formulaire de déclaration) et non de la date d’envoi de la DAT ».
Auparavant, aucun délai n’était prévu de sorte que l’employeur prenait le risque de voir un accident pris en charge d’emblée, s’il tardait à transmettre ses réserves à la CPAM.
Rappelons l’importance des réserves. Ces dernières contraignent la CPAM à instruire la demande de prise en charge ainsi qu’à informer l’employeur de la clôture de l’instruction et de sa possibilité de consulter les éléments susceptibles de lui faire grief.
➢ La procédure d’instruction est désormais détaillée étape par étape, chacune disposant de son délai
Ainsi, un délai de 30 jours francs s’ouvre à compter de la réception par la CPAM de la déclaration d’accident du travail (DAT) et du certificat médical initial (CMI).
Ce délai lui permet :
– Soit de se prononcer sur le caractère professionnel de l’accident ;
– Soit d’engager des investigations, parce qu’elle l’estime nécessaire ou qu’elle a réceptionné des réserves de la part de l’employeur.
Dans ce dernier cas, la CPAM dispose d’un délai total de 90 jours francs à compter de la réception de la DAT et du CMI pour rendre sa décision.
Dans le délai de 30 jours francs, la CPAM doit transmettre à l’employeur et à l’assuré un questionnaire, qu’ils devront retourner dans un délai de 20 jours francs.
En cas de non-respect de ce délai, l’employeur s’expose à ce que ses réponses ne soient pas prises en compte. La circulaire du 9 août 2019 vient préciser que « la partie qui n’aura pas répondu aura en tout état de cause accès au dossier. Toutefois, la réglementation n’ouvre la possibilité dans ce cadre que de formuler des observations sur les pièces pré- sentes au dossier ainsi constitué et non d’y adjoindre tardivement le questionnaire ».
A l’issue de ses investigations et, au plus tard, 70 jours francs à compter de la réception par la CPAM de la DAT et du CMI, la CPAM met à disposition aux parties son dossier pour consultation.
S’ouvrent alors deux délais de 10 jours francs chacun, le premier permettant aux parties de consulter le dossier et de présenter des observations, le second, uniquement pour consulter le dossier.
La CPAM doit informer les parties des dates d’ouverture et de clôture de cette période de consultation au moins 10 jours francs avant le début de cette période.
II. Sur l’instruction des maladies professionnelles
L’instruction des demandes de prise en charge des maladies professionnelles est également davantage encadrée, avec un renforcement du principe du contradictoire, en cas de saisine d’un CRRMP.
Auparavant, la CPAM disposait d’un délai de trois mois, éventuellement prorogeable de trois mois supplémentaires pour rendre sa décision.
Par ailleurs, ces délais n’étaient pas augmentés en cas de saisine d’un CRRMP.
➢ Désormais, l’article R. 461-9-I nouveau du code de la sécurité sociale fixe un délai de 120 jours à la CPAM pour rendre sa décision ou saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).
Le point de départ de ce délai commence à compter de la réception par la CPAM de la déclaration de maladie professionnelle, du certificat médical initial et, le cas échéant, des examens médicaux complémentaires.
La CPAM transmet, à l’employeur et au salarié, un questionnaire qu’ils devront retourner dans un délai de 30 jours francs suivant sa réception. Les sanctions en cas de non-respect de ce délai sont vraisemblablement les mêmes qu’en matière d’accident du travail.
Un double de la déclaration, intégrant le certificat médical initial, est alors transmis à l’employeur. La caisse peut également, dans les mêmes conditions, interroger tout employeur ainsi que tout médecin du travail de la victime.
Une fois l’instruction terminée, et au plus tard, 100 jours après le commencement du délai de 120 jours, la CPAM doit mettre à la disposition des parties son dossier pour consultation.
Ces dernières disposent, tout comme en matière d’accident du travail, de deux délais de 10 jours francs chacun.
La CPAM doit informer les parties des dates d’ouverture et de clôture de la période de consultation, au plus tard dix jours francs avant le début de la consultation.
➢ La procédure évolue en cas de saisine, par la CPAM, d’un CRRMP.
Deux points importants méritent d’être soulignés :
– un délai supplémentaire de 120 jours francs est accordé à la CPAM pour statuer (article R.461-10 nouveau du code de la sécurité sociale).
– une phase de mise à disposition du dossier aux parties est prévue, pendant quarante jours francs. Au cours des trente premiers jours, ceux-ci peuvent le consulter, le compléter par tout élément qu’ils jugent utile et faire connaître leurs observations, qui y sont annexées.
Ainsi, si l’information de l’employeur est améliorée, ce dernier doit faire preuve de davantage de rigueur dans la gestion de tels dossiers, le non-respect des délais désormais prévus emportant de graves conséquences.
Par ailleurs, la phase d’instruction de ces demandes évoluera vraisemblablement en janvier 2020, par sa dématérialisation totale.
Ainsi, l’employeur disposant de son profil, pourra répondre aux questionnaires et consulter le dossier d’enquête en ligne. Il ne recevra alors qu’une information dématérialisée.
Cette nouvelle procédure et ce nouveau canal d’échanges avec la CPAM doivent être l’occasion pour les entreprises de revoir leur procédure interne de gestion de ces dossiers, notamment en y intégrant leur conseil habituel.
Yannick NERDEN Avocat, Département Droit Social, FIDAL Barreau de Reims