L’indémodable balai de paille à Grisolles

Jean-Marc Coulom perpétue un artisanal ancestral.

La commune de Grisolles nichée en Tarn-et-Garonne n’a pas l’intention de laisser tomber son balai de sorgho. Depuis plus de 30 ans, Jean-Marc Coulom maîtrise parfaitement sa confection… Son rêve : transmettre sa passion et susciter des vocations.

Avec son bel accent chantant et sa façon de rouler les « r », Jean-Marc Coulom est assurément originaire du Tarn-et-Garonne. Écoutez comme il vous parle de la fanette ou du balejon, ce sont les grands-parents de nos balayettes. Jean-Marc Coulom est aux commandes de la dernière fabrique de balais de Grisolles. Il a créé son entreprise en 1987 après une expérience de menuisier.

Le balai de Grisolles a connu son heure de gloire entre 1880 et 1918, où plus de 20 fabriques faisaient travailler 400 ouvriers, soit un quart de la population du village. Quelque 6000 balais sortaient chaque jour des ateiers, lesquels étaient exportés jusqu’en Grande-Bretagne. C’est la famille Peyrebrune propriétaire du relais de poste à l’époque qui a eu l’idée de lancer la fabrication du balai, l’arrivée du chemin de fer lui permettant de s’approvisionner en paille. L’industrie du balai de paille connaît un bel essor. Le balai sera ensuite chassé par l’aspirateur dans les années 50.

LA PAILLE À BALAI, UNE FILIÈRE À RELANCER

Il s’agit en réalité de sorgho, qu’on l’appelle aussi paille de riz en fonction des régions. Elle vient des pays de l’Est, essentiellement de Serbie. « Je l’achète auprès d’un courtier italien, explique Jean-Marc Coulom. Je passe un temps fou à trier la paille, les brins doivent être longs et bien fins si on veut que le balai résiste. » Toute la difficulté est de bien répartir la paille autour du paillon.

Les gestes de Jean-Marc sont précis, ajustés, « beaucoup des balais viennent de l’Est de l’Europe, je suis capable, rien qu’en voyant le balai, de vous dire qui l’a monté. »
Jean-Marc entend bien se battre pour sauvegarder cet art ancestral. Des discussions sont en cours avec la chambre d’agriculture du département pour trouver des agriculteurs qui acceptent de produire de la paille. Jean-Marc y croit : « on va labelliser le balai de Grisolles. » Au XIXe siècle, la paille était une des grandes cultures de la vallée de la Garonne.

Jean-Marc est proche de la retraite, mais pas question de s’arrêter. Il veut transmettre son savoir-faire et se dit prêt à assurer la formation de celui qui veut se lancer dans le balai. « Il y a du travail, de la demande, je suis même obligé de refuser des commandes, je n’arrive pas à produire. » Une des dernières drogueries de France, la Maison Empereur à Marseille lui passe régulièrement commande, il travaille aussi avec des écuries en Bretagne ou avec des coopératives agricoles qui ne jurent que par le balai de paille de Jean-Marc. Il lui faut 15 minutes pour assembler un balai qui sera vendu entre 11 et 15 €.

Dans son atelier, avec passion et enthousiasme, il explique aux visiteurs toujours plus nombreux comment fabriquer un balai, il les conduit ensuite au musée Calbet à Grisolles. « C’est ma deuxième maison. On y a reconstitué une fabrique à balai. Ça fait 200 ans qu’on est dans le balai à Grisolles, je ne vois pas pourquoi ça s’arrêterait. À Grisolles, on dit que les gens ont mis leur âme dans le balai ».