Pour donner suite à la parution de l’avis d’experts paru dans le Journal du Palais n° 4752, Lionel Matz, directeur de l’Urssaf Bourgogne apporte un éclairage sur les missions de l’Urssaf en matière de contrôle ainsi que sur la relation cotisants en ces temps de crise sanitaire et économique.
Pouvez-vous nous dire à quoi servent les contrôles Urssaf ?
Lionel Matz. Dès lors que l’entreprise calcule et déclare elle-même le montant des cotisations sociales qu’elle doit acquitter, il est légitime que des contrôles effectués ponctuellement permettent de vérifier la bonne compréhension et application de la règlementation. C’est la contrepartie logique d’un système déclaratif.
L’objectif n’est pas uniquement financier : la bonne déclaration des cotisations sociales, c’est avant tout l’assurance du calcul des justes droits sociaux des salariés. Rappelons-le : les cotisations sont le cœur du financement de notre système de protection sociale.
Le principe du contrôle permet aussi de garantir l’égalité de concurrence entre les acteurs économiques.
Les contrôles Urssaf sont perçus comme pénalisants vis-à-vis des entreprises. Est-ce la réalité ?
Le contrôle Urssaf ne cherche pas à pénaliser l’entreprise, mais bien à garantir le juste calcul des cotisations. Ainsi en moyenne, et de manière méconnue, pour cinq euros réclamés aux entreprises à la suite de contrôles, un euro est restitué pour corriger des erreurs de l’entreprise en sa défaveur.
Une enquête menée en 2019 a par ailleurs mis en évidence que 88 % des entreprises ayant été contrôlées estimaient que le contrôle s’était déroulé dans un climat de confiance et d’échanges (enquête en ligne entre le 2 et le 23 décembre 2019).
Est-il impossible de contester les décisions qui découlent d’un contrôle ?
Si une entreprise contrôlée souhaite contester la décision de l’Urssaf, elle dispose d’un délai de deux mois à compter de sa notification pour saisir la Commission de recours amiable.
Plus largement, un réseau national de médiateurs (un par organisme) a été constitué au plus proche de nos publics. Il constitue un nouveau vecteur de dialogue lorsque survient un désaccord, une difficulté ou une incompréhension. 1.965 demandes de médiation ont été formulées en 2020, et 70 % des demandes recevables ont conduit à une réussite de la médiation.
Avez-vous un autre rôle que celui de contrôle a posteriori des entreprises ?
Bien sûr : notre rôle commence avec l’information et est complété par des actions de prévention. Les échanges et le conseil tiennent également une place importante dans les opérations de contrôles. Par exemple, dans le cadre de la crise actuelle, l’Urssaf propose des entretiens préalables aux contrôles pour toutes les entreprises, pour définir si elles sont fragilisées et s’il faut envisager de reporter le contrôle.
Pour les contrôles effectués au sein de l’entreprise, un rendez-vous de clôture est systématiquement organisé. Il permet d’expliciter les anomalies relevées, les régularisations effectuées, et de répondre à toute question de l’entreprise.
À noter qu’en matière de régularisations de faible montant, seules des observations pour l’avenir sont notifiées, sans redressement.
On blâme souvent les inspecteurs Urssaf de vouloir « faire du chiffre »…
Je le répète, l’objectif du contrôle n’est pas de « faire du chiffre », mais bien de garantir une application correcte de la législation et de sécuriser juridiquement les entreprises.
Par ailleurs, le droit à l’erreur s’applique lors d’un contrôle Urssaf, conformément à ce qui est précisé au sein de la « Charte du cotisant contrôlé » mise à disposition des entreprises sur urssaf.fr.
Enfin, depuis 2020, les règles ont changé : en dehors des cas de fraude ou de réitération, il n’est plus appliqué de majorations ni de pénalités. N’est demandé à l’entreprise que le paiement des cotisations qu’elle aurait payées si elle n’avait pas fait d’erreur.
Pouvez-vous comprendre que, pour un entrepreneur, la législation Urssaf soit difficile à comprendre ?
Les acteurs Urssaf sont bien conscients de cette complexité. Nos organismes se mettent donc au service des entreprises et indépendants pour apporter des réponses claires et opposables à leurs questionnements. Ainsi, en 2019, le réseau Urssaf a répondu à plus de 19.000 questions complexes, sécurisant juridiquement les situations.
Par ailleurs, nouveauté d’avril 2021, le Bulletin officiel de la Sécurité sociale (Boss) regroupe en ligne l’ensemble des informations et la doctrine relative au prélèvement social, dans une publication unique et facilement accessible.
Qu’en est-il de vos relations avec les professionnels ?
La relation entre l’Urssaf et ses publics (entreprises, indépendants, particuliers…) va bien au-delà des seuls contrôles. L’Urssaf est présente dans le quotidien des professionnels (déclarations et paiement régulier des cotisations) et à chaque grande étape : accompagnement lors de la création, des premières embauches, en cas de difficultés… Cette relation est une relation de qualité : 79 % des professionnels se disent globalement satisfaits du service apporté par leur Urssaf (enquête satisfaction 2019).
Qu’en est-il de l’accompagnement aux entreprises, spécialement depuis le début de la crise ?
L’Urssaf a toujours été à l’écoute des entreprises. Elle propose chaque jour des aménagements aux entreprises rencontrant des difficultés : plus de 63.000 demandes de délais ont été accordées en 2019, soit 93 % des demandes.
Depuis mars 2020, la crise nous a conduit à amplifier notre accompagnement vers les entreprises et les indépendants. Cet accompagnement renforcé s’est matérialisé par l’activation de reports, d’exonérations, ainsi que par la mise en place d’outils d’information et d’accompagnement (mini-site, FAQ, chatbot, webinaires…).
Ces mesures exceptionnelles traduisent l’accompagnement fort et constant de l’Urssaf vers les acteurs économiques, notamment ceux connaissant des difficultés de trésorerie.