Les matelas reconditionnés ont la cot

Jérémie Adjedj et Stéphane Duponchel ont créé Ecomatelas en 2017.

L’entreprise basée à Saint-Aunès (34), spécialiste du reconditionnement de literie, qui a généré 500 K€ en 2019, poursuit sa croissance sur le territoire national et vise 1 M€ de chiffre d’affaires d’ici deux ans. 

L’idée de reconditionner n’importe quel matelas voué à la déchetterie n’a rien d’ une histoire à dormir debout. L’entreprise Ecomatelas, cofondée par Jérémie Adjedj et Stéphane Duponchel a doublé sa croissance en un an, passant de 250 K€ en 2018 à 500 K€ en 2019 et ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, puisque 2020 s’annonce sous les meilleurs hospices, malgré la crise sanitaire. À partir de matelas reconditionnés, la pépite héraultaise part à l’assaut du marché national et projette d’ouvrir une boutique aux portes de la Ville rose en 2021.

À l’origine de ce concept novateur en France et sans doute en Europe, c’est une histoire familiale et une rencontre fructueuse. « Je travaillais les étés avec mon oncle dans le milieu de la literie à Agde. Nous collaborions avec des hôtels qui renouvellent leur literie tous les deux ou trois ans. J’étais chargé de récupérer les matelas usagés que nous remplacions par des neufs. L’idée est née d’un double constat : pourquoi ne pas donner une seconde vie à ces matelas encore en bon état et pourquoi ne pas prendre l’exemple des portables reconditionnés et reproduire la même chose avec la literie ? », explique Jérémie Adjedj, à l’initiative du projet. Il s’associe en 2017 avec Stéphane Duponchel qui apporte son expertise industrielle dans le domaine des produits en fin de vie. Président de l’agence B-to-B Design, il a participé à la création des premiers eco-organismes français à travers Amezis, un cabinet de conseil en communication environnementale.

Près de 18 mois de R&D en partenariat avec des laboratoires de microbiologie, des fabricants de literie, des fabricants de tissus, etc. auront été nécessaires pour élaborer un procédé viable et le développement d’une machine sur mesure qui permet une hygiénisation thermique, sans produit chimique. « Nous avons créé cette machine inédite à partir de technologies existantes issues du traitement de surfaces, ou du domaine agro-alimentaire. Quatre étapes ponctuent le processus de reconditionnement : après un contrôle qualité, nous ne gardons que l’âme du matelas. Puis, nous retaillons la mousse en fonction de son niveau d’affaissement, avant de désinfecter à cœur la mousse à plus de 100 degrés, soit l’équivalent d’un abattement de 7 Log, supérieur à la norme indiquée dans le milieu hospitalier, précise le cofondateur. Enfin, nous passons à l’assemblage de matières que nous rhabillons avec des nouveaux tissus fabriqués en Belgique, en France et en Espagne. » Quid de la durée de vie des matelas reconditionnés ? « Entre six et 10 ans ». 

40 000 VENTES

La Région, l’Ademe, et le Département ont soutenu le projet à hauteur de 500 K€, le développement de la machine coûtant près de 150 K€. Parmi les axes stratégiques, un deuxième tour de table avec les investisseurs historiques est prévu, en 2021, en vue de dupliquer la machine et d’augmenter la capacité de production.

Pour l’heure, depuis sa création, l’entreprise, en partenariat avec une quarantaine d’établissements hôteliers basés notamment en Occitanie et de fabricants de literie, reçoit entre 500 et 1000 matelas par mois. « Nous en reconditionnons entre 500 et 700, précise le dirigeant. Depuis notre création, nous avons vendu près de 40 000 matelas et sommiers. Nous n’avons que très peu de stock, nous sommes toujours à flux tendu. » Les ventes décollent, le concept séduisant autant le marché du B to B que celui du B to C qui représente 70 % du chiffre d’affaires, avec un prix moyen deux fois moins élevé que celui du neuf… « Ce sont généralement des primo-accédants, des propriétaires qui font du locatif ou des personnes avec une fibre écologique. Pour les professionnels, nous vendons essentiellement aux petites structures, hôtels indépendants, ecolodges, chambres d’hôtes, gîtes, etc. car les gros hôtels passent des accords avec des groupes d’achats nationaux. » L’entreprise a, pour l’heure, recyclé mille tonnes de matières premières. 

UN NOUVEAU SITE INTERNET

L’entreprise, qui mise sur la croissance, ne craint pas la concurrence, même au-delà des frontières hexagonales. « Aux États-Unis, il existe des matelas eco-conçus mais fabriqués à partir de copeaux de mousse totalement recyclés, mais pas de matelas réemployés comme nous le faisons. En France, il s’agit d’acteurs du recyclage qui captent principalement la matière première et la renvoient dans des industries différentes pour que cette dernière soit totalement transformée ». L’entreprise surfe ainsi sur la vague du développement durable et renforce sa stratégie pour asseoir sa notoriété à l’échelle nationale en boostant sa digitalisation. « Nous créons un site marchand afin de rayonner sur toute la France, car pour l’heure les ventes sont davantage concentrées en région et notamment autour de Montpellier. » Dans leur feuille de route, les fondateurs projettent également d’ouvrir une deuxième boutique en banlieue toulousaine, à Labège. « C’est un axe stratégique et nous avons déjà un partenariat avec l’eco-organisme Valdelia qui nous a soutenu dès le départ. » Ainsi, Saint-Aunès resterait le magasin pilote et Toulouse deviendrait le point de vente principal.

Afin d’accompagner sa croissance, Ecomatelas est actuellement en discussion avec un spécialiste du recyclage en vue de bénéficier d’un deuxième site de traitement et de doubler la quantité de matière première à recycler.

La pépite, qui réunit neuf salariés dont trois en réinsertion, vise d’ici deux ans, 1 M€ de chiffre d’affaires et le marché international.