Pour sa première intervention en Champagne-Ardenne, l’Etablissement Public Foncier Grand Est va réaliser le quartier des Berges de Marne d’Epernay. Focus sur les missions d’un EPF et sur ce qu’il apporte aux collectivités locales.
Établissement public foncier de l’Etat, l’EPF a été créé en 1973, initialement pour accompagner la maîtrise foncière et le développement économique de ce qui allait alors devenir la métropole lorraine. « À partir du milieu des années 80, l’EPF a été plongé dans le grand bain des reconversions industrielles à la suite du choc sidérurgique en lorraine », rappelle Alain Toubol, directeur de l’établissement. Aujourd’hui, l’EPF est surtout impliqué dans deux grands métiers : la maîtrise foncière et l’accompagnement à la reconversion de friches (industrielles, militaires, urbaines…). « La question de la maîtrise foncière a beaucoup évolué », rappelle Alain Toubol. « Depuis 2015, nous avons vraiment concentré nos activités autour de la reconquête des centre-bourgs ». En 2016, suite à la création de nouveaux périmètres régionaux et avec l’apparition du Grand Est, l’établissement a lancé une réflexion sur son élargissement sur le périmètre régional. Un an plus tard, le président du Grand Est Jean Rottner et le préfet de Région Jean Marx ont relancé la dynamique.
« Une consultation a été lancée auprès des collectivités fin 2019 jusque mars 2020 dans la perspective d’une extension vers l’ex-Champagne-Ardenne ». Une extension validée et qui est devenue effective le 22 octobre 2020, l’EPF Grand Est comprenant depuis cette date les huit départements lorrains et champardennais.
UN OUTIL TECHNIQUE ET FINANCIER
Epernay est la première collectivité de la Marne, et même de l’ancienne Champagne-Ardenne à signer une convention de partenariat avec l’EPF le 22 décembre 2020.
« Le projet sparnacien est un sujet qui coche toutes les cases sur lesquelles l’EPF GE peut être utile », rappelle Alain Toubol. « Nous sommes ici sur un tissu urbain, sur une friche industrielle et ferroviaire de 13 hectares »
En matière de travaux, sur des friches comme celle d’Epernay l’EPF Grand Est peut assurer la maitrise d’ouvrage préparatoire à l’aménagement. Cela peut se traduire notamment par du désamiantage ou de la démolition de bâtiments qui n’ont pas vocation à être conservés, de la gestion de certaines pollutions, ou de la participation à la restauration et à la réhabilitation de l’enveloppe extérieure de bâtiments à rénover… « À Epernay par exemple, nous allons prendre en charge l’intégralité des coûts de désamiantage soit 2,2 millions d’euros », précise Alain Toubol.
« Nous sommes d’abord un outil technique, nous travaillons essentiellement en convention avec des collectivités et des organismes publics pour leur apporter tous les moyens et les compétences techniques dont nous disposons. Nous assurons aussi le portage financier, la collectivité se déchargeant sur nous de tout l’aspect technique et financier, ce qui lui permet de concentrer ses moyens sur ses projets », précise Alain Toubol, dont l’établissement est capable de signer des conventions avec des collectivités de toutes tailles, même les plus petites qui ne disposent pas de services techniques.
Etat des sols, état des bâtiments, relation avec l’Etat en terme de prescription environnementale… Dans la durée, l’EPF dispose de trois ressources principales qui sont la cession du foncier, la participation des collectivités et une fiscalité affectée : la taxe spéciale d’équipement qui est assise sur trois taxes locales (sur le foncier, sur le foncier non-bâti et le CFE) sur son périmètre d’intervention. Si pour le moment Epernay est la première collectivité de la Marne à travailler avec l’EPF, d’autres sont d’ores et déjà en contact avec l’établissement. Dans l’ex-Champagne-Ardenne également, plusieurs collectivités se montrent intéressées pour faire appel à l’EPF pour des projets de développement économique, d’habitat, de développement urbain ou de réhabilitation de friches d’activités. « Nous faisons partie de cette ingénierie publique locale pour travailler avec les collectivités sur leur développement, sur l’aménagement dans cet esprit très fort de sobriété foncière ». L’EPF réalise habituellement en moyenne une trentaine de millions d’euros d’actions foncières par an. Et en 2019, l’établissement a réalisé entre 21 et 22 millions d’euros de travaux sur son territoire d’intervention.
Un projet exemplaire à Epernay
La Ville d’Epernay a été la première de l’ex-Champagne-Ardenne à solliciter l’EPF Grand Est pour son projet de réhabilitation d’une friche industrielle sur le futur quartier des Berges de Marne.
Première collectivité hors Lorraine à bénéficier des services de l’EPF GE, la Ville d’Epernay s’était manifestée il y a longtemps déjà pour que l’établissement puisse intervenir sur les terres marnaises. « Cela fait 15 ans que je me bats pour qu’il y ait un EPF en Champagne-Ardenne », rappelle Franck Leroy, le maire d’Epernay, qui aura finalement été exaucé avec l’élargissement du périmètre d’intervention de l’EPF Lorraine en EPF Grand Est.
« L’EPF GE va assurer le portage juridique et financier de ce projet de reconquête d’une vaste emprise ferroviaire de 13 hectares en cœur de ville », poursuit-il. Fin 2020, la collectivité et l’établissement public ont donc signé une convention prévoyant que ce dernier aura pour mission d’engager « les moyens humains et financiers nécessaires à la mise en œuvre de l’action foncière et de reconversion de la friche SNCF, depuis la phase d’acquisition des biens fonciers ou immobiliers pendant la période d’études, de travaux et de gestion de ces biens et jusqu’à la rétrocession à la Ville ».
UN PROJET À 15 ANS
Pour le maire, la présence de l’EPF est un élément sécurisant dans le cadre d’un tel dossier. « Pour une ville de la taille d’Epernay (25 000 habitants, ndlr), c’est important d’avoir un partenaire qui dispose d’une telle expérience de réaménagement de friches à nos côtés et sur qui nous pouvons nous appuyer ».
Au regard de la taille de l’emprise (13 hectares sur un terrain de 18 hectares situé entre la gare SNCF et la Marne), la transformation du quartier pourrait s’étaler sur une durée de 12 à 15 ans, voire plus, souligne-t-on du côté de la mairie, qui a déjà défini la nature de la destination de cette emprise. « Cette année, nous allons élaborer un dossier de ZAC (Zone d’Aménagement Concerté) et les travaux de maîtrise d’œuvre concernant la passerelle qui va ouvrir ce quartier vers la ville. Puis nous allons concevoir un développement organisé de ce territoire », assure Franck Leroy. Ce dernier a en effet prévu de réaliser la construction de 275 à 325 logements, des commerces, services et activités (environ 13 000 m2), la construction de bureaux (environ 12 000 m2), des équipements publics et l’aménagement d’un parc urbain sur environ 3,3 hectares. « Il s’agira d’un Eco-Quartier qui dès sa conception sera pensé sous le prisme du développement durable et de l’urbanisme durable ».
Un quartier dont la première étape sera la réalisation d’une passerelle piétonnière et cyclable le reliant au centre-ville, en passant au-dessus des voies ferrées. Celle-ci sera conçue en 2021 par l’architecte Rudy Ricciotti, puis construite avant d’être définitivement installée en 2024.