Leçons d’une crise à une autre

Joseph Puzo

Joseph Puzo.

Joseph Puzo, Pdg d’Axon’Cable, entreprise spécialisée dans les solutions de câblage innovantes et de haute précision, a tiré les enseignements de la crise de 2008 pour affronter celle du Covid-19.

«Ce qui est essentiel c’est que l’on ne se soit jamais arrêté », avance d’emblée Joseph Puzo lorsqu’on lui demande la manière dont son entreprise a vécu les deux mois de confinement et la crise sanitaire. « Les entreprises qui ont fermé ont toutes eu des difficultés à reprendre leur activité ». Le Pdg du groupe Axon’Cable, basé à Montmirail (Marne) s’est souvenu de la violente crise économique de 2008 lorsqu’est apparue celle de mars 2020. « Pendant la crise de 2008, nous avions réussi un joli coup quand nos concurrents, principalement Américains, avaient licencié massivement. Nous avions alors choisi de prendre le contre-pied de cette stratégie, notamment au niveau commercial en participant à un salon par semaine. Dans les usines, nous avions fait changer le personnel d’atelier tous les mois, car nous pensions qu’au sortir d’une crise, les clients pourraient avoir des demandes différentes. Résultat : nous avions perdu 15% de notre chiffre d’affaires quand nos concurrents en avaient perdu plus de 20%. En matière de parts de marché, nous avions perdu 3% contre 7 à 8% de pertes pour nos concurrents ». Toutefois, la crise du Covid n’a pas produit les mêmes effets que celle de 2008 et faute de salons ouverts, Joseph Puzo a dû trouver d’autres solutions. Ses vendeurs ont décroché leur téléphone pour faire savoir que leur entreprise était restée ouverte.

« Par chance nous avons une filiale en Chine et nous avons pu nous inspirer de leur manière de gérer la crise. J’étais en février à Singapour et en rentrant j’ai imposé la distanciation et la prise de température de tous les salariés. À ma grande surprise ça a été très bien accepté », explique-t-il. Après avoir appris les propriétés « tueuses de virus » du cuivre, le Pdg a engagé l’achat de poignées de portes et de rubans en cuivre, mais aussi la mise à disposition de gel hydroalcoolique partout sur les sites.

L’entreprise a développé de manière conséquente les visioconférences au quotidien, au sein même du siège de Montmirail où les salariés sont répartis sur 7 bâtiments, mais aussi à l’international. « Nous avons aussi instauré un rendez-vous tous les mercredis à midi, ce qui est un horaire pas trop tardif en Chine ni trop tôt aux Etats-Unis. Cela a créé un esprit de groupe et a renforcé la cohésion des équipes ».

TALENTS D’INNOVATION EN INTERNE

« Des talents d’innovateurs sont aussi apparus dans l’entreprise », apprécie également le Pdg. « Il faut d’ailleurs que l’on préserve cette attitude d’innovation ». Masques, outils pour ouvrir les portes sans les toucher, visières fabriquées en imprimantes 3D… les équipes d’Axon ont non seulement été inventives, mais elles en ont fait profiter tout un écosystème. « Nous avons donné plus de 1000 visières. Dès le 15 mars nous avons aussi informé tous les services de santé au travail que nous donnerions plus de 1000 masques FFP2 que nous avions en stock au premier médecin qui irait en renfort à Mulhouse. Le lendemain, 9 médecins et une infirmière s’étaient déjà manifestés ».

Au niveau des résultats, Joseph Puzo s’avoue plutôt satisfait de la manière dont son entreprise a pour le moment passé cette période délicate. « Nous n’avons pas demandé le PGE. En terme de chiffre d’affaires, nous obtiendrons sensiblement le même que l’année dernière là où nous espérions enregistrer entre +5% et +10%. Pour nous, l’effet du Covid c’est : pas de croissance ». Une stagnation qui n’empêche pas Axon de poursuivre ses investissements. L’entreprise construit actuellement un nouveau bâtiment de 4500 m2, destiné à accueillir un site de production de câbles de très grande longueur pour l’industrie pétrolière et pour l’aviation. Joseph Puzo s’inquiète davantage de la faillite de certains de ses clients, qu’ils soient opérateurs mondiaux de déploiement de la 5G ou fournisseurs des activités automobiles et aérospatiales.

Parmi, les enseignements de cette crise, le chef d’entreprise en est certain : l’avenir est à la proximité. « Il faut relocaliser à portée de camion et non plus à portée d’avion. Même si cela prend un peu plus de temps, les marchandises par camion arrivent jusqu’à nous, alors que par avion c’est complètement bloqué. Pour nos clients en Europe, nous devons avoir une chaîne logistique en Europe ». Un vœu souvent formulé ces dernières semaines, que Joseph Puzo veut mettre en application, expérience (concluante) à l’appui.