Centre interdisciplinaire de formation en apprentissage à l’excellence professionnelle en Bourgogne Franche-Comté, l’École des métiers s’est lancée dans une totale refonte de son organisation et de ses formations, plaçant le numérique au cœur des nouvelles orientations.
«Cette crise sanitaire a eu un impact certain sur notre organisation et nous a demandé des efforts en matière d’adaptabilité et de souplesse », reconnait Alain Tomczak, directeur de l’École des métiers. Impliqué dans un projet de rénovation de son parc immobilier, l’établissement a su tirer des enseignements de cette période. « Nous avions préalablement étudié et travaillé sur la possibilité de mettre en place des cours à distance », confie le directeur de l’école, complété par le président de l’association de gestion de l’établissement, Christophe Le Mesnil : « Cela fait en effet trois ans que nous essayons d’embarquer tout le monde dans cette transformation. Nous l’avions d’ailleurs prévu dans le projet de rénovation, puisque dans les installations, nous allons sur des tendances très numériques avec des salles de théâtralisation en trois dimensions ».
Comme tous au printemps 2020, l’École des métiers a été contrainte de fermer ses portes et de renvoyer personnels et étudiants chez eux dès le mois de mars, se trouvant ainsi forcés d’accélérer les travaux de numérisation de ses formations. « Nous étions finalement quasiment prêts puisqu’en attendant la finalisation de nos outils numériques, en lien avec le service “Google for education”, nous avions même commencé à négocier avec la société parisienne Gowizyou pour faciliter l’appropriation de ces derniers en mettant à disposition du matériel et en proposant des formations », développe Alain Tomczak. Pour Christophe Le Mesnil, « le choix de Google n’est pas anodin, il a fallu qu’on choisisse une plateforme sur laquelle tout le monde était le plus à l’aise. Nous avions ainsi la possibilité d’avoir des outils utilisés et connus de tous ». Après avoir équipé les enseignants d’ordinateurs type tablette et formé l’ensemble de son personnel, administratif et enseignant, l’École des métiers a rapidement déployé les outils dela“classroom”,« unenvironnement qui nous permet d’activer un certain nombre de séquences pédagogiques à distance avec différents supports, de la visio-conférence à l’exploitation du partage d’écran, en passant par l’utilisation des outils informatiques permettant d’avoir le support de cours ».
OBJECTIF : 1.200 CHROMEBOOKS
Pour garder le contact, l’établissement en mis en place 156 “chats” (lignes de conversations), soit une par classe avec un régulateur, « pour permettre un lien direct entre les élèves et les équipes pédagogiques ». En complément des équipements mis à disposition des personnels, l’École des métiers s’est lancée dans un programme d’investissement pour équiper ses étudiants de Chromebooks. « Nous en avons déjà distribué 150, à destination prioritairement de nos classes de BTS, et nous travaillons sur un plan d’investissement pour compléter la distribution », explique le directeur de l’établissement. Dès la rentrée, 200 Chromebooks supplémentaires devraient être fournis, ces derniers pourraient être suivis de l’achat de 400 autres en 2022. Ce matériel sera ainsi mis à la disposition des élèves de l’École des métiers, qui en auront la responsabilité sur toute la durée de leur formation. L’objectif affiché par l’établissement est d’avoir à terme autant de Chromebooks que l’école compte d’étudiants, soit quelque 1.200. « Nous sommes en pleine amorce d’un travail d’hybridation de nos formations, annonce Alain Tomczak. Nous sommes conscients que nous ne pourrons pas mettre en place une formation à distance pour tout le monde sur des temps longs parce que ce n’est pas adapté pour tout. Mais il y aura inévitablement une part de formation à distance soit avec des outils dématérialisés, soit pour partie à distance parce que nos élèves ont les capacités intellectuelles de pouvoir se connecter et se débrouiller tout seul. Tout cela va forcément influer sur l’organisation globale des modalités de formation et d’évaluations ».
VERS UNE (R)ÉVOLUTION DES FORMATIONS
Au total, plus de 80 % des personnels de l’École des métiers ont été formés aux nouveaux outils entre mars et juin et en moyenne, plus de deux-tiers (70 %) des élèves se sont connectés régulièrement, selon les sections. « Nous nous sommes interrogés, dès la rentrée, sur notre organisation, explique Christophe Le Mesnil. Jusqu’à présent, nous évoluions selon un axe “école vers les jeunes”. Nous avons déplacé le paradigme pour tendre à l’inverse vers un axe “jeunes vers les professeurs”. À terme, l’objectif est de pouvoir proposer des cours où les élèves pourront être présents mais dispensés à distance, de quoi pouvoir parfois accueillir, plus simplement, des personnalités ». Quid de l’évaluation et de la pratique ? « Nous avons développé des outils d’évaluation avec “Google Forms”, ce qui a permis aux enseignants de mettre en place, à l’issue d’une séquence, une évaluation structurée avec une autocorrection. Cela a finalement permis de lever des interrogations et des doutes sur notre capacité d’organiser des évaluations à distance et les rendre objectives, concrètes et valables », observe Alain Tomczak. Alors que l’École des métiers est le centre interdisciplinaire de formation en apprentissage à l’excellence professionnelle en Bourgogne Franche-Comté, la pratique est l’apprentissage du geste reste essentiel. « Même si aujourd’hui, nous avons des outils numériques très poussés – comme en coiffure où nous sommes accompagnés par le quadruple champion du monde Raphaël Perrier – à un moment ou à un autre, le professeur est obligé de corriger le geste et de le montrer. C’est pour cela que nous avons réorganisé nos ateliers. Et même aujourd’hui, alors que nous avons un retour pratiquement à la normale des jeunes au sein de l’école, il y a encore quelques semaines, nous avions concentré les cours en présentiels uniquement sur la partie atelier, en condensant la partie pratique, soit environ 450 jeunes en roulement par semaine présents, tout en respectant le cycle des entreprises qui ont elles aussi rouvertes et qui ont d’autant plus besoin de nos jeunes », complète le président de l’association de gestion de l’École des métiers.
Pour un maintien de l’aide à l’embauche
Depuis le 1er juillet 2020, toute entreprise souhaitant recruter un apprenti peut bénéficier d’une aide à l’embauche. En effet, dans le cadre du plan “Un jeune, une solution”, le gouvernement a mis en place une aide exceptionnelle au recrutement des apprentis, pour tous les contrats conclus depuis le 1er juillet. « Les dernières annonces gouvernementales ont même reconduit ces aides jusqu’au 31 décembre », commente Alain Tomczak. Une bonne nouvelle pour le directeur de l’École des métiers qui confie accompagner les entreprises dans leurs démarches, « jusqu’à nous déplacer dans les entreprises pour apporter les contrats et documents que nous aurons préalablement préparés pour que le chef d’entreprise puisse les signer ».
DE 5.000 À 8.000 EUROS SELON L’ÂGE DE L’APPRENTI
Au total, les employeurs peuvent bénéficier d’une aide de 5.000 euros pour un apprenti de moins de 18 ans et de 8.000 euros pour un apprenti majeur, pour la première année de chaque contrat d’apprentissage conclu entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2021 préparant à un diplôme jusqu’au master (bac+5). Et ce, pour toute entreprise de moins de 250 salariés ou de plus de 250 salariés à condition qu’elle s’engage à atteindre un seuil de contrats d’alternance (3 % de l’effectif salarié total annuel au 31 décembre de l’année de référence) ou favorisant l’insertion professionnelle (5 % de l’effectif salarié total annuel au 31 décembre de l’année de référence) dans leurs effectifs. « Cette aide à l’embauche, qui existait déjà mais qui était supportée sans uniformité par les régions, nous a permis de maintenir nos effectifs l’an dernier, souligne Christophe Le Mesnil, président de l’association de gestion de l’École des métiers. Nous avons même observé une augmentation significative du nombre de contrats d’apprentissage… Il aurait été dommage de couper cet élan en ne renouvelant pas cette aide ».
En parallèle, si la crise sanitaire a pu rendre difficile la recherche de contrat, la réforme de la formation professionnelle permet aujourd’hui aux futurs apprentis de signer avec l’école un contrat dit “passerelle” pour leurs permettre de commencer les cours avant la signature de leur contrat d’apprentissage. « Nous avons signé une centaine de contrats et la région nous a accompagné sur les contrats non transformés (moins d’une dizaine) », observe Christophe Le Mesnil.