Le vent du changement souffle chez Airbus

De gauche à droite : Harald Wilhelm, directeur financier du groupe Airbus, Guillaume Faury, président d’Airbus Commercial Aircraft, et Tom Enders, PDG du groupe.

L’avionneur européen présentait le 14 février ses résultats financiers au sein de sa Leadership University de Toulouse.

Jeudi 14 février, dans la vaste salle de conférences de la Leadership University d’Air- bus, à Blagnac, la présentation des résultats financiers 2018 de l’avionneur a sonné comme la fin d’une ère. Celle de Tom Enders bien sûr, qui achèvera début avril son second mandat de président exécutif, pour laisser la place à Guillaume Faury, le président de l’aviation commerciale d’Airbus ; mais aussi, et peut-être surtout, celle de l’A380. Lequel, ce jour-là, a suscité la plupart des questions des journalistes de la presse nationale et internationale, à l’annonce officielle de sa fin.
Mais attention, a tenu à préciser l’encore président du groupe (jusqu’au 10 avril), « nous parlons de la fin de sa production en 2021, mais pas de celle du programme. Airbus continuera d’assurer le support des quelque 220 avions en opération, aussi longtemps que nos clients souhaiteront les faire voler », un horizon queTom Enders envisage au moins « jusqu’aux années 2030 ». Reste que, malgré sa réussite technique, le quadriréacteur signe, 12 ans seulement après son premier vol commercial, un échec. Aussi, a souligné Tom Enders, « que pouvions- nous faire d’autre ? C’est la bonne décision, il fallait l’arrêter, aussi douloureux que cela soit. Si on y mettait de nouveaux moteurs ou qu’on l’allongeait, on ne trouverait pas pour autant de nouveaux clients ! »

C’est pourquoi comme il se doit dans tout enterrement, la « famille Airbus » a- t-elle choisi, plutôt que de critiquer le défunt, d’axer sa communication sur les progrès techniques que le développement de l’A380 a apporté aux autres avions. Ainsi, pour Guillaume Faury, non seulement le gros-porteur « est l’avion préféré des passagers, mais sans lui, nous n’aurions jamais été capables d’achever l’A350, qui a eu un développement fantastique » et constitue aujourd’hui une plateforme là aussi « fantastique », en particulier la version « ultra-longue distance » mise en service l’an dernier, l’A350- 1000. Lequel a profité par exemple de l’expertise acquise en matière d’utilisation de la fibre de carbone sur l’A380, qui compose désormais 50 % de l’A350, en plus des améliorations technologiques pour le cockpit, les contrôles de pilotage et les systèmes automatisés. Pour le futur président d’Airbus, cela ne fait aucun doute : grâce à « tout ce qui a été appris grâce à l’A380 en matière de technologie, mais aussi de savoir-faire, d’outils et de moyens » l’A350 est un « succès fantastique » et devrait « prendre la tête » des produits de l’avionneur.

UNE BONNE ANNÉE 2018 POUR AIRBUS

Quant au coût financier de l’A380, Harald Wilhelm, le directeur financier a reconnu volontiers que « le programme a pesé sur les résultats de la compagnie, mais celle-ci et les autres résultats ont été assez forts pour absorber ce poids, pour le digérer », au point craindre, « la situation du cashflow étant très saine ». Effectivement, Airbus a présenté à cette occasion des chiffres plus que positifs « avec un niveau record de rentabilité grâce à une excellente performance opérationnelle, en particulier au quatrième trimestre », s’est félicité Tom Enders dans le communiqué de presse publié le 14 février. Le chiffre d’affaires consolidé pour 2018 a atteint 63,7 Mds€ contre 59 Mds€ en 2017 ; un résultat porté principalement par la livraison de 800 avions commerciaux (un « record », selon la compagnie) dont 20 A220, 626 avions de la famille A320, 49 A330, 93 A350 et 12 A380.

Tandis que la division Airbus Helicopters, elle, a livré 356 appareils contre 409 en 2017 : une entité qui pourtant, selon Tom Enders, « se porte bien et même gagne des parts de marchés dans le contexte d’un secteur en contraction depuis bientôt 10 ans. Ce qui est aussi dû largement aux commandes d’hélicoptères militaires comme des Super Pumas et le NH90 [qui équipe les forces de l’Otan] », le président d’Airbus se réjouissant de cette « croissance du marché militaire, qui est rassurante même si elle n’est pas spectaculaire ».

En 2018, Airbus Helicopters a réalisé un chiffre d’affaires de 5,9 Mds€ (-6 %), tandis qu’Airbus Defence & Space (ADS), qui développe des satellites et la nouvelle fusée Ariane 6, a réalisé plus de 11 Mds€ de CA (en croissance de 4 %). À noter, une prise de commandes de 8,4 Mds€ par ADS au cours de l’exercice fiscal 2018, dont un contrat pour la fourniture de 24 chasseurs Euro-fighter au Quatar, de quatre A330 MRTT ravitailleurs à l’armée française et de deux satellites de télécommunications. Au total, les prises de commandes consolidées en 2018 ont représenté 55 Mds€. Preuve de la confiance d’Airbus dans son avenir, un dividende d’1,65 € par action devrait être distribué aux actionnaires, en augmentation de 10%.