Le Stade de Reims s’inscrit dans la durée

Auteur de 10 buts l'an passé, Rémi Oudin (22 ans) est un joueur qui présente une forte valeur marchande potentielle et pourrait quitter le club avant la fin du Mercato.

Après une saison 2018-2019 ponctuée par une magnifique huitième place en championnat, les compteurs sont remis à zéro pour le Stade de Reims qui débute une nouvelle aventure en Ligue 1 Conforama.

«L’expérience et les années aidant, après 16 saisons à la tête de ce club, on a forcément plus de sérénité et de recul pour aborder les nouvelles saisons », admet Jean-Pierre Caillot. « C’est un championnat que l’on connaît, avec un club que l’on connaît sur le bout des ongles, un staff inchangé et effectif que l’on a choisi, donc on se prépare dans les conditions que nous avons mises en place au fil des années. Mais dans le football, il ne faut jamais avoir de certitudes ». Pour le président rémois la différence principale entre le monde du football et celui de l’entreprise qu’il maîtrise (il dirige les Transports Caillot, 1000 collaborateurs, première flotte de Champagne-Ardenne, NDLR) se situe entre deux exercices comptables : « L’avance que l’on avait l’année précédente ne sert à rien puisque les compteurs de toutes les équipes repartent de zéro. On a malgré tout engrangé de la confiance et de l’expérience ».

Une confiance que le président et son staff ont mis dans le groupe de joueurs de la saison passée puisque l’effectif qui a battu le PSG (3-1) lors de la dernière journée le 24 mai dernier est sensiblement celui qui redémarrera l’exercice 2019-2020 le 10 août prochain à Marseille.

Et en matière de football comme en entreprise, il faut savoir réaliser des investissements pour se donner les moyens de réussir. D’où une évolution progressive de la politique du club en la matière au cours des dernières saisons. « Pour ne pas revivre les mêmes moments de lutte pour le maintien que les années précédentes nous avons investi, structuré le club, créé un centre de vie… », précise le président. A la faveur de droits TV en progression, bonifiés par ses bons résultats sportifs lors de la saison 2018-2019, le club a vu son budget repartir à la hausse. « Nous avions un budget 2018 à hauteur de 40 M€, construit sur la base d’une 14e place au classement. Nous étions donc à l’équilibre à 40 M€ et nous avons fini l’année à 42 M€ grâce à notre 8e place au classement. Cette saison, il sera supérieur, compris entre 45 et 50 M€, avec notamment un trading (vente, NDLR) de joueurs qui nous rapporte 18M€».

PAROLE ET TREMPLIN SPORTIF

Dans sa politique managériale, Jean-Pierre Caillot a volontairement choisi de ne pas proposer de bonus ou de primes au maintien à ses joueurs. Un pari qui se joue dès le recrutement et qui mise inversement sur des primes basées sur les meilleurs places au classement. « Résultat : les joueurs qui viennent chez nous ont un autre état d’esprit puisqu’ils ne viennent pas jouer le maintien mais autour de la dixième place ».

Outre sa gestion revendiquée (et validée chaque saison par la DNCG, le gendarme financier du football français) de bon père de famille, Jean- Pierre Caillot met un point d’honneur à respecter ses engagements dans un milieu où joueurs, coaches et dirigeants ont parfois appris à s’en affranchir pour mieux négocier. Quitte parfois à laisser filer un pilier de l’équipe. C’est ainsi qu’il a géré le cas du défenseur Bjorn Engels. Ce dernier est arrivé à Reims à l’été 2018, à la condition de pouvoir rejoindre la Premier League anglaise à l’issue de la saison si l’occasion se présentait. « Nous lui avions promis qu’il bénéficierait d’un bon de sortie si un club anglais se présentait avec une offre intéressante », rappelle le président.

Le géant belge est donc parti cet été à Aston Villa contre 9 M€ plus bonus, soit le double de son prix d’acquisition un an auparavant, permet- tant au club de réaliser une plus-value intéressante. « Sportivement nous ne souhaitions vraiment pas qu’il parte, mais nous avions pris cet engagement avec lui. Ces exemples nous permettent d’envoyer un message fort aux joueurs et aux agents. Quand ils viennent chez nous ils savent qu’ils viennent dans un club moyen dans la hiérarchie française mais il savent aussi qu’il leur servira de tremplin et que leurs dirigeants ont une parole ».

DOSSIERS EN COURS

Troisième plus ancien président de Ligue 1 à la tête de son club, derrière Jean-Michel Aulas (Lyon) et Olivier Sadran (Toulouse), Jean-Pierre Caillot sait aussi que cette ancienneté dans la gouvernance rassure les professionnels dans un monde du football très fluctuant.

Côté sportif, pour la saison 2019- 2020, le club a choisi de ne pas reconduire certains joueurs en fin de contrat (Martin, Chavarria, Carrasso), d’en laisser filer d’autres (Engels, Fon- taine) et d’en recruter de nouveaux (Rajkovic, Munetsi, Brahimi). La priorité ayant été de tenter de conser- ver l’ossature d’un groupe qui a donné entière satisfaction avec des contrats sécurisés entre janvier et l’intersaison (Romao, Mendy, Abdel- hamid).

Préparé à l’éventualité de voir par- tir son attaquant Rémi Oudin et son gardien de but Edouard Mendy, tous deux très sollicités, le club a rapidement travaillé à leur éventuel remplacement. En recrutant concrètement un gardien de haut niveau (Rajkovic) et en se positionnant d’ores et déjà sur des dossiers en attaque, au cas où, en fin de mercato… (le 2 septembre, en France, NDLR). Pas question toutefois de les laisser partir à n’importe quel prix, insiste Jean-Pierre Caillot, qui a déjà refusé quelques offres jugées insuffisantes.

LE PLEIN D’HOSPITALITÉS

Outre les droits TV et le trading, le Stade de Reims établit son budget à partir de la commercialisation de ses hospitalités (Loges, espaces VIP, etc.), du sponsoring et de la billetterie. Celle-ci représente environ 10% du budget (4 M€ par an). Lors de la saison 2018-2019, le club a enregistré une moyenne de 14 341 spectateurs par match (pour une capacité commerciale de 20 546), ce qui constitue la troisième affluence historique à Reims. Quant aux hospitalités (7 M€), elles sont alimentées par quelque 350 partenaires, entreprises et institutions. « Nos partenaires sont fidèles, avec un taux de renouvellement d’une année sur l’autre de l’ordre de 90 à 95%. C’est une très grande satisfaction pour nous. En terme d’hospitalités, nos objectifs sont atteints et il nous est difficile de faire mieux dans la configuration actuelle du stade ». Pour le président Caillot, seule une modification d’Auguste Delaune pourra permettre d’améliorer ces résultats : « Nous sommes dans un des rares stades de Ligue 1 à proposer 5% de sa capacité pour les hospitalités alors qu’il nous en faudrait 10%. Nous réfléchissons à des solutions pour modifier les conditions d’accueil de l’équipement et nous avons engagé des discussions avec la municipalité à ce sujet ».

Le principe serait de diminuer la jauge de 2 000 places afin de libérer de l’espace pour améliorer le confort des abonnés, des spectateurs et des partenaires, sans pour autant augmenter les tarifications. « Comme tous les organisateurs de spectacles nous devons accueillir le public dans de meilleures conditions », poursuit Jean-Pierre Caillot qui, dans la perspective de l’augmentation croissante des droits TV, pourrait provisionner 25 millions d’euros pour prendre en charge de tels travaux.

Un projet en gestation qui se décline à long terme pour un club qui inscrit lui aussi son avenir dans un destin au long cours.

LES FILLES DANS L’ELITE

Alors que les garçons brillent en Ligue , la section féminine du Stade de Reims n’est pas en reste. « Les filles nous ont fait le bonheur de remporter le titre de Championnes de Ligue 2 l’année où Reims a accueilli la Coupe du Monde féminine », apprécie Jean-Pierre Caillot. Si le foot féminin jouit d’une bonne image il doit encore faire ses preuves au niveau économique, que ce soit au niveau des droits TV, du sponsoring ou du public. Ce qui n’empêche pas le club de lui consacrer un budget annuel d’1,5 million d’euros (hors investissement).