Le spécialiste du tube invente le ralentisseur anti-intrusion

Christophe Gonzalez, pdg de Dalitub.

L’entreprise familiale Dalitub est spécialisée dans la réalisation de tubes en acier, alu et inox depuis 50 ans. Une activité de sous-traitance mise en danger par une tendance toujours plus forte à la délocalisation de la production opérée par leurs principaux clients du secteur automobile. Une crise qui aurait pu voir la PME jurassienne, qui emploie une quarantaine de salariés, disparaître… C’était sans compter sur l’idée révolutionnaire de son dirigeant Christophe Gonzalez : la création du premier ralentisseur anti-intrusion capable de résister au choc d’un véhicule-bélier de 7,5 tonnes lancé à 50km/h.

Chez Dalitub on manie le tube en acier, inox et aluminium en sections rondes, carrées ou rectangulaires… depuis plus de 50 ans. Mais aujourd’hui, ce qui vaut à l’entreprise familiale, basée à Saint-Claude dans le Jura, de faire la Une du journal télévisé régional, se situe aux antipodes de cette activité de sous-traitance. Il s’agit d’un dispositif unique de mobilier urbain de sécurité : le premier ralentisseur anti-intrusion capable de protéger tous types de voies de manière rapide, flexible et sûre. Il ne s’agit toute fois pas d’un coup d’essai en matière de diversification pour l’entreprise demi-centenaire. Pour preuve, c’est comme fabricant de fume-cigarettes, que la société, créée en 1943, se fait d’abord un nom dans la capitale de la pipe. Puis, l’évolution de ce marché atypique amène une réorientation de l’activité de Dalitub vers un nouveau domaine qu’elle ne quittera plus, le travail du tube. En 1960, c’est le boom du formica et des tables aux pieds tubulaires métalliques, Dalitub y voit une opportunité de vendre des meubles. Évoluant aux gré des opportunités, la PME réalisera les sièges de la patinoire et de la tribune officielle pour les Jeux Olympiques d’hiver de Grenoble en 1968. Dans les années 1970, elle fabrique pour Peugeot Cycle des fourches pour mobylettes. Une activité qui lui ouvre ensuite les portes de la sous-traitance automobile. « À cette époque, même si nous avions d’autres clients comme Décathlon ou Ikéa, le secteur automobile, avec ses très grosses séries, représentait la plus importante part de notre chiffre d’affaires. En 2000, nous avons réalisé « un bon coup” avec l’arrivée de la Renault Dacia. Personne ne croyait au concept de voiture low-cost. Ainsi, aucun des gros sous-traitants du secteur n’a souhaité tenter l’aventure. Nous y sommes allés et là où nous avions pressenti une production de 7.000 pièces par mois, nous sommes montés à 40.000 pièces par semaine ! », raconte Christophe Gonzalez, actuel pdg de Dalitub. L’aubaine sera cependant de courte durée. À partir de 2010, le changement de politique des constructeurs automobiles qui vise à produire de plus en plus dans les Pays de l’est, fait chuter dangereusement le chiffres d’affaires de la petite entreprise,qui emploie une quarantaine de personnes. « Il nous a fallu trouver de nouvelles solutions, s’orienter vers d’autres métiers liés à l’activité de fabrication des tubes.Le pari était de se concentrer sur les moyennes et petites séries, tout en proposant une prestation complète autour du tube : tronçonnage, découpe laser, cintrage, peinture ou encore soudage… Sur cette dernière activité, en plus d’une réalisation robotisée, nous avons réintégré un atelier manuel pour des travaux de grande précision», évoque le pdg. Par ce virage vers la prestation « tout compris » et « sur-mesure», l’entreprise retrouve un second souffle. « Nous restions toutefois soumis aux « lois” de la sous-traitance qui ont tendance à favoriser une logique de prix toujours plus bas. Le seul moyen de nous « libérer” était de sortir une gamme de produits à notre marque, explique Christophe Gonzalez. L’idée du mobilier urbain est venue assez vite, nous avions déjà réalisé pour la ville de Saint-Claude des barrières pour un parc qui avaient beaucoup plu. Les attentats et la demande grandissante de sécurisation des évènements nous ont orientés vers un dispositif de protection ».

BIENTÔT CUSTOMISABLE

Christophe Gonzalez a alors l’idée géniale d’imaginer un système de barrières pliantes qui viendraient se glisser sous un ralentisseur. Il réalise un cahier des charges des attendus pour ce type de produit avec les policiers municipaux, les pompiers et les agents de la ville jurassienne. S’en suit plusieurs prototypes et deux crash tests pour, qu’enfin, le premier ralentisseur anti-intrusion de la marque Dalitub soit officiellement breveté le 6 mars 2018. L’intérêt est immédiat, au point de pousser Christophe Gonzalez à étendre son brevet à certains pays dans le monde (Allemagne, Italie…), où des opportunités de marchés sont susceptibles de voir le jour. « Nous avons obtenu le deuxième prix – dans la catégorie prévention, sécurité – aux trophées 2018 du salon des maires de France : c’est juste magique ! On vit une aventure passionnante ». Il faut dire que l’objet a plus d’un atout pour séduire. Composé de modulesde95centimètres de larges emboitables et lourds de 500 kilogrammes (empêchant tout déplacement),le dispositif se pose au sol sans génie civil. « La pose est facile et rapide. Il ne faut qu’une demi-heure pour former un rempart de cinq mètres de large ». Ce ralentisseur peut être installé en amont de la manifestation ou laissé en place entre deux évènements. Il ne nécessite aucun contrat de maintenance et aucune mobilisation de personnel pendant les manifestations, les policiers peuvent se concentrer sur leurs missions de police et ne plus jouer les gardes-barrière. Une barrière justement, qui se ferme en quelques instants au moyen d’une clé dont disposent les personnels autorisés (pompiers, police…). Cette liste de qualités non exhaustives a déjà séduit des villes comme Saumur en Maine-et-Loire, Palavas-les-Flots dans l’Hérault, Mulhouse dans le Haut-Rhin, Lens dans le Pas-de-Calais. Une commande a également été passée avec le groupe Disney pour sécuriser l’accès du village nature Pierre et Vacances-Center Parcs de Marne-la-Vallée. « Pour la suite,nous allons travailler avec un designer pour customiser nos ralentisseurs afin qu’ils se fondent dans le paysage urbain. L’objectif est qu’ils ne soient plus perçus comme des dispositifs de sécurité par les piétons et qu’ainsi ils perdent leur côté anxiogène ».

Site web: dalitub.fr