Thierry PicardLe salarié de L’Echappée

Thierry Picard devant l’élément central de l’équipe Groupama-FDJ.

Membre du staff de l’équipe cycliste Groupama-FDJ, l’Ardennais Thierry Picard sera une nouvelle fois au départ du Tour de France le 29 août à Nice en tant qu’assistant sportif.

Le luxueux bus de Groupama-FDJ n’est plus garé depuis quelques semaines sur la plaine du Mont-Olympe à Charleville-Mézières.

Longtemps retardée par la crise sanitaire, la saison cycliste sur route a enfin commencé et Thierry Picard, le chauffeur attitré et emblématique de l’équipe française, a repris la route et ses habitudes en participant notamment au stage de préparation dans les Alpes au Grand Bornand avant de mettre le cap sur Nice pour le départ du Tour de France. Né dans le quartier de Montcy-Saint-Pierre, cet Ardennais de 62 ans est passé par le lycée professionnel du Bois-Fortant pour faire son apprentissage en maçonnerie et décrocher un CAP.

« Ce diplôme m’a ensuite permis d’entamer ma carrière dans le bâtiment en intégrant l’entreprise familiale dirigée par mon père, Maurice, qui employait 120 salariés. C’est là que j’ai appris les rudiments du métier avant d’encadrer de grands chantiers de construction en béton armé dans la région parisienne où j’ai vécu dix ans tout en revenant le week-end dans les Ardennes ».

RECONVERSION PROFESSIONNELLE

Durant ses moments de loisirs, Thierry passe l’essentiel de son temps sur le vélo. Licencié dès l’âge de 14 ans à l’UVCCM, alors chapeautée par Pierre Sylva, celui qui avait auparavant joué au foot à l’AS Mohon-Montjoly enchaîne les courses en cadets, juniors et première catégorie. Considéré comme un bon rouleur, il se taille un joli palmarès et remporte une soixantaine d’épreuves en courant jusqu’à 47 ans, dont un titre de champion de Champagne vétérans et une épreuve de première catégorie dans le Nord.

« C’était un coureur posé dans tout ce qu’il faisait, stylé et qui avait beaucoup d’allure. Il faisait partie d’une génération qui était alors dominée par Philippe Miotti. Je me rappelle qu’il avait pris part au Circuit des Ardennes en 1978 » se souvient Michel Perpète, ancien journaliste sportif à L’Ardennais.

Cette passion pour la petite reine finira par le rattraper quand son père décidera de partir en retraite. « Avec mes deux frères, Michel et Patrick, on lui a un moment succédé avant de revendre nos parts. J’ai alors décidé de changer complètement d’existence».

En 2002, par le biais de son ami Frédéric Gabriel, cycliste professionnel, il a en effet, l’opportunité de remplacer au pied levé le chauffeur du groupe Saint-Quentin-Oktos pour un déplacement au Portugal.

« Je n’ai eu aucun problème pour m’adapter à ma nouvelle mission dans la mesure où j’avais déjà manié des engins de travaux publics et passé différents permis dont celui de conducteur de bus. J’ai donc mis le pied à l’étrier dans ce milieu en m’y sentant tout de suite bien. Ensuite, tout s’est enchaîné positivement ». Il rejoint par la suite Frédéric Gabriel au sein de l’équipe Landbouwkrediet avant de rejoindre l’équipe Cofidis en 2007.

« Le patron de l‘époque, Eric Boyer, m’avait enrôlé pour le Tour d’Espagne et quatre jours plus tard, il m’a embauché définitivement comme chauffeur-mécanicien afin de finir la saison. J’y suis finalement resté deux ans ».

ASSISTANT SPORTIF CHEZ GROUPAMA-FDJ

En 2009, Thierry Picard est contacté par Marc Madiot, Manager de Groupama-FDJ et président de la société de gestion L’Echappée, pour devenir assistant sportif.« En fait, je suis appelé à remplir une triple fonction : chauffeur, masseur du leader et chargé de sa sécurité au départ comme à l’arrivée des courses. Je fais, en quelque sorte, office de garde du corps pour le protéger et l’aider à se frayer un passage dans la foule ».

Entre les stages de préparation, les classiques, les championnats, les trois principaux Tours (la Grande Boucle, le Giro et la Vuelta) mais aussi la saison hivernale de cyclo-cross, Thierry est occupé en temps normal plus de 180 jours dans l’année.

En sillonnant depuis 18 ans la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie, l’Espagne, la Tchéquie, la Slovaquie mais aussi l’Angleterre, l’Australie, les Etats-Unis, le Canada et la Chine, il a beaucoup voyagé.

En étant toujours proche et à la disposition des stars françaises de la discipline : Sylvain Chavanel qui a participé à 18 tours de France, Sandy Casar, Thibaut Pinot, troisième et meilleur jeune du Tour en 2014, David Gaudu, les sprinters Arnaud Demare et Nacer Bouhani et le Suisse Stefan Küng, troisième du dernier championnat du Monde en Angleterre.

UN MÉTIER À PART ENTIÈRE

« Durant la journée, il faut aussi faire l’entretien du bus, s’occuper des itinéraires, préparer les boissons de récupération et les collations, assurer les transferts de bus entre le point de départ et le lieu d’arrivée en empruntant une autre route que celle de la course puis du parking coureurs à l’hôtel. Ensuite, c’est l’heure du massage avant de s’occuper du linge des coureurs. Il s’agit d’un métier à part entière, exigeant et particulier, nécessitant une organisation sans faille. On n’a pas droit à l’erreur. C’est un peu une vie de nomade mais moi qui voulais garder le contact avec ce milieu, je mesure la chance que j’ai de vivre cette aventure. Beaucoup de gens rêveraient d’être à ma place ».

Et au cœur de ce dispositif, il y a un mastodonte de plus de 14 mètres de long qui est le lieu de vie des forçats de la route de la WorldTeam. Un sanctuaire fonctionnel pourvu de huit sièges, d’un espace cuisine avec trois frigidaires, un réchaud, un micro onde, des machines à café et à glaçons et équipé aussi de six écrans de télévision, une table de massage, deux cabines de douches et des lieux de rangement pour leur équipement (casques, gants, chaussures). Ce vestiaire ambulant comporte aussi un salon de débriefing pour les directeurs sportifs où on parle de stratégie de course. Seuls les sponsors sont parfois autorisés à pénétrer dans ce vaisseau amiral escorté durant les grandes échéances de six voitures et de camions-ateliers.

Quand il n’est pas aux premières loges dans cet univers, Thierry Picard qui a déjà passé près de 50 ans de son existence dans le cyclisme baigne encore dans le milieu au contact, cette fois, de ses deux gendres : Francis Mourey, titré dix fois champion de France de cyclo-cross, et Mathieu Simon, dernier vainqueur ardennais du Circuit des Ardennes.

Parcours

1958 Naissance le 16 mai à Charleville-Mezières.
1972 Première licence cycliste à l’UVCCM.
2002 Devient chauffeur de l’équipe Oktos.
2007 Rejoint l’équipe française Cofidis.
2009 Embauché par Marc Madiot pour renforcer le staff de Groupama-FDJ.
2020 Au départ du Tour de France, le 29 août à Nice.