Il a grandi aux sons des perceuses à couronne. Sa passion pour la mécanique l’a amené à créer son propre garage à Talant. Sa spécialité ? La restauration de voitures anciennes, avec un petit faible pour les anglaises.
Si vous vous êtes promenés dans les allées du Salon Auto Moto Retro, à Dijon, le dernier week-end de mars, vous n’avez pas pu passer à côté du stand Retro Performance. Pour son premier salon, Pierre Rougeux a vu grand : 200 mètres carrés de surface, 16 voitures dont neuf sur son stand. « Nous ne nous attendions pas à autant de retombées. Notre site internet est passé de 2 000 visites par jour à 6 000 ! », confie le garagiste. À Talant, il est passé de 150 mètres carrés à 450, afin de faire face à la demande qui afflue de toute la France, voire des pays frontaliers. Sur le parking trônent plusieurs Minis de toutes les époques, une Triumph, une Rolls Royce, plusieurs 2 CV… et autant d’histoires à raconter. Un véritable voyage dans le temps… Le paradis des voitures anciennes ! Cherchez l’intrus ? Le camion Picole, « la mascotte du stade dijonnais » aux couleurs de la Police – anagramme de Picole – Il paraît que c’est dans ce camion que les rugbymans organisaient la fameuse troisième mi-temps. La mission du garagiste est de le remettre en état afin qu’il puisse « rouler comme un véhicule normal », c’est-à-dire changer le moteur, en passant d’un six volts à un 12 volts. « Nous sommes très peu à proposer la révision complète de moteurs anciens. Changer un moteur par un autre, tout le monde peut le faire ! Mais ouvrir un moteur, analyser son état et préconiser des réparations, c’est plus rare », explique Pierre Rougeux. Tombé dans la marmite de cambouis quand il était jeune, Pierre Rougeux a appris à bricoler auprès de son grand-père. Celui-ci était professeur de mécanique au lycée Gustave Eiffel à Dijon. « Je me souviens avoir fait mes premiers pas en mécanique sur une vieille Citroën BX qui lui appartenait », confie-t-il.
UNE FORMATION À LA SUISSE
Passionné par la mécanique, le jeune homme se lance dans l’apprentissage dès 14 ans. Il décide de partir étudier en Suisse. « Les formations helvétiques sont vraiment de qualité. Nous étions 15 élèves par classe et nous apprenions chacun sur un moteur », précise-t-il. Durant cinq ans, le jeune apprenti se forme chez Audi-Volkswagen, avec un contrat en alternance. À son retour en France, il décide de créer un camion itinérant : Domécanique. Celui-ci se déplace directement au domicile des gens, pour toutes les pannes courantes, type vidange ou changement de pneus. Le succès est immédiat. « En deux ans, j’avais rentabilisé mon camion », assure-t-il. C’est bien connu : plus vous réussissez, plus les concurrents remarquent et réagissent. « En quelques mois, nous étions cinq camions à tourner sur Dijon. Le problème est que certains faisaient du mauvais travail. Ils laissaient, par exemple des tâches d’huile au sol, devant le domicile du client », se souvient l’entrepreneur. La clientèle a fini par ne plus faire appel à ce type de service. Qu’importe, la réputation de Pierre Rougeux était faite : enfin un garagiste fiable, méticuleux, et passionné par son métier. En 2015, il ouvre un premier garage à Talant. Le jeune homme se retrouve vite dépassé face à la demande. Il faut trouver un espace plus grand. En 2017, Retro Performance s’installe 8 rue de Nachey. Passionné par « le charme à l’anglaise » des Minis, le jeune garagiste se fait rapidement une réputation dans le domaine de la réparation de voitures anciennes. Il faut dire qu’il ne compte pas ses heures. « Je travaille 120 heures par semaine mais je ne les vois pas passer », souligne-t-il. Le dirigeant de Retro Performance peut passer 10 heures sur une voiture pour faire tourner un volant. De nature très têtu, il ne lâchera pas ses outils tant qu’il n’aura pas trouvé la solution.Vous l’aurez compris, Pierre Rougeux est animé par sa passion pour les voitures anciennes. Une passion qui surfe justement sur la tendance du marché pour le rétro.
LA TENDANCE DU RÉTRO
L’engouement pour ces véhicules qui provoquent une certaine nostalgie d’une époque passée, symbole de liberté, a repris depuis une dizaine d’années, notamment après la crise de 2008. Les investisseurs du monde entier se sont tournés vers des valeurs moins risquées et plus rentables que les actions ou les fonds souverains, recherchant à la fois des placements lucratifs et défiscalisés. Les objets d’art ont profité de ce glissement. Et le prix des toiles de maître et d’autres biens de ce genre, ont littéralement flambé. Les voitures anciennes, dites de collection – la Fédération internationale des véhicules anciens (FIVA) considère comme véhicule de collection les voitures ayant plus de 30 ans, donc aujourd’hui antérieures à 1989 – appartenant à la catégorie des biens non imposés, ont rapidement attiré les acheteurs désireux de réaliser des plus-values substantielles. Elles ont conduit les amateurs les plus fortunés à enrichir leurs collections de modèles leur permettant de concilier leur passion avec une démarche de placement sûre. L’engouement pour les voitures anciennes touchant dans le même temps, de plus en plus d’adeptes et générant une économie de services et de loisirs dédiés à la pratique de l’automobile de collection – à l’image du projet Vintage Bel Air à Beaune qui s’apprête à donner un nouvel élan à la station éponyme et à contribuer à la revitalisation de la fameuse Nationale 6, qui reliait Paris à Lyon, à l’époque des « Trente Glorieuses » – le phénomène s’est développé dans un contexte d’offre et de demande abondante.
À titre personnel, Pierre Rougeux souhaiterait restaurer une Mini en mode « rallye de Monte-Carlo ». Un rêve de gamin ! Dans ses yeux, une lueur brille, il revit cette époque où la Mini était la reine de la course et gagna cinq fois de suite ce grand prix. Il me raconte ce qui a fait son succès : « C’est John Cooper, préparateur de moteurs, qui a introduit un moteur plus puissant dans les Minis jusque-là réduites au simple statut de petites citadines, pour en faire de véritables voitures de course. D’où le nom des Minis Cooper ».