Le projet d’implantation de Cevital sérieusement compromis

Issad Rebrab au côté d’Emmanuel Macron, le 7 novembre 2018.

Près de deux ans se sont écoulés depuis l’annonce de ce grand projet industriel sans que le milliardaire algérien Issad Rebrab ait confirmé l’implantation de Cevital dans l’enceinte de la fonderie PSA des Ayvelles.

En novembre 2018, c’est en grande pompe et aux côtés d’Emmanuel Macron que le patron du puissant groupe algérien dévoile son intention d’implanter une usine spécialisée dans les équipements de traitement et de purification de l’eau. À la clé, 250 millions d’euros d’investissements et la création de 1 000 emplois. Du jamais vu dans les Ardennes.

DES MACHINES À L’ARRÊT

Depuis, ce dossier qui avait enthousiasmé beaucoup de monde et généré beaucoup d’espoirs est resté à l’arrêt. Pire : l’intention de rachat du bâtiment de PSA par Cevital pour deux millions d’euros est restée lettre morte. Et le site mis à disposition pour permettre l’arrivée de Cevital est désormais désert après que les premières machines installées ont elles aussi, été mises à l’arrêt. Avant d’en arriver là, le doute s’était déjà installé suite à plusieurs zones d’ombre ayant sérieusement compromis l’avancée du projet. À savoir, le départ du directeur de site, l’incarcération en Algérie, durant huit mois puis la condamnation d’Issad Rebrab pour infraction à la législation sur les mouvements de capitaux, la difficulté à lever les fonds nécessaires, ce qui a amené BpiFrance à refuser de s’engager dans un projet dénué de fonds propres suffisants. Ce contexte rend de plus en plus sceptiques les observateurs et les représentants du monde économique, lesquels s’efforcent ou font mine d’y croire encore.

« Qui n’avance pas, recule », constate Géraud Spire, le président de la chambre de commerce et d’industrie des Ardennes qui reconnaît être sevré d’informations nouvelles depuis la libération d’Issad Rebrab en Algérie. « Plus aucune réunion n’a lieu pour traiter de ce dossier. Il semble que Monsieur Rebrab ne puisse plus faire circuler ses capitaux à l’étranger aussi facilement que par le passé. Et plus on tarde, moins il y a de chance de concrétisation. L’espoir risque de s’amenuiser au fil du temps. En plus, compte-tenu des sommes liées à l’exécution de ce projet d’ampleur, la situation actuelle de l’économie après la propagation du Covid-19 n’arrange pas les choses et n’est pas en mesure de susciter la confiance ».

« PLUS DE NOUVELLES DU DOSSIER »

Lionel Vuibert, secrétaire de l’UIMM, qui avait participé à l’accueil d’Issad Rebrab le 7 novembre 2018, n’est pas non plus optimiste. Dubitatif, il reconnaît d’ailleurs « ne plus avoir la moindre nouvelle de ce dossier depuis plusieurs mois ».

« Je ne peux donc pas vous en dire plus. Depuis les difficultés rencontrées par M. Rebrab en Algérie, c’est quasiment silence radio. Ça ne va certes pas dans le bon sens mais le projet n’est peut-être pas pour autant abandonné. Je vais donc faire preuve d‘optimisme et m’efforcer de croire que ce projet n’est que suspendu et qu’il finira par reprendre son cours. » Ayant accompagné ce dossier, Jean-Louis Amat, directeur de l’agence de développement économique, évoque une « situation de blocage ». « On n’a plus grand-chose à dire sur ce projet car il ne se passe plus rien. L’Etat nous avait un moment relayés pour mettre la main sur ce dossier afin de trouver les financements nécessaires à sa réalisation. Mais les organismes tels que la BpiFrance n’étaient pas en mesure de faire bouger les choses si l’apport de l’investisseur n’était pas assez conséquent. Compte- tenu de mon rôle de développeur économique, je veux rester confiant, mais il n’y a aucune notification officielle qui laisse croire à une reprise des négociations. » L’espoir est donc ténu et beaucoup d’acteurs économiques pensent que ce projet est désormais tombé à l’eau.

Jean-Sébastien Lamontagne, le préfet des Ardennes, ne parle pas pour autant de remise en cause et de retrait du projet : « Nous restons évidemment en contact et à l’écoute des porteurs du projet car nous avons toujours la volonté d’accompagner la mise en œuvre de ce dossier sur le terrain. Pour le moment, ce projet ne s’est pas concrétisé puisque le business plan présenté n’a pas été validé par l’ensemble des différents financeurs concernés. À ma connaissance, les discussions se poursuivent. Mais on ne peut nier que ce dossier a pris du retard. Il y a toutefois encore un bon espoir de le mener à bien