Le pari toujours recommencé des labellisations

La carte des pôles de compétitivité où figurent ceux qui ont obtenu une reconduction pour 4 ans de leur labellisation, et ceux pour lesquels celle-ci n’est valable qu’un an.

Le Premier ministre vient de labelliser 56 pôles de compétitivité pour la phase IV de l’action de ces structures, qui couvre la période 2019-2022. Ces acteurs de l’attractivité et de l’innovation doivent compter avec un contexte mouvant pour conserver le soutien financier étatique, voire européen. En Bourgogne Franche-Comté, ils sont quatre.

Les pôles de Franche-Comté compétitivité conservent leur poids et leur pertinence au sein de l’attractivité économique française.Voilà quinze ans qu’ils figurent dans le paysage, avec des fortunes diverses mais, surtout, des évaluations régulières destinées à renouveler ou non leur labellisation gouvernementale. C’est ce qui vient de se produire à nouveau, début février. Édouard Philippe, le Premier ministre, a révélé la liste des 56 pôles de compétitivité dont la labellisation a été actée pour une phase IV couvrant la période 2019-2022. Ceci consécutivement à un appel à candidature lancé par le gouvernement en juillet dernier, en lien avec les Conseils régionaux. Sur les 56 pôles labellisés, 48 le sont pour une durée de quatre ans, et 8 autres pour une durée d’un an prolongeable à quatre ans sous certaines conditions (voir encadré ci-dessous). En Bourgogne Franche-Comté, quatre pôles de compétitivité sont présents et au sortir de cette nouvelle labellisation, trois repartent pour un cycle de 4 ans (le pôle Véhicule du Futur basé à Étupes, près de Montbéliard, dans le Doubs, le pôle Vitagora goût-nutrition-santé, basé à Dijon, et le pôle Nuclear Valley, basé à Chalon-sur- Saône, en Saône-et-Loire). À cela s’ajoutent des pôles qui, s’ils ne sont pas basés en Bourgogne Franche-Comté, y ont des prolongements ou des antennes. C’est le cas, par exemple de Plastipolis, dont le siège est à Bellignat, dans l’Ain, ou encore Xylofutur, sur les produits et matériaux des forêts cultivées, qui a ses racines à Gradignan, en Gironde. Le quatrième pôle de BFC, celui des Microtechniques, situé à Besançon, dans le Doubs, n’a été labellisé que pour un an.

PRIORITÉ AUX GROS PÔLES

Sa création remonte à 2005 et sa labellisation avait, depuis, été régulièrement renouvelée. Il fédère environ 180 membres unis par les micro-techniques, mais qui représentent des filières parfois très différentes, allant de la santé à l’aéronautique. « Les micro-techniques sont un domaine extrêmement transversal, applicable à de nombreuses filières souligne Régis Roche, nouveau directeur général de ce pôle, depuis octobre. Si on ne définit pas des secteurs marché ou des filières sur lesquels on se spécialise, il est très compliqué d’accompagner l’ensemble des entreprises dans les micro-techniques. Nous avons donc été labellisé uniquement pour un an pour deux raisons : d’une part, nous sommes un « petit” pôle. D’autre part, la somme allouée par l’État aux pôles chaque année est en diminution drastique. Dans ce cadre, le gouvernement a fait le choix de favoriser les gros pôles et il a donc poussé à faire des alliances ou des fusions ». L’un des buts ainsi poursuivis est que les pôles de compétitivité aillent chercher de l’argent au niveau européen, pour leurs adhérents comme pour leur propre fonctionnement. Le pôle des Microtechniques n’est pas structuré pour aller chercher ces fonds européens. Il a donc été conseillé à ses dirigeants de se rapprocher d’un pôle de taille plus importante, ce qui a été fait avec Medicen Paris Région, consacré aux technologies innovantes en santé. « La Direction générale des entreprises (DGE), poursuit Régis Roche, nous a encouragé dans ce sens et c’est la raison de cette labellisation pour un an seulement. Nous sommes donc dans un processus de rapprochement, qui n’est pas pour autant une fusion. Sur les projets santé, l’intégralité des labellisations des projets nationaux et internationaux passera par Medicen ». De ce fait, le nouveau directeur du pôle des Micro- techniques s’affirme confiant sur une labellisation à 4 ans au terme de cette année transitoire. « Chaque labellisation fait l’objet d’un contrat d’objectif, explique de son côté Jean-François Debost, directeur général du pôle Nuclear Valley, créé en 2005 et qui compte à ce jour un peu plus de 250 membres (entreprises, écoles, organismes de formation, clusters…), et ce contrat est passé en revue chaque année. Sur cette phase IV, jusqu’en 2022, nos axes prioritaires de travail sont organisés autour d’un projet baptisé Ambition 2022 qui repose sur trois piliers : la R&D et l’innovation comme boosters de la performance et de l’emploi, la formation pour doter la filière de compétences robustes et adaptées aux enjeux, enfin l’appui au développement économique et à la compétitivité des industriels ».

Labellisation sur un an ou quatre ans : pourquoi ?

Si la majorité des pôles est labellisée pour 4 ans, certains ne le sont que pour 1 an. Plusieurs circonstances peuvent expliquer ce dernier cas de figure. Premièrement, l’une des caractéristiques de cette phase IV qui débute, c’est de pousser certains pôles, qui pouvaient être présents dans une même filière, à fusionner. Une démarche qui peut prendre du temps, et, en parallèle, le cahier des charges de cette phase IV a été reçu relative- ment tardivement par les pôles (en juillet dernier avec un dépôt de dossier de candidature fixé à octobre). Ceci permet de comprendre que pour certains de ces organismes, le processus de fusion n’est pas encore par- venu à son terme, ce qui explique une labellisation sur un an, presque transitoire, le temps que les choses se régularisent. Deuxième explication envisageable : il est possible que des pôles n’aient pas forcément donné les bons chiffres concernant leur bilan et que, de ce fait, les pouvoirs publics ne leur attribuent qu’une labellisation d’un an, le temps que les résultats soient vérifiés et validés, en comparaison avec les bases de don- nées des financeurs publics. Troisième explication : certains pôles connaissent des difficultés économiques, mais plutôt que le couperet tombe avec la perte du label, ce qui signifie celle du soutien financier de l’État, on attribue à ces pôles une labellisation temporaire d’un an, afin de leur permettre de régulariser leur situation.

La volonté d’une nouvelle dynamique

La phase IV des pôles de compétitivité porte sur la période 2019- 2022. Depuis 2004, selon le site competitivite.gouv.fr les phases précédentes avaient ciblé comme objectif principal l’industrialisation de la R&D, puis l’accompagnement jusqu’à la mise sur le marché des projets innovants. Ces pôles ont démontré leur capacité à mettre en réseau les acteurs de l’innovation, à développer des relations partenariales entre le monde de l’entreprise et la recherche publique, à renforcer la capacité des PME à innover, et ainsi à soutenir leur croissance et leur compétitivité. Ils ont en outre développé un ensemble de compétences au service de leur écosystème. Sur cette phase IV, le gouvernement souhaite réaffirmer la pertinence du modèle des pôles au sein du paysage de l’innovation et impulser une nouvelle dynamique à cette politique. Elle reposera notamment sur : une ambition européenne, en confiant aux pôles l’objectif de faire émerger davantage de projets collaboratifs européens, notamment dans les appels à projets d’Horizon 2020 (puis Horizon Europe). Également sur l’amélioration de la lisibilité du label « pôle de compétitivité », par la sélection des pôles sur la base d’objectifs mieux définis et de critères plus exigeants, et le renforcement de leur cohérence avec les autres écosystèmes innovants ou avec les Comités stratégiques de filières.