« Le numérique doit aider l’entreprise à se réinventer »

Guy-Mamou Mani préside le groupe Open (3 775 salariés). Crédit: Philippe Demoor.

Co-président du groupe Open, Guy Mamou-Mani présente une vision optimiste de la transformation numérique de la société. Avec la formation comme enjeu majeur.

En tant qu’ancien professeur de mathématiques, Guy Mamou-Mani estime « qu’il n’y a rien de plus important que de discuter avec l’avenir du pays ». Même quand on co-préside le groupe Open, spécialiste de la transition digitale, qui emploie 3 775 salariés et génère 324 M€ de chiffre d’affaires. « Notre première difficulté est de trouver des compétences. Nous avons recruté plus de 1 000 personnes l’an dernier mais nous voudrions embaucher davantage. Il y a du boulot et les métiers sont bien payés dans le numérique », assure-t-il s’exprimant devant les élèves du lycée Roosevelet (Reims) dans le cadre d’une conférence. 232 000 recrutements seraient ainsi prévus au cours des dix prochaines années dans des thématiques aussi variées que la cybersécurité, les objets connectés, l’industrie du futur, les réseaux, la mobilité, l’e-santé…

Auteur du livre L’apocalypse numérique n’aura pas lieu, Guy Mamou-Mani revendique une vision optimiste de sa filière. « En agissant au présent, on prépare le futur. En diabolisant le futur, on condamne le présent », explique-t- il en dénonçant les scénarios de science-fiction de certaines personnalités. « Il ne faut pas faire preuve d’angélisme et je suis un grand partisan du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), mais le big data n’est pas réservé aux GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) », estime celui qui a présidé le Syntec numérique, le syndicat de la filière pendant six ans.

Il préfère donc pointer les motifs d’espoirs pour « réhumaniser l’existance » en citant la télé-médecine ou la visio-conférence de cours comme des solutions apportées par le numérique. « On peut améliorer la qualité des services publics en étant plus efficace pour moins cher », ajoute-t-il.

LE NUMÉRIQUE CHANGE LE RAPPORT AU TRAVAIL

Concernant le monde de l’entreprise, Guy Mamou-Mani constate là aussi que le numérique permet de changer les méthodes de travail : « Les horaires et les lieux de travail sont des notions dépassées, il faut se réinventer ». Quant à la destruction des emplois par la robotisation et ces nouvelles technologies, le dirigeant note d’abord que « les pays les plus robotisés comme l’Allemagne et la Corée du Sud ont moins de chômage car leurs entreprises gagnent en productivité ». Néanmoins, il reconnaît la nécessité d’accompagner à la création de nouveaux métiers : « Quand une usine ferme, il faut défendre les employés plutôt que les emplois. Il faut anticiper pour les former ».

Avec la nécessité d’aller vite, très vite, il rappelle qu’il a fallu 68 ans à l’aviation pour transporter 50 millions de personnes, 62 ans à l’automobile, 50 ans au téléphone pour compter autant d’utilisateurs, 22 ans à la télévision, 14 ans à l’ordinateur, et 2 ans à Twitter… Même si, quand le produit ou service est gratuit, il faut avoir en tête le modèle économique des géants du web. « Il faut initier au code dès l’école primaire car tous les métiers sont concernés par la transformation numérique, ce n’est pas réservé aux scientifiques. Il est nécessaire d’avoir un bagage suffisant pour bien en comprendre les enjeux ».

Pour la féminisation du numérique

Guy Mamou-Mani a créé le mouvement Jamais sans elles et refuse de participer à une table-ronde qui ne donnerait la parole à aucune femme : « Elles ne représentent que 27 % des emplois dans les entreprises de la filière et seulement 10 % dans les métiers liés à l’informatique. Le besoin de recrutement est colossal et il ne faut pas que les filles croient que nos métiers ne leur sont pas ouverts ».