Le Muretain Agglo engage une démarche de plan guide. Explications de Thierry Suaud, son premier vice-président.
La zone économique du sud-ouest toulousain, qui longe, du Fauga à Portet, l’A64 et la Garonne, est en pleine mutation. Le Muretain agglo a en effet décidé d’engager une démarche de plan guide pour redynamiser ce qu’elle appelle son cœur économique lequel représente quelque 40 000 habitants et plus de 23 000 emplois. Une démarche* présentée le 9 octobre à Portet, à l’occasion d’un point de conjoncture de l’Observatoire toulousain de l’immobilier d’entreprise, par Thierry Suaud, premier vice- président de la communauté d’agglomération, en charge de l’immobilier, de l’économie et des transports, maire de Portet.
À quoi va service ce plan guide ?
L’idée est de mesurer nos forces et nos faiblesses, d’établir un diagnostic le plus précis possible en croisant le regard de techniciens, de spécialistes, d’acteurs économiques et sociaux, d’élus, afin de nous doter d’une vision stratégique. Où peut-on ou doit-on amener ce territoire à l’horizon 2030- 2035 ? Et en même temps quelles sont les priorités d’actions ? Car nous souhaitons un document qui soit aussi très opérationnel. Nous avons des enjeux à relever immédiatement sur le Fauga, sur Muret, sur Roques autour du centre commercial, et à Porter autour de sa diversité industrielle et commerciale. C’est donc une aide à la réflexion et à la décision. Ce forum de l’Otie nous permet de réfléchir puisque nous ne décrétons pas que du bureau, de la logistique ou du commerce veulent s’installer sur le territoire. C’est bien un travail en dynamique partagée avec les acteurs économiques. Ce plan guide doit à la fois nous donner une vision stratégique et constituer un document très opérationnel. D’autant qu’il devra recenser tous les outils et tous les partenariats à notre disposition. Nous avons en effet un grand partenaire en matière économique, la Région, un partenaire incontournable, la Métropole, des partenaires dans le domaine de la mobilité comme Tisséo, le Sicoval comme territoire voisin, les acteurs privés, opérateurs, investisseurs. Nous avons aussi des outils comme l’établissement public foncier d’Occitanie que nous devons apprendre à mieux utiliser pour parvenir à nos objectifs.
Quels sont-ils justement ? S’agit-il de créer de nouvelles zones d’activité ?
Les objectifs sont la création de richesses et d’emplois. Il s’agit d’insérer de nouveaux développements économiques dans le développement du territoire. Cela peut passer par une nouvelle zone d’activité. Ça passera forcément par la requalification d’un certain nombre de zones existantes. Mais cela peut passer aussi par une réflexion sur l’innovation technologique, sur l’accroche avec Francazal et la robotique, sur la place qu’on peut donner à l’aéroport de Muret Lherm. Les sujets sont très ouverts. Ce ne sera pas forcément de la ZAE classique. Est-ce qu’un village artisanal à sa place ? Est-ce que des immeubles de bureaux ont leur place le long de l’A64? Ce sont les sujets qui nous sont posés. La nouveauté, c’est que nous voulons construire avec les partenaires. Nous ne sommes pas face ou contre la Métropole, le Sicoval. Nous voulons partager la dynamique de développement. Mais il faut rééquilibrer. Nous avons moins d’emploi par habitant que n’en a la Métropole. Ce qui induit des mobilités, moins de richesses. Nous souhaitons rééquilibrer cette réalité. Nous sommes aussi en lien avec le sud. Or, nous ne voulons pas d’un territoire en déséquilibre avec le Volvestre et le Comminges. C’est donc une vision harmonieuse du développement du territoire que nous souhaitons à travers ce plan guide et plus largement le projet de territoire.
Pouvez-vous nous brosser le portrait de ce territoire ?
Le Muretain, ce sont 120 000 habitants dont 27 000 pour la ville centre, 26 communes, une très forte présence de zones commerciales, Roques et Portet. C’est un territoire très bien desservi du point de vue des mobilités avec l’A64, quatre gares. Un territoire qui présente donc des atouts mais en même temps des faiblesses : peu d’emploi par habitant, des problèmes de mobilité aux portes de Toulouse avec des engorgements et un tissu qui est décousu puisque les axes de déplacement fracturent le territoire entre l’est et l’ouest. Et dans nos villes, on voit bien aussi les tensions qui peuvent exister entre les zones d’habitat et les zones économiques. C’est donc aussi un territoire qu’il faut recoudre.
De quelle manière ?
En créant de nouvelles conditions de mobilité, avec par exemple, dans notre projet de territoire la création d’un réseau cyclable ; en requalifiant certaines zones et notamment les espaces interstices entre le développement économique et l’habitat ; et mieux jouer de nos grands atouts que sont nos gares et l’A64, de l’atout naturel pour le cadre de vie que sont la Garonne, l’Ariège et la Lèze. Nous avons un territoire à façonner. Mais la grande idée, c’est que nous voulons le faire en partenariat. Au-delà de la Région, de la Métropole, du Sicoval, de Tisséo, le partenariat avec les acteurs privés – puis- qu’une bonne part du foncier est détenue par des privés et que beaucoup d’opérateurs et d’investisseurs sont privés – sera indispensable. Mais nous voulons garder la main : ce n’est pas un territoire à vendre mais un territoire à construire.
Quid de l’avenir des zones commerciales compte tenu de l’évolution des modes de consommation ?
Cela fait plus de 20 ans que l’on dit que le modèle du centre commercial est daté. Nous constatons bien qu’il y a une baisse de fréquentation des galeries marchandes et des centres commerciaux. Nous constatons aussi le travail mené par les acteurs économiques pour s’adapter à ces habitudes nouvelles avec le développement du drive, des livraisons à domicile, la reconfiguration des hypermarchés, un travail d’adaptation en permanence. Mais nous ne pouvons pas construire le territoire simplement au gré de l’évolution de la grande distribution. ll nous faut anticiper les mutations, favoriser la création de dynamiques économiques nouvelles. C’est pour cela qu’il nous faut prendre en compte également l’artisanat, l’industrie, l’innovation technologique autour de la robotique. Et puis il y a des thématiques de société sur lesquelles le territoire peut aussi prendre sa part, sur le plan des services et de l’industrie. C’est par exemple le bien vieillir, la silver économie, ce qui signifie des services mais aussi la production d’outils et de technologies qui accompagnent le vieillissement… C’est cette réflexion qu’agrège le plan guide. L’approche n’est toutefois pas exclusive du développement des autres communes du territoire. Au-delà du plan guide, nous avons une réflexion plus large sur le développement économique. Du reste, chaque commune mène une réflexion sur d’autres aspects : le commerce de proximité, les producteurs locaux et à travers notre soutien aux dynamiques de centre bourg, à l’économie sociale et solidaire (ESS), à l’agriculture, nous essayons de mailler finement le territoire. Il ne s’agit pas, au nom des grands machins, de les abandonner. Au contraire, il faut être auprès des communes. C’est une question d’équilibre.
*Après publication d’un appel d’offres en janvier, un groupement qui comprend notamment l’Agence régionale d’aménagement et de construction a été sélectionné au printemps et chargé d’établir ce plan guide. Les premières restitutions sont attendues d’ici quelques semaines.