Avec des revenus locatifs en hausse à 59,5 M€ (+37 %) et un résultat opérationnel courant de 42,4 M€ en évolution de +46 % en 2020, le groupe Frey peut désormais suivre son tableau de marche de progression malgré la crise.
«Il n’y a pas de monde d’avant et de monde d’après. Il y a une évolution et une accélération des tendances qu’on avait observées avant ». À l’heure de présenter les résultats de l’année 2020 de la Foncière Frey qu’il dirige, Antoine Frey dresse plus globalement un état des lieux de son métier. « La crise n’est pas terminée », prévient-il. Perturbés par une fermeture moyenne de 2,3 mois sur l’année 2020, les centres commerciaux de plein air ont été moins impactés par la crise que les centres fermés. Une bonne nouvelle pour Frey qui est un acteur majeur dans ce secteur d’activité. Inventeur du concept de Shopping Promenade, le groupe rémois développe de plus en plus de retails estampillés de cette marque. Il en ouvrira d’ailleurs deux en mars, en région parisienne et à Strasbourg.
Mieux encore, les centres de plein air ont « surperformé », estime Antoine Frey. Ils ont en effet bénéficié de la volonté des consommateurs d’aller vers des formats « plein air » à la sortie des confinements, d’un mix merchandising diversifié et aussi de nouveaux services offerts par Frey (développement du click & collect et du click & drive par les enseignes). D’ailleurs, sur le patrimoine Frey, la fréquentation s’inscrit à 84 % du niveau de l’année 2019 et le chiffre d’affaires des locataires à 90 %. Des taux qui s’élèvent respectivement à plus de 12 % et plus de 16 % au-dessus des moyennes nationales enregistrées par le CNCC.
« Certains de nos locataires ont réalisé plus de chiffre d’affaires en 2020 qu’en 2019 et ont récupéré l’entièreté du chiffre perdu pendant le confinement, c’est assez remarquable », précise Antoine Frey, soulignant « l’extrême résilience » de son modèle. En effet, hors période de confinement, le chiffre d’affaires des locataires en France est en hausse de 7 % à période équivalente par rapport à 2019. Le groupe présente des performances opérationnelles « remarquables » pour l’année 2020… Avec 59,5 M€ de revenus locatifs (en progression de +37 %) et un résultat opérationnel courant de 42,4 M€ (+46 %), le groupe rémois peut clôturer l’année 2020 avec le sourire malgré un contexte tendu.
NOUVELLES ENSEIGNES ET OUVERTURES DE SITES
Ce dernier l’a d’ailleurs incité à mettre en place un fonds exceptionnel de 15 M€ pour venir en aide aux commerçants impactés par la crise et les confinements. « Nous avons réagi très rapidement », assure Antoine Frey. Une aide globale et uniforme pour les locataires, « c’est une question d’équité et d’éthique ». Au total, le groupe a abandonné 6,9 M€ de créances de loyer et a accepté d’étaler 2,9 M€ de loyers sur les années 2021 et 2022. Un montant global de 9,8 M€ auquel le groupe prévoit d’ajouter 2,3 M€ d’aides complémentaires en 2021 correspondant aux négociations engagées avec les locataires depuis le début de l’année.
D’ailleurs, le groupe enregistre un taux d’encaissement de 94 % de ses loyers malgré la crise. Le dirigeant rémois y voit l’illustration de « la qualité relationnelle et partenariale avec les enseignes ». En matière de développement commercial aussi, l’année 2020 a tenu ses promesses puisque le groupe a signé 90 baux au cours de l’exercice passé sur son patrimoine existant, avec des enseignes déjà présentes au sein du groupe, mais aussi avec de nouvelles enseignes. Des baux supplémentaires qui représentent 9,4 M€ de loyers additionnels pour le groupe.
Quant à la commercialisation des actifs en développement, elle a débouché sur 79 baux signés (dont près de 60 % de nouvelles enseignes) pour 6,1 M€ de loyers. « Nous accueillons des enseignes de centre commercial, de centre-ville et même d’outlet qui viennent chez nous », apprécie Antoine Frey. Il cite notamment l’arrivée de l’enseigne Nature et Découvertes qui a ouvert son premier magasin en retail park, tout comme Nocibé, Haribo, ou Nike, qui viennent avec leur format et contribuent à la diversification du portefeuille du groupe.
Pour Frey, l’année 2021 est donc synonyme de poursuite de développement, avec l’ouverture les 10 et 17 mars de deux nouveaux Shopping Promenade, à Claye-Souilly (77) et à Strasbourg (67). Deux opérations qui portent le portefeuille de projets de développement du groupe à 802 M€.
Le groupe lancera aussi trois chantiers cette année, deux Shopping Promenade en Espagne et près de la frontière suisse, et un Village des Docks à Saint-Ouen (qui comprend logements, bureaux et commerces). Seule ombre au tableau, l’abandon du projet Ode à la Mer de Montpellier, à la suite de la décision de la Métropole de Montpellier d’abandonner le projet en juin 2020, entre les deux tours des élections municipales en 2020. « Le groupe a assigné la société d’aménagement de Montpellier Méditerranée Métropole au titre du préjudice subi pour un montant de 77 M€ », précise Antoine Frey.
Remettre le commerce au service de l’intérêt collectif
Début février, le groupe Frey annonçait sa volonté de remettre le commerce au service de l’intérêt collectif en devenant une « entreprise à mission ». Les actionnaires de Frey ont traduit cet engagement fin janvier lors d’une assemblée générale extraordinaire en approuvant la possibilité de lui permettre d’adopter les statuts de société à mission fin janvier. « Une entreprise ne peut plus durablement se contenter de justifier son action uniquement par l’objectif de la réalisation d’un profit et du service d’un dividende à ses actionnaires ».
Une entreprise à mission est en effet une organisation dotée « d’une raison d’être », mais aussi d’objectifs sociaux, environnementaux et sociétaux, pouvant ainsi conjuguer performance économique et contribution à l’intérêt général. « Le cœur du métier de Frey c’est le commerce. Mais au fil du temps le commerce a parfois oublié toute l’utilité qu’il pouvait avoir pour son environnement direct ». Antoine Frey l’avoue : « Le Covid a aussi été un accélérateur de conscience : quand les commerces sont fermés les villes sont mortes, quand les commerces sont fermés on s’ennuie… » Voulant se positionner sur des cases diamétralement opposées à celles des acteurs en ligne sur l’échiquier du commerce, le Pdg s’interroge d’ailleurs sur la plafond de verre sans doute atteint par les pure players en ligne, sans nommer Amazon. « On voit se développer au travers des pure players online une forme de commerce qui ne sert que lui-même ».
Dans ce cadre, le groupe Frey poursuit trois objectifs majeurs, souligne son Pdg. Le premier : « faire du commerce un levier de mixité urbaine. On a décidé de généraliser dans 100% des projets de plus de 20 000 m2 la mixité en mêlant les activités commerciales avec d’autres usages : services publics, pôles de santé, logements, bureaux, lieux associatifs… ».
Le deuxième objectif consiste à « revaloriser le rôle du commerce dans la création de lien social et dans la résilience économique locale », notamment en dédiant dans un premier temps 10 % des surfaces des projets à des activités sociales et solidaires, à des artisans et des commerçants indépendants locaux…
Enfin, troisième objectif pour le groupe : « Faire du commerce un accélérateur de transition environnementale » pour pouvoir atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2030. Pour ce faire, Frey va investir 35 M€ d’ici 2030 dans l’acquisition et l’exploitation de forêts françaises durablement gérées.
Antoine Frey tient néanmoins à rassurer ses actionnaires : il n’envisage pas faire de son groupe une activité philanthropique à part entière mais compte bien continuer à réaliser le plus de profit possible avec son métier. « Le profit c’est fantastique », insiste-t-il. « C’est avec le profit qu’on peut financer de bonnes actions pour son environnement direct. On va donner plus de sens à notre action et illustrer de façon plus claire l’utilité concrète que l’on a pour nos différentes parties prenantes au-delà du service de l’intérêt de nos actionnaires ».