L’une des conditions de la fin du confinement réside dans le dépistage de la population. Sur ce créneau fortement concurrentiel de la santé, le laboratoire alsacien Biosynex se positionne en force et la Région entend bien jouer la carte de la consommation « Made in Grand Est ».
Ex-Députée européen, Maire de Strasbourg, Ministre dans les gouvernements Rocard et Jospin, et actuellement à nouveau candidate à la Mairie de Strasbourg, Catherine Trautmann est à la base d’une idée : l’après confinement, agir plutôt que subir, doit se construire en urgence. Pour elle, l’Alsace doit se positionner dans l’organisation de tests de dépistage du Cocvid-19 à grande échelle.
Avec elle, le Député du Haut-Rhin Olivier Becht, le patron de Biogroup (600 laboratoires en France) Stéphane Eimer et Eric Goetzmann, un investisseur alsacien, montent un dispositif destiné à identifier les personnes ayant produit des anticorps, donc immunisés, afin d’accélérer le déconfinement. Dans cette perspective, c’est le laboratoire régional Biosynex qui fournira les tests, avec une commande initiale de 2 millions de tests. Pour Catherine Trautmann : « L’idée est qu’il y ait une commande massive de tests de la part du Grand Est, afin de pouvoir enclencher la machine ».
CRÉATION DE LA SEM DYNAMISE
La commande massive ne s’est pas fait attendre. Jean Rottner qui n’a pas l’intention de se faire plus ou moins balader comme pour les commandes de masques : « Nous allons éviter une nouvelle foire d’empoigne et la course aux masques qui a été un véritable naufrage collectif », monte au créneau et fait voter, à l’unanimité, par la Commission permanente du Conseil régional du 9 avril, la création d’une société d’économie mixte locale dédiée à l’approvisionnement du territoire régional en matériel destiné à répondre à la crise sanitaire et notamment à l’a- chat de kits de tests sanguins Covid-19.
Les arguments de la Région sont ainsi exposés : « La capacité à tester massivement notre population représentera un enjeu majeur pour la reprise de l’activité … L’accès à ces tests fait l’objet d’une concurrence féroce … Nous devons accéder à un volume de tests suffisant pour satisfaire les besoins de la population du Grand Est ».
Le capital initial de la société d’économie mixte locale “Dynamise”, société constituée avec l’assentiment de l’Etat, précise la Région, est d’un montant de 10 M€, réparti entre la Région (51%), la Banque des Territoires (25%), le Crédit Mutuel (24%). La SEM se dit ouverte à l’arrivée d’autres collectivités du territoire.
UN LABORATOIRE COMPATIBLE « GRAND EST INSIDE »
Créé en Alsace en 2006, le laboratoire français Biosynex, fournisseurs des pharmacies, des laboratoires et des hôpitaux, conçoit fabrique et distribue, entre autres produits, des tests de diagnostic rapide, dans des versions à usage autotest ou professionnel. L’entreprise emploie 180 collaborateurs et a réalisé un chiffre d’affaires de 34,2 M€ en 2019, avec un résultat net en progression de 249%.
Dans un communiqué du 26 mars, Biosynex annonce le lancement d’un test rapide de détection des anticorps spécifiques du Covid-19, à partir d’une goutte de sang, avec ce commentaire : « En France, le test sérologique est envisagé pour un dépistage massif dans lequel semble vouloir s’engager le Conseil scientifique du Ministère de la Santé, à l’issu de la période de confinement ».
UNE CAPACITÉ DE 100 000 TESTS PAR JOUR
Depuis cette annonce Biosynex affirme avoir mis ce test, labellisé CE, à disposition d’hôpitaux et de laboratoires, dans l’attente des recommandations de la Haute Autorité de Santé et d’un éventuel remboursement par l’Assurance Maladie. D’autres commandes viennent de pays européens et africains. Biosynex qui donne la priorité de ses livraisons à la France envisage, en coordination avec son partenaire chinois, la mise en place d’une unité de production à Strasbourg, avec un objectif de 100 000 tests par jour d’ici à fin mai. Pour l’instant, privilégiant le test PCR, naso-pharyngé, la Haute Autorité de Santé s’en tient à son avis du 6 mars dernier : « Le recours à des tests sérologiques ou sanguins pour rechercher le virus ou des anticorps n’est pas recommandé pour poser un diagnostic ». Producteur du test sérologique, Biosynex, comme une vingtaine d’autres laboratoires sur le territoire national, peut vendre sous le label Communauté Européenne un dispositif non remboursé par la Sécurité Sociale.
LE CHOIX CALCULÉ DES TESTS SÉROLOGIQUES
Jean Rottner place les intentions de la Région dans le respect des directives gouvernementales : « Dire à l’Etat comment nous pouvons, à ses côtés, être un acteur de la santé publique et du développement économique … Le jour d’après se prépare aujourd’hui et en produisant chez nous ».
Au cours de sa conférence de presse du 15 avril, le Président du Conseil régional a justifié ses choix : « Il s’agit d’un devoir d’anticipation assumée. Je n’aurais pas pris cette initiative de précommande sans avoir la conviction que ces tests sérologiques seront un des éléments de sortie du confinement. Nous sommes en phase avec la stratégie nationale…». Et Jean Rottner fait ce pari : « J’espère passer une commande ferme dans les quinze jours à venir ».