Amoureux de ces rapaces, il a créé une entreprise spécialisée dans les techniques d’effarouchement aviaire, avec pour objectif des solutions favorisant la prédation naturelle.
«Cette passion des oiseaux me vient de mon père », confie Timothée Josselin, fondateur de Fauconnerie Team. Enfant, il écoutait attentivement les histoires de son papa qui travaillait auprès des plus grands fauconniers du Puy du Fou. Un amour pour la nature et ces drôles d’oiseaux transmis dès son plus jeune âge. C’est d’ailleurs un Baccalauréat spécialisé en agriculture et en environnement qu’il passera à Genay. Puis, le jeune bachelier s’installe à Paris et s’éloigne durant plusieurs années de ses racines, en travaillant dans le milieu de la publicité et de la restauration haut de gamme. Ce n’est qu’en 2015 qu’il décide de tout plaquer pour retourner vivre à Dijon et développer l’association que ses parents avaient fondée huit ans auparavant : “Les Chouettes du Cœur”. C’est la seule association qui apporte une aide thérapeutique aux personnes en situation de handicap, aux personnes en difficultés sociales et aux personnes âgées et fragilisées grâce aux oiseaux de proie (chouettes, hiboux, buses, faucons).
UN DÉCLENCHEUR ÉMOTIONNEL FORT
« J’ai été bouleversé de découvrir le bien-être que ces oiseaux pouvaient procurer à ces publics particuliers », avoue l’ancien chef de publicité. Grâce à son réseau, il réussit à médiatiser l’association. Son ambition ? Faire reconnaître scientifiquement la “Chouette Thérapie” comme aide thérapeutique non médicamenteuse. « C’est unique au monde ! Personne n’utilise nos amis ailés pour améliorer la situation des personnes fragilisées. Certes, ils ne les guérissent pas mais ils peuvent apporter de réels progrès sur le long terme. Par exemple, améliorer des problèmes de motricité en dénouant des atrophies ; apprivoiser des peurs profondes ; sortir de l’isolement par l’interactivité d’un groupe, etc… Faire voler des chouettes peut être un déclencheur émotionnel fort ! », assure Timothée Josselin.
Depuis deux mois, le groupe AG2R La Mondiale Bourgogne Franche- Comté soutient financièrement l’association dans cette démarche de reconnaissance. Ce soutien permettra de financer les trois années nécessaires au futur doctorant qui évaluera les bienfaits de la “Chouette Thérapie”. « L’institut Pasteur, partenaire du groupe de protection sociale, nous a mis en relation avec une université pour que l’on identifie des doctorants-chercheurs afin de réaliser une étude comportementale », précise Timothée Josselin.
LE RETOUR À LA PRÉDATION NATURELLE
En parallèle de son engagement auprès des Chouettes du Cœur, Timothée Josselin lance une entreprise de nettoyage “AviClean Espace” comme activité complémentaire car « il faut bien mettre du beurre dans les épinards », avoue-t-il. Une création d’entreprise qui le mènera bien plus loin qu’il ne l’imaginait à l’époque… Aujourd’hui, cette société est un véritable atout dans sa nouvelle activité d’effarouchement aviaire. En 2018, le fauconnier est régulièrement sollicité par les collectivités pour faire face à des problématiques d’envahissement de pigeons et de corvidés dans les lieux communs (église, site agro-alimentaire, bâtiments de stockage). Après quelques mois de formation de chef d’entreprise à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte-d’Or, il décide de créer Fauconnerie Team. « Aujourd’hui, la demande dépasse largement les ambitions de départ ! », constate le jeune entrepreneur. L’entreprise – basée à Labergement-lès-Seurre en Côte-d’Or – est spécialisée dans les techniques d’effarouchement aviaire, le nettoyage des dégradations et la mise en place de solutions favorisant la prédation naturelle. « Nous intervenons pour réguler les colonies aviaires envahissantes en combinant plusieurs méthodes », explique le fondateur. « Sur les sites agricoles et agro-alimentaires (silos, bâtiment de stockage d’engrais, minoterie, etc), les principales nuisances aviaires sont causées par les pigeons bisets. Quand il y a un risque sanitaire de contamination des céréales, nous intervenons en trois phases. Dans une première phase, curative, nous capturons par volières et effarouchons les pigeons (80 % de la colonie est prélevée) avec l’aide de nos rapaces. Dans une seconde phase, préventive, nous installons des systèmes anti-intrusions pour éviter le retour des volatiles sur les lieux où il y avait du stockage d’engrais ou de grains. Nous détectons les points d’entrée des pigeons et nous mettons en place des filets ou des grillages et/ou des systèmes d’effarouchement acoustiques afin de créer un climat anxiogène. Dans une troisième phase, nous procédons à l’assainissement, nous enlevons les nids en façade », explique Timothée Josselin. C’est dans cette dernière phase où il fait intervenir sa société de nettoyage spécialisée. L’équipe de Fauconnerie Team est composée de quatre personnes : un administratif et trois opérationnels associant diverses compétences : fauconnier, cordiste, télé-pilote de drone, piégeur professionnel. « Sur des sites de surfaces importantes, nous faisons régulièrement appel à une dizaine d’intérimaires supplémentaires », ajoute le chef d’entreprise. Depuis cette année, une antenne parisienne a même vu le jour pour faire face aux invasions de pigeons. Parmi ses clients, la jeune entreprise compte déjà des grands noms locaux tels que Dijon Céréales, mais aussi nationaux, tels que la RATP et la SNCF. « Nous travaillons essentiellement avec la buse péruvienne ou la buse de Harrys car – au même titre que les loups – elles peuvent chasser en meute », indique le fauconnier. Ce dernier insiste sur le fait qu’il faut entretenir un site régulièrement au même titre que la dératisation. « Nous pouvons garantir la limitation des envahisseurs mais pas leur éradication définitive ! », avoue-t-il.
UNE DÉMARCHE PÉDAGOGIQUE
Cette année, Fauconnerie Team vient également de lancer un programme ambitieux baptisé Dicé’Chouette, avec Dijon Céréales et l’association bourguignonne La Choue – spécialisée dans l’étude des rapaces – visant à mettre en place sur une dizaine de sites de Côte-d’Or (des silos ou des bâtiments de stockage), des nichoirs pour favoriser le retour de la prédation naturelle. Une démarche à caractère environnemental qui s’inscrit dans un panel d’alternatives aux insecticides, comme les groupes de ventilation réfrigérés ou les sondes thermométriques. Elle rentre à sa façon dans la catégorie du bio-contrôle. « Il s’agira de nichoirs à chouette effraie, de nichoirs à faucon crécerelle et de deux plateformes à faucon pèlerin. Les chouettes effraies sont des prédateurs très efficaces de micro-mammifères. Un couple de chouettes effraies se reproduisant, consomme 5.000 à 6.000 micro-mammifères dans l’année. Les faucons crécerelles peuvent notamment consommer des moineaux -espèce protégée pour laquelle la régulation naturelle est la seule solution- et les faucons pèlerins comptent dans leur régime alimentaire les pigeons bisets », explique Timothée Josselin. Fauconnerie Team intervient également au niveau des exploitations agricoles, pour le stockage mais aussi le semis, avec toujours un volet sensibilisation au retour de la prédation naturelle. « Nous rappelons notamment l’intérêt de l’installation de piquets – très simple à monter – en bords des parcelles agricoles, permettant aux rapaces de venir chasser », indique le fauconnier. Un système gagnant-gagnant préservant la biodiversité : Fauconnerie Team protège leur récolte avec ses méthodes ; quant aux agriculteurs, ils permettent le retour de la prédation naturelle sur leur surface agricole.
