Le Code de la commande publique : la fin d’un serpent de mer

Après trois tentatives avortées, dont la première remonte à plus de 20 ans, le Code de la commande publique (CCP) a enfin vu le jour.

Son adoption par l’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 et le décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018 s’inscrit dans le processus de modernisation et de rationalisation du droit français de la commande publique, initié avec la transposition en droit interne des directives européennes « marchés publics » et « concessions », opérée en 2015 et 2016.

L’idée est de regrouper au sein d’un même corpus juridique les règles relatives aux contrats de la commande publique avec comme objectifs, selon le gouvernement, de les rendre plus accessibles et davantage lisibles, et de favoriser ainsi la compétitivité et l’efficacité du droit de la commande publique, au service des entreprises et des investisseurs. Le CCP rassemble ainsi une trentaine de textes épars et compte plus de 1.700 articles.

Il a été opté pour une présentation en deux grands blocs successifs, deux parties se succédant, une partie législative et une partie règlementaire, lesquelles sont structurées autour de la division cardinale entre « marchés publics » et « contrats de concession ». Les premiers sont régis par la deuxième partie du code, les seconds par la troisième partie. Une première partie est consacrée à des définitions et un titre préliminaire à des principes communs, dont les principes fondamentaux de la commande publique (égalité de traitement des candidats, liberté d’accès et transparence des procédures).

Il s’agit d’une codification à droit constant. Autrement dit, le CCP n’a pas vocation à créer des règles nouvelles, mais simplement à codifier, c’est-à-dire à intégrer au sein d’un document unique des dispositions existantes issues de textes épars, sous réserve des modifications nécessaires, notamment pour harmoniser l’état du droit et remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification.

CONSACRER DES SOLUTIONS JURISPRUDENTIELLES

S’agissant des marchés publics, ont été codifiées les dispositions de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relatives aux marchés publics. On peut également citer la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, dite loi MOP, et le dernier alinéa de l’article 5-1 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, lequel érige en principe le concours d’architecture dans les marchés de maîtrise d’œuvre portant sur la réalisation d’ouvrages de bâtiment.

Au sein de la partie règlementaire, on retrouve les dispositions du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’œuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé, du décret n° 2010-1525 du 8 décembre 2010 relatif aux comités consultatifs de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics… La codification opérée a également été l’occasion de consacrer certaines solutions jurisprudentielles, dont celles relatives à la notion d’offre anormalement basse, aux pouvoirs de modification et de résiliation unilatérale du contrat par l’administration cocontractante et de la théorie de la force majeure.

Enfin, le contenu du CCP n’est pas figé. Ainsi, des modifications sont déjà prévues et des nouvelles dispositions ont déjà été intégrées depuis la publication des textes portant adoption du code, ou ont vocation à l’être, dont les dispositions relatives au droit de la commande publique de la loi Élan n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, les dispositions régissant la facturation électronique, issues de l’ordonnance n° 2014-697 du 26 juin 2014 et le projet de loi relatif au Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte.

S’agissant de l’entrée en vigueur du code et sauf exceptions, ses dispositions seront applicables aux contrats pour lesquels une consultation sera engagée ou un avis d’appel à la concurrence publié à compter du 1er avril. Pour ces contrats, les acheteurs devront se référer aux articles du code. Pour les aider dans cette tâche et faciliter l’appropriation du code par ses futurs utilisateurs, le ministère de l’Économie a mis en ligne sur son site internet une fiche de présentation ainsi que les tables de concordance entre les textes actuels et les articles du nouveau code.

Par Alexandre Tronche et Alexia Gire, avocats au sein du Cabinet CGBG.