Le CESER plaide pour une politique en faveur des jeunes plus visible

Le Grand Est ne compte que 38,7% de diplômés de l’enseignement supérieur contre 43% en France.

« Rendre plus visibles et plus lisibles les politiques en faveur de la jeunesse », l’autosaisine du Conseil Economique, Social et Environnemental s’attache notamment à l’affirmation du chef de filât du Conseil régional et à la tenue d’une Conférence Territoriale de l’Action Publique sur cette thématique.

Dans son autosaisine, « La Région chef de file pour une coordination nécessaire des politiques Jeunesse », le Ceser évoque les 20 M€ du budget du Grand Est consacrés à quatre défis de la politique en faveur des jeunes : donner les clés de l’insertion professionnelle, encourager et soutenir l’entreprenariat des jeunes, se mobiliser pour l’engagement et la citoyenneté des jeunes et élargir les horizons des jeunes. Cependant, le financement de la Région va beaucoup plus loin dans cette thématique très transversale qui englobe, entre autres sujets, l’enseignement supérieur, la formation, l’orientation, les lycées, la mobilité, le développement économique, la culture, le sport, la santé …

Si toutes les strates de l’organisation territoriale du pays (Régions, Départements, Communes et Intercommunalités) disposent de compétences sur le sujet, le Ceser rappelle que depuis la Loi « Egalité et Citoyenneté » du 27/01/2017, le Conseil régional dispose d’une légitimité pour exercer son rôle de chef de filât des politiques Jeunesse. Dans son rapport et au terme de près de dix-huit mois de travail, le Ceser scrute la cohérence et la lisibilité de l’action Jeunesse de la Région et de l’exercice de sa légitimité de chef de file, notamment dans le dispositif de la CTAP, Conférence Territoriale de l’Action Publique.

Avec un peu plus de 984 000 habitants de cette tranche d’âge (INSEE 2016), le Grand Est occupe le cinquième rang des régions françaises les plus jeunes (17,7% de la population régionale contre 17,1% en moyenne nationale). Le niveau de qualification des jeunes régionaux est inférieur à celui moyen du pays. Si 10,2% des 20 à 24 ans régionaux sont sans diplôme, comme au niveau national, le Grand Est ne compte que 38,7% de diplômés de l’enseignement supérieur contre 43% en France (INSEE 2017). Entre janvier et avril 2020, le nombre de demandeurs d’emploi de moins de 25 ans a augmenté dans la région de près de 12%. Pendant du niveau de qualification, la précarité se traduit par un niveau élevé des jeunes régionaux ni scolarisés, ni en formation, ni en emploi (17% dans le Grand Est et 16,8% au niveau national). Si les salaires précaires concernent 15% des 15-64 ans dans la région, cette proportion monte à 54,8% pour les 15-24 ans.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA POLITIQUE JEUNESSE DE LA RÉGION

Du côté des forces, le CESER pointe le budget, les moyens humains et les outils de communication dédiés ainsi que le chef de filât attribué par la loi. Du côté des faiblesses, le CESER évoque la multiplicité des objectifs selon les collectivités, le manque d’information de la part de la Région vers les autres collectivités, la baisse des subventions pour les acteurs de la jeunesse, la multitude d’acteurs agissant en faveur des jeunes et le fait que le Conseil régional, de par la loi, ne peut imposer sa tutelle sur les autres collectivités territoriales (Article 72 de la Constitution du 04/10/1958).

Le Ceser estime que le Conseil régional pourrait faciliter la mise en cohérence des politiques publiques de la jeunesse et les rendre plus lisibles et plus visibles et mieux affirmer, quant à lui, son rôle de chef de file. Parmi les préconisations du CESER : la réalisation d’un diagnostic précis sur les politiques de la jeunesse, la création d’un observatoire de la jeunesse, la mise en place d’une CTAP, Conférence Territoriale de l’Action Publique dédiée à cette problématique, l’instauration d’une organisation des espaces d’échanges existants, en synergie et pour plus d’implication des jeunes.

Parmi les axes de travail de cette CTAP, le Ceser cite l’accès au logement des jeunes, outil d’insertion sociale et professionnelle, la lutte contre la fracture numérique, avec une réelle coordination des échelons territoriaux, la politique jeunesse en faveur des « invisibles », ni en étude, ni en formation, ni en emploi, sans oublier l’évaluation, avant, pendant et après, des politiques mises en place.

A PROPOS DE LA CTAP ET DU CHEF DE FILÂT

Les CTAP, cadre d’élaboration des politiques locales concertées, notamment dans le domaine des compétences partagées, existent depuis La Loi Maptam du 27/01/2014. La première Conférence appartient à l’ancienne Région Lorraine, pionnière en la matière, mise en place par l’arrêté préfectoral du 17/02/2017. Elle est composée de 93 membres, dont le Président du Conseil régional, les Présidents des Conseils départementaux, les Présidents des Etablissements Publics de Coopération Intercommunale, et différents Maires, selon les niveaux de population.

Le chef de filât est une disposition de cette même Loi Maptam. Elle ouvre la possibilité à la loi de désigner une collectivité pour gérer de manière commune une compétence qui nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales ou groupements de celles-ci. Ces deux dispositifs viennent de faire récemment l’objet de critiques de la part de la mission d’information du Sénat sur le rôle des Départements dans les Régions fusionnées, mission à laquelle ont contribué les sénateurs Benoît Huré (Ardennes) et André Reichardt (Bas-Rhin).

Ce rapport du Sénat évoque l’échec des conférences territoriales de l’action publique, jugées globalement inefficaces, insuffisamment représentatives et trop pléthoriques et le concept de chef de filât vide de portée juridique. Son verdict : supprimer les CTAP et réformer l’institution du chef de filât.

Plus de diplômés mais un taux d’emploi en baisse chez les jeunes du Grand Est

12% des jeunes de 15 à 29 ans ayant terminé leurs études n’ont pas de diplôme. Cette proportion révélée par l’INSEE en 2017 marque une amélioration de quatre points en dix ans. À l’inverse, le taux d’emploi de cette catégorie d’âge est globalement en baisse.

En 2017, le Grand Est compte 527 000 jeunes de 15 à 29 ans qui ne sont ni étudiants, ni apprentis, ni inscrits dans un établissement d’enseignement. 62 000 d’entre eux (12%) n’ont aucun diplôme. Cette proportion équivaut à une baisse, en région comme en France, de quatre points en dix ans.

Enregistrant eux aussi une baisse des non-diplômés, les départements de l’Aube et des Ardennes (14% de non-diplômés) enregistrent cependant les plus forts taux de cette catégorie, deux points au-dessus de la moyenne régionale. A l’inverse les taux les plus bas concernent le Bas-Rhin, les Vosges et la Haute-Marne.

La réforme du baccalauréat professionnel et celle dite LMD (Licence-master-doctorat) ont conduit à une baisse des non-diplômés et une augmentation des diplômés de l’enseignement supérieur. En région, 19% des 15 à 29 ans détiennent ainsi un Bac+3 en 2017, contre 11% en 2007. La moyenne nationale est supérieure de quatre points à celle du Grand Est. Cette proportion de Bac+3 varie de 12% dans la Meuse à 24% dans le Bas-Rhin. Seul le tiers des jeunes sans diplôme est en emploi. Entre 2007 et 2017, le taux d’emploi des 15 à 29 ans ayant terminé leurs études diminue quel que soit le niveau de diplôme : -11 points pour le brevet, -9 points pour le Bac, -8 points pour les CAP- BEP et les non-diplômés, -3 points pour les Bac+3. En fonction du niveau des diplômes, en dix ans, la part des jeunes au chômage progresse de deux à sept points. C’est dans l’Aube que l’insertion professionnelle des jeunes non-diplômés est la plus difficile. Ce département compte le plus faible taux d’emploi des non-diplômés (26,5%) et le plus fort pourcentage de non-diplômés au chômage (42,8%). Dans une proportion légèrement moindre, la situation des Ardennes est comparable. Dans les Vosges et la Marne le taux d’emploi des jeunes non diplômés est également faible.