Le CD 58 veut mettre la Nièvre en bouteille

À Pougues-les-Eaux, le Conseil départemental tente de relancer la production d’une eau minérale millénaire disparue… depuis 50 ans.

Alors qu’avec des « si », on mettrait Paris en bouteille, le Conseil départemental 58 est sur le point de réussir ce pari dans la Nièvre. C’est en tous cas l’objectif fixé par un appel d’offres pour l’exploitation industrielle et la commercialisation d’une des plus anciennes eaux de France, celle de Pougues-les-Eaux.

César, Catherine de Médicis, Henri IV ou Louis XIV – qui leur accorda les Lettres patentes en 1670 – étaient déjà des adeptes du thermalisme et des « eaux de Pougues ». Réputées pour « développer l’appétit et faciliter la digestion » et lutter contre le diabète, elles faisaient alors partie de toute une industrie qui s’étendait de la limonade La Parizette ou l’eau gazeuse de Saint-Parize le Châtel qui « ne trouble pas le vin » jusqu’aux eaux de Fourchambault ou Saint-Honoré les Bains.

Après 2.000 ans de gloire, la fin du thermalisme en 1971, la fermeture en 1975 de la dernière usine d’embouteillage à Pougues – fondée en 1890 par la famille Massé, elle expédiait jusqu’à 2,3 millions de bouteilles par an ! – sonne le glas de tout un pan de l’économie locale. Les hôtels de la Belle-époque ferment leurs portes et le conseil départemental qui acquiert le site en février 1976 prévoit alors un grand plan… de destruction, contrarié par la mobilisation des habitants et des élus.

Un Centre d’Art contemporain est certes installé en 1993 mais les investissements restent au point mort et Pougues rejoint la cohorte des “Belles endormies” dont seul le nom rappelle le glorieux passé. Divers projets industriels n’obtiennent pas les autorisations du département. La recherche d’investisseurs au début des années 2000 se heurte aux géants de la filière, Nestlé et Danone.

C’est une campagne médiatique orchestrée en mai 2016 par nos confrères du Journal du Centre et le retour en grâce du « consommer local » qui va relancer le débat et réveiller les consciences sur l’exceptionnel potentiel de l’une des sources, baptisée Lou, dont le débit atteint 6.800 litres par heure. Une source qui fait partie depuis 1999 des deux ou trois en France à détenir « toutes les autorisations pour être exploitée et à ne pas l’être » , déplore l’hydrogéologue dijonnais Emmanuel Soncourt, consulté à plusieurs reprises et qui fut aussi l’un des initiateurs du thermalisme à Santenay. C’est pour en finir avec cette absurdité qu’en 2017, l’association Eaux de Nièvre a vu le jour et avec elle, un véritable projet de renouer avec l’exploitation industrielle. Avec une consommation annuelle passée de 300 millions en 1949 à 5,6 milliards de bouteilles par an en France, les « Eaux de Pougues » ont aujourd’hui l’opportunité de tirer leurs cartes du jeu et de redynamiser une économie qui mise sur le local. Réponse début 2021 pour le choix de l’exploitant…