Dominique PitoisetL’art au pluriel

Tel un retour aux sources, Dominique Pitoiset a rejoint la direction générale et artistique de l’Opéra de Dijon au 1er janvier 2021. Dijonnais d’origine, il a notamment dirigé le Théâtre Dijon Bourgogne à la toute fin des années 1990, alors que l’Auditorium n’était encore qu’au stade de projet.

Formé à l’architecture, ce dijonnais a rapidement entrepris une carrière dans la scénographie. Artiste, metteur en scène et enseignant, il a un temps dirigé le Théâtre Dijon Bourgogne avant de mettre le cap sur l’Italie. De passage à Bordeaux, il crée l’École supérieure de théâtre. De retour dans la cité des Ducs, il a dernièrement pris la direction générale et artistique de l’Opéra de Dijon.

«Je suis né à Dijon, d’un père bourguignon et d’une mère franc-comtoise. Pour moi, la question des racines est ma foi toute relative. Les racines, c’est le lieu où on s’enracine… ce n’est pas forcément le lieu d’origine et nous sommes bien plus riches quand nous avons plusieurs points référents. » Une fois le décor posé, Dominique Pitoiset lève le rideau sur son parcours et raconte son histoire scène après scène. Un voyage dans le temps et dans l’espace, avant de poser à nouveau ses bagages à Dijon pour prendre la barre du vaisseau amiral de la politique culturelle de la métropole, l’Opéra de Dijon. 

Après avoir grandi dans la cité des Ducs, c’est vers des études d’architecture qu’il s’oriente avant d’intégrer l’École supérieure des beaux-arts de Dijon où il étudiera les arts plastiques. « Je suis ensuite parti faire un peu de scénographie, l’acteur et commencer la mise en scène à l’École supérieure du Théâtre national de Strasbourg, avant de décrocher très rapidement le prix de Rome et d’intégrer la Villa Médicis à Rome et hors les murs », résume-t-il. Durant cet interlude, il assiste les plus grands metteurs en scène de l’opéra italien et y rencontre son épouse. « Je suis finalement revenu en France pour prendre la direction du Centre dramatique de Bourgogne sur proposition de Robert Poujade, alors maire de Dijon. J’étais, à l’époque, le plus jeune directeur de centre dramatique, se souvient-il. J’ai finalement choisi de quitter Dijon quatre ans après, parce que l’Auditorium avait été ouvert… À cette époque, nous savions, nous autres artistes et responsables de lieux culturels, que la question de nos attentes en termes de développement structurel ne serait plus d’actualité pendant de nombreuses années ». Un passage très bref par Paris à la direction du Théâtre national de Chaillot, invalidée suite à un changement ministériel, il reprend la route pour l’Italie pour faire ses armes en tant que metteur en scène associé au Festival Verdi à Parme et artiste associé au Théâtre national de Turin. 

DES PLANCHES AUX BANCS DE L’ÉCOLE 

Metteur en scène, scénographe et acteur, Dominique Pitoiset a mis en scène à l’Opéra de Paris, au Capitole à Toulouse, en Italie ou encore en Allemagne. Durant son parcours, il a fondé sa propre compagnie, la Compagnie Pitoiset Dijon, tout en étant artiste indépendant, associé à la scène nationale d’Annecy. « J’étais, à l’époque, la seule compagnie nationale soutenue par la direction générale de la culture à Paris, déconcentrée en province, avec le soutien d’une ville à parité avec le ministère et graduellement la région, se souvient-il. Je pense d’ailleurs qu’historiquement, ça doit être une des seules et c’est un modèle, dans la mesure où une compagnie de production qui était associée à un réseau de scènes nationales et de centres dramatiques en France mais également à l’étranger, avec sa base de production au cœur de ville, avec ses bureaux, ses équipes techniques et sa logistique ». En parallèle, Dominique Pitoiset a toujours enseigné. De l’Institut universitaire d’architecture de Venise à l’École du Teatro Stabile de Turin, en passant par l’École d’art dramatique Paolo Grassi de Milan, il a même créé son école en 2007, qui n’est autre que l’École supérieure de théâtre de Bordeaux Aquitaine, alors qu’il était directeur du Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine. « Ces cinq dernières années, j’étais d’ailleurs responsable de la chaire de scénographie et dramaturgie à l’Académie des beaux-arts de Venise. J’ai aussi enseigné dix ans à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris, qui est aujourd’hui devenu l’Académie de l’Opéra de Paris et qui sera, je l’espère, une des entités associées à mon premier mandat puisque toute une partie du projet que j’ai souhaité mener pour l’Opéra de Dijon est en direction de l’émergence et du renouvellement générationnel », développe-t-il. 

DE NOMBREUX PROJETS POUR L’OPÉRA DE DIJON 

En effet, celui qui avait quitté Dijon au tout début des années 2000 parce que l’Auditorium ouvrait est revenu, quelque 20 années plus tard pour le diriger. Sur proposition de François Rebsamen, il a ainsi pris la direction générale et artistique de l’Opéra de Dijon ce 1er janvier, avec un projet dense qui pourrait bien marquer l’histoire de cette belle maison. « Être directeur du navire amiral de la politique culturelle de Dijon et de sa métropole, c’est entrer en considération avec tous les partenaires potentiels, labélisés, conventionnés et existants sur le territoire. C’est un projet qui souhaite bien entendu conserver son rayonnement, mais je ne voudrais pas que sa dimension internationale procède du délit de fuite, confie Dominique Pitoiset. La période que nous traversons nous invite à reconsidérer les missions de nos établissements et les relations que nous établissons avec les communautés dans lesquelles nous inscrivons ces activités ». Ce projet est ainsi, à son image, multiple, conjugué au pluriel. De la programmation à l’articulation des lieux, en passant par un redéploiement de l’action culturelle et artistique, tout a été passé au crible et pensé pendant de nombreux mois. Entre autres projets, la remise à niveau du Grand théâtre avec le réaménagement de la partie loges et de l’accueil du public, mais aussi la reconsidération des lieux d’accueil du public à l’Auditorium, ainsi que des espaces ateliers pour les artisans qui travaillent en permanence sur site pour les costumes, décors et accessoires, et enfin, des espaces de répétition et des lieux d’accueil des artistes. « Une dimension non négligeable et sur laquelle la nouvelle génération va nous attendre, c’est la question de l’éco-responsabilité. Et les lieux culturels, de fait, ne sont pas exemplaires. Il n’y a qu’à voir la question des circulations et de l’indice carbone des tournées, sans oublier les conditions d’accueil, la vie au quotidien, les bâtiments et la conception des scénographies. » La programmation sera bien sûre ajustée avec l’accent mis sur la convention théâtre lyrique d’intérêt national – suspendue dans ses financements en 2019 – : « L’Opéra de Dijon gardera comme colonne vertébrale de ses activités les formes lyriques, auxquelles je souhaiterais adjoindre une programmation “danse” plus étoffée, ainsi qu’une proposition de plusieurs titres circassiens de grande forme ». Aux arts du son seront adjoints les arts du geste et plus graduellement les arts de l’espace. Enfin, la formation occupera aussi une certaine place. « En préfiguration de la future École supérieure d’architecture dijonnaise, nous souhaitons proposer la création et le développement d’une section professionnelle de scénographie dans les murs de l’opéra en accueillant des jeunes au niveau post-master qui seront en lien avec le bureau d’étude de nos ateliers de construction, dans l’élaboration de toutes les créations de la maison mais aussi des espaces d’exposition, dans et hors les murs, en lieu et place des espaces publics », détaille Dominique Pitoiset. Son objectif ? Ne pas oublier que « l’Opéra de Dijon a beau être un beau navire amiral à rayonnement fort, il n’en est pas moins un théâtre de quartier, à l’échelle d’une ville et d’une métropole ».

Parcours

1958 Naissance à Dijon.
1996 Dominique Pitoiset est nommé directeur du Théâtre Dijon Bourgogne.
2001 Départ pour l’Italie où il devient artiste associé au Verdi Festival de Parme.
2004 De retour en France, il prend la direction du Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine, où il crée l’École supérieure de théâtre en 2007, tout en enseignant à l’Académie de l’Opéra de Paris.
2014 Dominique Pitoiset devient artiste associé à Bonlieu Scène nationale Annecy et enseigne la scénographie aux académies des beaux-arts de Venise (Italie) et de Dresde (Allemagne).
2021 Au 1er janvier, il est nommé directeur général et artistique de l’Opéra de Dijon.